30 octobre 1632 : le duc de Montmorency est décapité à Toulouse

Henri II, duc de Montmorency, né le 30 avril 1595 au château de Chantilly, marcha de bonne heure sur les traces de ses aïeux. Après s’être signalé en plusieurs occasions contre les ennemis intérieurs et extérieurs de l’Etat, il devint maréchal de France et gouverneur du Languedoc.

Henri II de Montmorency

Il y jouissait paisiblement de l’estime et de l’affection universelle, lorsque, pour son malheur, Gaston, duc d’Orléans, qui s’était brouillé avec son frère et le cardinal de Richelieu, vint se réfugier dans son gouvernement. Montmorency se laissa entraîner dans sa révolte ; il fut blessé et fait prisonnier au combat, ou plutôt à la rencontre de Castelnaudary contre le maréchal de Schomberg. Le cardinal fit instruire son procès parle parlement de Toulouse, et ne se donna point de relâche qu’il n’eût été condamné à mort.

Au moment du supplice, lorsqu’il fallut donner ses bras au bourreau, afin qu’il les liât, le duc qui avait un crucifix entre ses mains, le remit au père Arnoux, son confesseur, en lui disant : « Tenez, mon père, il ne faut pas que le juste soit lié avec le coupable. » Au-dessus de la porte de l’Hôtel de Ville était la statue de marbre de Henri-le-Grand ; elle arrêta ses regards : et voyant que son confesseur le considérait, il lui dit : « Mon père, je regarde la figure de ce monarque, qui a été très bon et très généreux » ; il continua sa marche, et monta sur l’échafaud avec le même courage que s’il fût allé à une mort glorieuse.

Louis XIII qui était à Toulouse, envoyaa chercher le père Arnoux, pour savoir quelques particularités de sa mort : « Sire, lui dit Arnoux, votre majesté a fait un grand exemple sur la terre par la mort du duc de Montmorency, et Dieu par sa miséricorde en a fait un grand saint dans le ciel. » Le roi répondit en soupirant : « Je voudrais, mon père, avoir contribué à son saint par des voies plus douces. » Le corps du malheureux duc fut transporté dans l’église de la Visitation de Moulins, où Marie-Félice des Ursins, son épouse, dame illustre par sa vertu et par sa piété, lui fit dresser un magnifique tombeau de marbre.

Les historiens rapportent que Montmorency, avant d’aller à la mort, légua un fameux tableau du Carrache au cardinal, ce qui a été regardé par les uns comme une faiblesse, et par les autres comme un acte héroïque de christianisme. Les poètes, suivant l’usage, ne manquèrent pas d’exercer leur génie sur cet événement tragique. Comme le duc de Montmorency avait été décapité devant la statue d’Henri IV, et presque sous les yeux de Louis XIII, son fils, qui logeait près de l’Hôtel de Ville, on fit les quatre vers latins dont nous donnons la traduction :

« Ce fut devant la statue du père que le fils impitoyable me fit périr par une mort et par une main infâme. Tons les deux furent également insensibles à mon malheur : le visage du père et le cœur du fils étaient de marbre. »