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15 août 1785 : l’affaire du « Collier de la reine » donne lieu à l’arrestation du cardinal de Rohan à Versailles

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15 août 1785 : l’affaire
du « Collier de la reine »
donne lieu à l’arrestation du cardinal
de Rohan à Versailles
Publié / Mis à jour le dimanche 14 août 2016, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 4 mn
 

Bohmer, joaillier de la couronne, avait présenté à la reine un collier de diamants du plus beau choix, dont il demandait seize cent mille livres ; la reine n’en ayant pas voulu, le joaillier cherchait à s’en défaire dans les pays étrangers, lorsque arrive chez lui une dame, appelée la comtesse de la Motte-Valois, qui lui dit que la reine s’était ravisée, qu’elle prendrait ce collier qui serait payé à des époques fixes ; mais qu’elle exigeait que ce marché se passât dans le plus grand secret possible : en même temps elle lui présenta une prétendue lettre de la reine.

Signalons ici que la généalogie de madame Valois de la Motte, appuyée des titres les plus authentiques, et certifiés par le généalogiste d’Hozier de Serigny, juge d’armes de la noblesse en France, la faisait descendre de Henri Valois de Saint-Remi, fils naturel de Henri II et de Nicole de Savigny. Le duc de Céreste Brancas se chargea de présenter un mémoire à la reine et à M. de Maurepas, en faveur de la demoiselle de Valois et de son frère, que madame de Boulainvilliers avait trouvés à Passy, demandant l’aumône, et qu’elle avait fait élever à ses frais. On leur accorda une pension. Ce jeune Valois, qui servait dans la marine en qualité de matelot, fut fait enseigne de vaisseau, sous le titre de baron de Valois. Il était aussi mauvais sujet que sa sœur ; il avait moins d’esprit, et mourut avant elle.

Jeanne de Valois-Saint-Rémy, comtesse de la Motte

Jeanne de Valois-Saint-Rémy, comtesse de la Motte

Bohmer ne trouvant pas ces assurances suffisantes, en exigea de plus fortes ; alors madame de la Motte promit de lui envoyer, pour finir cette négociation, l’un des hommes les plus considérables de la cour ; ce qu’elle fit en effet, puisque le cardinal de Rohan alla trouver Bohmer, et conclut le marché pour quatorze cent mille livres.

On livra le collier à madame de la Motte, sur de prétendus billets de la reine, payables à des termes fixes, dont le premier de quatre cent mille livres, devait échoir le 1er août. Le cardinal n’ayant pas payé à cette époque, Bohmer s’en plaignit à une personne de la chambre de la reine ; il fournit ses preuves, entre autres une lettre de la propre main du cardinal, dans laquelle il dit à Bohmer « que le collier avait été remis. »

Une manœuvre aussi extravagante paraissait incroyable à la reine ; elle fut près de dix jours à concerter et à rassembler ses preuves, avant que d’en parler au roi. Le 15 août, le cardinal étant arrivé à Versailles pour remplir ses fonctions de grand aumônier, fut appelé à midi dans le cabinet du roi, où se trouvait la reine.

Lorsqu’il fut entré, le roi lui dit : « Vous avez acheté des diamants à Bohmer ? — Oui, Sire. — Qu’en avez-vous fait ? — Je croyais qu’ils avaient été remis à la reine. — Qui vous avait chargé de cette commission ? — Une dame de condition, appelée madame la comtesse de la Motte-Valois, qui m’a présenté une lettre de la reine, et j’ai cru faire ma cour à sa majesté, en me chargeant de cette négociation. »

Alors la reine l’interrompit : « Comment, monsieur, avez-vous pu croire, vous, à qui je n’ai pas adressé la parole depuis huit ans, que je vous choisissais pour conduire cette négociation, et par l’entremise d’une femme d’un pareil ordre ? — Je vois bien, répondit le cardinal, que j’ai été cruellement trompé ; l’envie que j’avais de plaire à sa majesté, m’a fasciné les yeux ; je n’ai vu nulle supercherie, et j’en suis fâché. — Mais, monsieur, reprit le roi, en lui présentant une copie de sa lettre à Bohmer, avez-vous écrit une lettre pareille à celle-ci ? »

Le cardinal après l’avoir parcourue des yeux : « Je ne me souviens pas, dit-il, de l’avoir écrite. — Et si l’on vous montrait l’original, signé de vous ? — Si la lettre est signée, elle est vraie. — Expliquez-moi donc, continua le roi, toute cette énigme. Je ne veux pas vous trouver coupable ; je désire votre justification. Expliquez-moi ce que signifient toutes ces démarches auprès de Bohmer, ces assurances et ces billets. »

Le cardinal pâlissait alors à vue d’œil, et s’appuyant contre la table : « Sire, je suis trop troublé pour répondre à votre majesté d’une manière... — Remettez-vous, M. le cardinal, reprenez vos sens ; et si notre présence vous trouble, passez dans ce cabinet, vous y trouverez du papier, des plumes et de l’encre ; écrivez ce que vous avez à me dire pour votre justificalion. »

