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5 août 1633 : mort de l’archevêque de Cantorbéry George Abbot

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5 août 1633 : mort de l’archevêque
de Cantorbéry George Abbot
Publié / Mis à jour le vendredi 3 août 2012, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 6 mn
 

George Abbot, archevêque de Cantorbéry, fut célèbre dans un temps où les controverses religieuses, mêlées partout aux querelles politiques, commençaient à remuer vivement l’Angleterre. Né en 1562 d’un tisserand à Guilford, dans le comté de Surrey, élevé successivement dans l’école de sa ville natale, qui avait pour fondateur Edouard VI, puis dans le collège de Bailleul à Oxford ; il était docteur en théologie, et l’un des plus fameux prédicateurs de l’église anglicane, lorsque le roi Jacques Ier, après l’avoir fait doyen de Winchester en 1599, le nomma en 1604 un des huit théologiens charges par le prince de traduire le Nouveau-Testament.

Elu en 1605, pour la troisième fois, vice-chancelier de l’université d’Oxford, Abbot perdit, en 1608, dans la personne de celui qui en était chancelier, le plus puissant et le plus chéri de ses protecteurs, Thomas Sackville, comte de Dorset, grand trésorier d’Ecosse. Il trouva sur-le-champ un nouvel appui dans le trésorier d’Ecosse, George Hume, comte de Dunbar, qui le sollicita d’être son chapelain, et l’emmena à Edimbourg, où ce lord avait à remplir depuis deux ans la pénible mission de réunir le kirk ou la congrégation d’Ecosse, avec le church ou l’église d’Angleterre.

Le roi, cruellement vexé par l’esprit et le pouvoir du presbytérianisme dans ces contrées, attachait la plus grande importance à y rétablir l’épiscospat : déjà le comte de Dunbar semblait y avoir remporté un grand avantage en obtenant de l’assemblée générale un acte qui ordonnait la restitution de tous les biens des évêques et de leurs sièges ; mais les zélés du parti venaient de faire éclater une résistance nouvelle et si vigoureuse, que loin d’espérer de gagner encore du terrain sur eux, on craignait de perdre celui que l’on avait tenu pour acquis. Lord Dunbar s’abandonna aux conseils d’Abbot, et toute cette résistance fut domptée, toute opposition abattue par l’esprit, l’habileté, et surtout la modération d’Abbot ; modération au reste qui lui coûtait peu quand il mesurait les droits de l’épiscopat, et qu’il oubliait complètement, lorsqu’il se ralliait avec les presbytériens à la haine du papisme.

Quoi qu’il en soit, il servit peut-être mieux les causes des évêques par son indifférence, qu’il ne l’eût fait par son zèle ; le résultat de la négociation fut un acte émané du kirk, et ratifié par le parlement écossais, portant : « qu’au roi seul appartiendrait la convocation des assemblées générales et le droit d’en nommer le modérateur ; que les évêques ou leurs députés seraient modérateurs nés et perpétuels de tous les synodes diocésains ; que personne ne pourrait être excommunié ni absous sans leur approbation ; que ce serait eux qui présenteraient à tous les bénéfices, dont aucun ministre de l’Evangile ne serait susceptible, sans avoir prêté le serment de suprématie et d’obéissance canonique ; qu’enfin la visite du diocèse serait partout une fonction attribuée exclusivement aux évêques ou à leurs délégués, et qu’aucun conciliabule ne pourrait se tenir, aucune réunion se former pour exercer, prophétiser, etc., sans avoir pour modérateur l’évêque du territoire sur lequel on s’assemblerait. »

Ce succès inespéré et toute la conduite d’Abbot en Ecosse plurent tellement à Jacques Ier, qu’il résolut de ne plus rien décider en pareille matière, sans avoir consulté le chapelain du lord Dunbar. A quelque temps de là, ce prince convoqua une assemblée du clergé, pour qu’elle eût à prononcer : si le roi d’Angleterre pouvait légitimement secourir les Etats-généraux de Hollande contre le roi d’Espagne ; Abbot était membre de cette assemblée, et l’un de ceux qui se faisaient le plus écouter. Jacques fut mécontent des opinions, il ne savait comment se mettre d’accord avec lui-même.

