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8 novembre 1781 : mort du prédicateur Louis Poumle

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8 novembre 1781 : mort du
prédicateur Louis Poulle
Publié / Mis à jour le lundi 5 novembre 2012, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 3 mn
 

Louis Poulle, célèbre prédicateur et abbé commendataire de Notre-Dame de Nogent, vit le jour à Avignon. L’abbé Poulle éblouit plus qu’il ne persuade ; mais il entraîne dans certains moments par la vivacité des tours et des figures. Ses deux meilleurs discours, sans aucune comparaison, sont ceux qu’il prononça sous le titre d’Exhortations de Charité, en faveur des pauvres prisonniers et des enfans-trouvés ; et c’est l’éloge de son âme comme de son talent, qu’il n’ait jamais été plus éloquent qu’en faveur de l’infortune.

L’effet et le bruit de ces Exhortations fut prodigieux ; Paris et Versailles retentirent de ses succès, et c’était peu de chose ; mais l’auditoire ne lui résista pas, et ce fut là le vrai triomphe, celui qu’il remporta sur l’avarice et l’insensibilité, qui croient trop souvent avoir payé en applaudissant l’avocat des pauvres sans rien faire pour ses clients. Ici l’orateur put entendre un bruit plus doux à ses oreilles que celui des applaudissements : c’était l’or et l’argent tombant de tous côtés avec une abondance qui prouvait une émulation de charité.

Beaucoup de personnes donnèrent tout ce qu’elles avaient sur elles, et c’étaient des sommes. En un mot, on ne se souvenait pas d’avoir rien vu de semblable. L’éclat qu’avaient jeté les débuts de l’abbé Poulle dans la chaire, relevés encore par tous les avantages extérieurs et par ses agréments dans la société, faisait regarder comme une faveur un sermon promis par l’abbé Poulle, et en faisait la nouvelle de la cour et de la ville. Bientôt il fut magnifiquement récompensé par une riche abbaye. Naturellement paresseux, il prêcha plus rarement que jamais, et se retira presque entièrement de la chaire.

Il était né avec beaucoup de dispositions à la poésie, et avait remporté des prix en ce genre à Toulouse, avant d’être reconnu comme orateur. « Mais, dit La Harpe, s’il crut devoir quitter la poésie pour l’éloquence, il porta beaucoup dans cette dernière de ce qu’il tenait de l’autre ; et ce ne fut pas avec cette mesure et cette réserve d’un esprit sage qui discerne les propriétés et les convenances des deux genres si différents. Ce fut avec toute l’effervescence d’une tête méridionale, qui confond tellement ce qui est du poète et ce qui est de l’orateur, que je ne serais pas surpris qu’un juge tel que Quintilien, qui comptait Lucain parmi les orateurs plus que parmi les poètes, eut cru voir dans l’abbé Poulle un homme plus naturellement poète qu’orateur. »

C’est un fait connu et attesté, que l’abbé Poulle n’avait jamais rien écrit de se sermons : il les garda quarante ans dans sa mémoire ; et ce fut pour céder aux instantes de son neveu, qu’il consentit enfin à les lui dicter en 1778, trois ans avant sa mort, et il est mort presque octogénaire. « Cette manière de composer de tête, dit encore La Harpe, sans le secours de la main, est naturellement poétique, et tient à la fois à la facilité et à la mémoire ; mais c’est un prodige de cette dernière de conserver si longtemps ce qui n’a jamais été mis sur le papier.

« Cela serait rare même d’un ouvrage en vers ; mais de deux volumes de prose, et jusqu’à cet âge où il est si commun d’oublier, c’est une espèce de miracle... Rien n’est plus commun que de réciter de mémoire un ouvrage de poésie, qui n’est pas anciennement composé. C’est ainsi que Crébillon récitait son Catilina ; Roucher et M. l’abbé Delille leurs poèmes, et moi-même Mélanie. Mais il faut songer ici à la distance des temps, et surtout à celle de la poésie à la prose, qui est incalculable. »

Pour donner une idée encore plus complète du genre et du talent de l’abbé Poulle, nous terminerons cette notice en citant l’admirable péroraison du Discours sur l’Aumône, prononcé au Châtelet de Paris :

« Im me semble en ce moment entendre la voix de Dieu, qui me dit comme autrefois au prophète : Prêtre du Dieu vivant, que voyez-vous ? Seigneur ! je vois, et je vois avec consolation un nombre prodigieux de grands, de riches émus, touchés pour la première fois du sort des misérables. Passez à un autre spectacle ; percez ces murs ; percez ces voûtes ; que voyez-vous ? Une foule d’infortunés, plus malheureux peut-être que coupables. Ah ! j’entends leurs murmures confus, ces plaintes de la misère délaissée, ces gémissements de l’innocence méconnue, ces hurlements du désespoir : qu’ils sont perçants ! mon âme est déchirée.

« Descendez ; que trouvez-vous ? Une clarté funèbre, des tombeaux pour habitation ; l’enfer au-dessous ; une nourriture qui sert autant à prolonger les tourments que la vie ; un peu de paille éparse çà et là ; quelques haillons, des cheveux hérissés, des regards farouches ; des voix sépulcrales, qui, semblables à la voix de la Pythonisse, s’exhalent en sanglots comme de dessous terre ; les contorsions de la rage ; des fantômes hideux se débattant dans les chaînes ; des hommes l’effroi des hommes.

« Suivez ces victimes désolées jusqu’au lien de leur immolation ; que découvrez-vous ? Au milieu d’un peuple immense, la Mort sur un échafaud, armée de tous les instruments de la douleur et de l’infamie. Elle frappe : quelle consternation de toutes parts ! quelle terreur ! Un seul cri, le cri de l’humanité entière, et point de larmes. Comparez à présent ce que vous avez vu de part et d’antre, et concluez vous-même. Seigneur, plus je considère attentivement, et plus je trouve que la compensation est exacte. Je vois un protecteur pour chaque opprimé, un riche pour chaque pauvre, un libérateur pour chaque captif ; ils sont même presque en présence les uns des autres : il n’y a entre eux qu’un mur et le cœur des riches.

« Un prodige de votre grâce, ô mon Dieu ! et la charité ne fera bientôt plus qu’une seule vision de ces deux visions. Le prodige s’opère : les riches nous abandonnent ; ils se précipitent dans les prisons ; ils fondent dans les cachots ; il n’y a plus de malheureux ; il n’y a plus de débiteurs ; il n’y a plus de pauvres. Restent seulement quelques criminels, dévoués au glaive de la justice pour l’intérêt général de la société, dont ils ont violé les lois les plus sacrées ; mais du moins consolés, mais soulagés, mais disposés à recevoir leur supplice en esprit de pénitence, et leur mort même en sacrifice d’expiation : ces monstres vont mourir en chrétiens.

« C’en est fait : aux approches de la charité, tous ces objets lugubres qui affligeaient l’humanité ont disparu ; et je ne vois plus que les cieux ouverts, où seront admises ces âmes véritablement divines, puisqu’elles sont miséricordieuses, dignes de régner éternellement avec vous, ô le rédempteur des captifs ! ô le consolateur des affligés ! ô le père des pauvres ! ô le Dieu des miséricordes ! Ainsi soit-il. »

 
 
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