Le cardinal passa dans le cabinet ; un quart d’heure après, il présenta au roi ce qu’il avait écrit ; c’était quelques lignes embrouillées et aussi énigmatiques que ce qu’il venait de dire ; alors le roi lui dit : « Retirez-vous, et tout de suite qu’on avertisse M. de Villeroi. » Le cardinal étant aussitôt sorti du cabinet avec le baron de Breteuil, fut arrêté par le duc de Villeroi, capitaine des gardes-du corps, qui le remit entre les mains du comte d’Agout, aide-major, qui le conduisit d’abord dans son hôtel à Paris, et puis à la Bastille.

Reconstitution du Collier de la reine (château de Breteuil)

Reconstitution du Collier de la reine (château de Breteuil)

Le cardinal était convaincu de si bonne foi que la sévérité avec laquelle la reine l’avait traité en présence du roi, était une preuve de l’entière confiance qu’elle avait dans sa discrétion, qu’au lieu de chercher à se justifier auprès du roi, il ne songea qu’à ne pas compromettre la reine. Après avoir confirmé, tantôt par son silence, tantôt par l’embarras de ses réponses aux interpellations de leurs majestés, l’accusation la plus propre à exciter contre lui l’indignation, son premier loin, dès qu’il fut arrêté, fut de faire partir à franc étrier un de ses gens pour Paris, avec ordre d’ouvrir l’encoignure de son cabinet, où étaient toutes les lettres de madame de la Motte, et de les brûler. Il lui donna cet ordre en allemand pour n’être pas entendu de l’officier, qui le ramena de la chambre du roi à l’appartement que le grand aumônier occupait dans le château.

Madame de la Motte fut arrêtée à Bar-sur-Aube, dans la terre de son mari, qui était déjà passé en Angleterre. Elle nia d’abord s’être mêlée de l’affaire pour laquelle on l’arrêtait, et déclara qu’on pourrait tirer sur ce sujet de plus grandes lumières de Cagliostro, chez lequel elle demeurait, rue Saint-Claude au Marais. Celui-ci fut arrêté dans le moment où il partait pour aller à Lyon établir une loge égyptienne. Ce fameux charlatan, qui se vantait très sérieusement d’avoir assisté aux noces de Cana, en Galilée, s’était emparé de l’esprit du cardinal, au point de lui persuader qu’il le faisait souper avec Voltaire, Montesquieu, etc. La veille du jour où le cardinal fut arrêté, Cagliostro l’avait fait souper avec Henri IV.

Le roi envoya dans le mois de septembre suivant des lettres patentes au parlement pour instruire l’affaire du cardinal : ces lettres respiraient le plus grand mécontentement. On lisait en tête : « Le roi, pénétré d’une juste indignation, en voyant les moyens qui, de l’aveu du sieur cardinal, ont été employés pour inculper notre très chère et très honorable épouse et compagne, etc., etc. » Le pape écrivit au roi pour lui représenter le droit qu’avaient les cardinaux de n’être jugés qu’à Rome. Le cardinal de Bernis, joignant la politique d’un homme d’Etat aux principes d’un prélat de l’Eglise, voulait qu’on étouffât cette scandaleuse affaire, dont l’éclat avilissait la reine, flétrissait la religion, et versait le mépris sur toute la cour.

Le roi fit au pape la réponse suivante : « Je sens vivement la douleur que doit vous causer la situation où se trouve un évêque, un membre du sacré collège ; mais croyez que je ne suis pas moi-même exempt de peine, et que cet étrange événement m’est aussi sensible qu’à vous-même. Mais puisque le cardinal a lui-même choisi son tribunal, le citer devant un autre serait aujourd’hui une démarche inconsidérée qui augmenterait encore l’éclat. »

L’affaire fut jugée dans les premiers mois de l’année 1786 : le cardinal fut pleinement acquitté, et sortit de la Bastille le 1er mai, mais ce fut pour aller en exil à son abbaye de la Chaise-Dieu. Madame de la Motte fut fouettée et marquée le 21 juin, le jour même où le roi partit pour son voyage de Cherbourg. Cagliostro fut banni de France ; et quant au collier, il avait été dépecé et vendu, partie en Angleterre et partie en Hollande.

Il y avait eu plusieurs autres personnes impliquées dans ce procès, dont la plus remarquable était une demoiselle d’Oliva, qui avait la taille et la démarche de la reine, et qui un soir en joua le rôle sur la terrasse de Versailles. Madame de la Motte voulant prouver au cardinal que le collier était parvenu à sa destination, lui dit que la reine voulait lui donner un gage de son contentement. Tous les deux s’étant rendus sur la terrasse, à huit heures du soir, la prétendue reine vient aussitôt à passer, et donne au cardinal une rose qui fut reçue avec toute la joie qu’on peut se figurer.

 
 
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