Outré, dans sa théorie, sur le droit divin des rois , et voulant, dans la pratique, secourir des sujets révoltés contre le leur, il reprochait tour à tour à son clergé de soutenir trop la royauté de fait, et trop la royauté de droit. Il avait proposé des questions, et il trouvait mauvais qu’on les examinât avant de les décider, dût-on les décider pour lui en définitif. De ces perplexités intérieures et de ces contradictions ouvertes sortit une lettre écrite par le roi Jacques au docteur Abbot ; lettre peu connue hors de l’Angleterre, qui même dans ce pays n’a vu le jour que longtemps après la mort des personnages intéressés, mais dont l’authenticité est incontestable, et qui, par son étonnante singularité, ne peut manquer d’exciter l’attention de nos lecteurs ; elle étoit ainsi conçue :

« Bon docteur Abbot, je ne puis m’empêcher de vous faire savoir le jugement que je porte sur la conduite de votre assemblée. J’y suis intéressé, et comme roi sur le trône (rex in solio), et comme ouaille du troupeau dans l’Eglise (unus gregis in ecclesia). Tout ce que vous et vos confrères avez débité d’un roi de fait ( expression, je suis bien aise de vous le dire, à laquelle se réduisent toutes celles employées dans vos canons), ne me regarde en rien. Je suis l’héritier direct et immédiat : la couronne m’appartient par tous les droits que vous pouvez articuler, le seul droit de conquête excepté.

« Enfin, mon avocat général vous a suffisamment expliqué ma pensée, tant sur la royauté en elle-même, que sur l’espèce de royauté qui réside en ma personne ; et je dois vous croire tous de mon avis, puisque le langage qu’il vous parlait en mon nom n’a été contredit par aucun de vous ; mais ce dont je pense que vous êtes tous bien positivement instruits, c’est que mon seul motif, en vous convoquant, a été de vous faire prononcer jusqu’à quel point, dans votre opinion, un roi chrétien et protestant peut aider une nation voisine à secouer le joug de son souverain naturel, pour cause d’oppression, de tyrannie, ou de tout autre grief, de quelque nom qu’il vous plaise de le qualifier. Du temps de la feue reine, ce royaume se crut parfaitement libre d’aider de ses conseils et de ses armes la cause de la Hollande, et aucun de votre robe ne m’a jamais dit que personne s’en fut fait un scrupule.

« C’est seulement depuis mon arrivée en Angleterre que quelques-uns d’entre vous ont, comme vous ne l’ignorez pas, élevé quelques difficultés à cet égard ; et quoique j’aie souvent manifesté ce que je pensais du droit des rois, sur leurs sujets, et particulièrement au mois de mai dernier, dans la chambre étoilée, à l’occasion du pamphlet de Hale, cependant je n’ai jamais fait mention de ces nouveaux scrupules, jusqu’au moment où je m’y suis vu forcé par les affaires de Hollande et d’Espagne. Le fait est que tous mes voisins me pressent de concourir à un traité entre cette Espagne et cette Hollande. Notre honneur ne souffrira certainement pas que les Hollandais soient abandonnés, surtout après tant de trésors et de sang prodigués en leur faveur.

« Je me suis donc déterminé à convoquer tout mon clergé, non tant pour satisfaire ma propre conscience qui est en pleine sécurité, que pour démontrer à tout ce qui nous environne que j’ai pu, en toute justice, épouser aujourd’hui la cause de la Hollande. Je n’avais aucun besoin réel de cette convocation, et vous me forcez à vous dire que je voudrais n’y avoir jamais songé : vous avez fouillé trop avant dans ces mystères de l’empire, dont tous les rois se réservent à eux seuls de connaître. Vous aurez beau désormais professer aversion pour la doctrine qui fait Dieu l’auteur du péché : vous l’avez frisé de très près, vous avez bronché sur le bord de l’abîme, en disant à propos de la question actuelle, que même l’autorité d’un, tyran est l’autorité de Dieu, et doit être représentée comme telle.

« Si le roi d’Espagne allait en revenir à réclamer encore son vieux droit pontifical sur mes Etats, je vois qu’il me faudrait chercher d’autres défenseurs que vous contre ses prétentions : car vous avez prononcé d’avance, que s’il était vainqueur, son autorité deviendrait celle de Dieu. Je n’ai pas le temps, M. le docteur, de vous en dire davantage sur cette controverse de théorie : mes ordres vous seront notifiés incessamment par mon avocat général. Jusques là, si vous m’en croyez, vous ne mettrez plus rien du vôtre dans cette discussion. C’est une arme à double tranchant, ou plutôt c’est cette lance qui guérissait d’un côté, mais qui blessait de l’autre. Sur ce, bon docteur Abbot, je vous recommande à la protection de Dieu, et demeure toujours votre bon ami Jacques, roi. »

Après avoir cité en entier cette lettre qui, pour le plus grand nombre des lecteurs, est la circonstance la plus intéressante de la vie d’Abbot, il nous suffira de dire qu’ayant passé rapidement par les évêchés de Lichtfield, de Londres, il fut fait archevêque de Cantorbéry à la mort de Baucroft, en 1610 ; qu’on le vit d’abord jouir tout à la fois d’une grande faveur et d’une popularité extrême ; que les amis de la paix aimèrent son esprit conciliant ; que les presbytériens comptèrent au moins sur son indulgence ; et que les philosophes le louèrent d’être si peu altéré de pouvoir.

Il paya cependant le tribut à l’esprit de corps, en défendant avec plus de vivacité qu’on ne s’y serait attendu, l’existence de la haute cour de commission, même contre les injonctions du célèbre lord Cook ; mais on le vit conserver toute la pureté incorruptible, toute la noble fermeté de son ministère, en s’opposant jusqu’à la fin au divorce du comte et de la comtesse d’Essex, si ardemment et si indiscrètement poursuivi par le roi.

La dissolution du mariage fut prononcée à la pluralité seulement de deux voix ; l’archevêque de Cantorbéry fut à la tête des membres de là commission, qui protestèrent contre le jugement. Moins intéressant, lorsqu’avec un fanatisme puéril, il cherchait à soulever tout le clergé contre une proclamation royale qui permettait les récréations innocentes pendant une partie du dimanche ; bon calviniste plutôt que bon politique lorsqu’il travaillait à enflammer Jacques Ier pour le projet d’établir son gendre, l’électeur palatin, sur le trône de Bohême ; plus digne de compassion que de haine, quand il voyait dans cette chimère l’accomplissement des prophéties de Saint-Jean et le pouvoir de la bête, c’est-à-dire, du pape, tombant pièce par pièce, selon la parole de Dieu.

Il s’attira de nombreux ennemis qui crièrent au scandale et à la déchéance, lorsque, peu de temps après cette dernière discussion, il eut le malheur de tuer à la chasse un des gardes de lord Zouch ; il lui fallut obtenir le pardon et la réhabilitation du roi, qui les lui accorda emphatiquement, en disant qu’un ange eût pu pécher de cette manière. Cet événement le plongea dans une mélancolie qui aggrava d’autres infirmités : il put encore recevoir les derniers soupir de Jacques Ier, et consacrer le fils qui lui succédait ; mais alors il se trouva en butte à des inimitiés terribles, celle du duc de Buckingham, le plus haineux, le moins généreux des hommes puissants, et celle de l’évêque Laud, aussi suspect de papisme que l’archevêque l’était de calvinisme.

La première occasion que le primat d’Angleterre donna au ministre favori de lui faire éprouver sa malveillance, fut encore une circonstance glorieuse pour Abbot : il était en quelque sorte le précurseur de Hampden. Une proclamation royale avait été publiée pour lever, sous le nom d’emprunt, un subside excusé par l’exemple, mais non autorisé par la loi : un ecclésiastique de cour avait prêché en faveur de l’emprunt. Le primat reçut de Buckingham un ordre du roi, qui lui enjoignait d’autoriser de sa signature l’impression de ce discours : il s’y refusa ; et comme en Angleterre on exilait encore à cette époque, il fut relégué à sa maison de campagne près de Cantorbéry, et l’exercice de sa primatie, mis en commission.

Il fallut bientôt convoquer un parlement, et rendre à la chambre des pairs son premier membre, à Cantorbéry son archevêque, à l’Angleterre son primat : la cour s’en vengea en faisant baptiser le prince de Galles par l’évêque de Londres. Abbot succomba, enfin sous le poids des années, des infirmités et de toutes ces petites vexations. Il mourut le 5 août 1633, âgé de soixante et onze ans, laissant deux réputations bien différentes selon les diverses Eglises et les divers partis qui le jugeaient.

 
 
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