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27 juillet 1759 : mort du philosophe et physicien Pierre-Louis Moreau de Maupertuis

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27 juillet 1759 : mort du philosophe et
physicien Pierre-Louis Moreau de Maupertuis
Publié / Mis à jour le vendredi 27 juillet 2012, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 3 mn
 

Pierre-Louis de Maupertuis, né à Saint-Jouan-des-Guérets (Saint-Malo) le 28 septembre 1698, d’une famille noble, membre de l’Académie des sciences, fut choisi en 1736, pour être à la tête des académiciens que Louis XV envoya dans le Nord, pour déterminer la figure de la terre. Malgré les grandes difficultés et les obstacles qui traversèrent cette entreprise, elle fut exécutée en un an avec toute la diligence et tout le succès qu’on pouvait espérer de ces nouveaux argonautes. La peinture qu’en fait un historien, mérite d’être rapportée :

Pierre-Louis Moreau de Maupertuis

Pierre-Louis Moreau de Maupertuis

« D’abord ils cherchèrent un lieu favorable à leurs opérations, sur les bords du golfe de Bothnie : ils n’en trouvèrent point. Il fallut s’enfoncer dans l’intérieur des terres, remonter le fleuve de Tornéa, depuis la ville de Torno, au nord du golfe, jusqu’à la montagne de Kittes au delà du cercle polaire. Il fallut se mettre à couvert de ces terribles mouches qui sont la terreur des Lapons, qui tirent le sang à chaque coup qu’elles donnent de leur aiguillon y et qui feraient bientôt périr un homme sous leur nombre : elles infectaient tous les mets. Les oiseaux de proie très nombreux, et très hardis dans ces climats, enlevaient quelquefois les viandes qu’on servait à ces académiciens : ils étaient, comme Enée, au milieu des harpies. Il fallut franchir les cataractes du fleuve, se faire jour, la hache à la main, au travers d’une forêt immense qui embarrassait leur passage et nuisait à leurs opérations.

« Il fallut gravir sur toutes les montagnes ; dépouiller leur sommet des bouleaux, des sapins et de tous les arbres qui les dérobaient à la vue ; dresser, sur la cime des plus hautes, des signaux propres à être aperçus de plusieurs lieues, afin de déterminer les triangles nécessaires. Il fallut établir une base qu’on pût mesurer sur un fleuve glacé et couvert de plusieurs pieds de neige très fine et sèche, semblable à du sablon, qui roulait sous les pieds, et qui dérobait aux yeux des précipices où l’on pouvait être enseveli sous elle.

« Il fallut braver un froid si vif et si rigoureux, que les habitants du pays, accoutumés à son âpreté, en perdent quelquefois un bras ou une jambe. L’eau-de-vie était la seule liqueur qui ne gelât point : si l’on appuyait sur les lèvres le vase qui la contenait, le froid l’y attachait, et it fallait déchirer les lèvres pour l’en séparer. Rien ne rebuta les académiciens. Chacun fit des observations en particulier ; toutes se rapportèrent avec une justesse qui en démontra l’exactitude. Et après tant de soins, de peines et de travaux, ils firent naufrage sur le golfe de Bothnie, et pensèrent perdre, avec la vie, le fruit d’une entreprise si difficile et si pénible. »

Enfin, après avoir fourni heureusement avec ses collègues, cette course aussi glorieuse qu’utile, Maupertuis fut appelé, en 1740, par le roi de Prusse, pour recevoir la présidence et la direction de l’académie de Berlin. C’est là qu’il eut une querelle fameuse avec Voltaire, avec lequel il était difficile de n’en point avoir, surtout à la cour d’un roi qui ne pouvait partager assez également ses faveurs entre le poète et le mathématicien, pour écarter loin d’eux les petitesses de l’envie.

Maupertuis avait inséré dans le volume des Mémoires de l’Académie de Berlin, un écrit sur les lois du mouvement et du repos, déduites d’un principe métaphysique ; ce principe est celui de la moindre quantité d’action. Un professeur de philosophie, nommé Koenig, attribua l’invention de ce principe à Leibniz, en citant le fragment d’une prétendue lettre écrite autrefois par ce savant à Herman, professeur à Bâle en Suisse ; Maupertuis engagea l’académie de Berlin à sommer Koenig de produire l’original de la lettre citée. Le professeur n’ayant pu satisfaire à cette demande, fut exclu unanimement de l’académie dont il était membre.

Plusieurs écrits furent la suite de cette guerre, et Voltaire en prit occasion de satisfaire son envie naturelle de ridiculiser tous ceux qui jouissaient de quelque réputation. En vain le roi de Prusse lui ordonna de rester neutre ; il débuta par une réponse fort amère d’un académicien de Berlin à un académicien de Paris, au sujet d’un démêlé du président de l’académie de Berlin, et du professeur. Celte satire fut suivie de la diatribe du docteur Akakia, critique sanglante de la personne et des ouvrages de Maupertuis ; l’auteur s’y moque de toutes les idées que son adversaire avait consignées dans ses Œuvres, comme celles d’établir une ville latine, de ne point payer les médecins lorsqu’ils ne guérissent pas les malades, de démontrer l’existence de Dieu par une formule algébrique ; de disséquer des cerveaux de géants, afin de sonder la nature de l’âme, et de faire un trou qui allât jusqu’au centre de la terre.

On opposa aux satires de Voltaire, les éloges dont il avait comblé son ennemi. En 1728, Maupertuis était un génie sublime, notre plus grand mathématicien, un Archimède, un Christophe Colomb pour les découvertes ; un Michel-Ange, un Albane pour le style : en 1752 , ce n’était plus qu’un esprit bizarre, un raisonneur extravagant, un philosophe insensé.

Voltaire, obligé de quitter le cour de Prusse au commencement de 1753, se consola de sa disgrâce par de nouvelles satires. Maupertuis lui envoya un cartel, et Voltaire n’y répondit qu’en le traitant de vieux capitaine de cavalerie, travesti en philosophe, en lui disant qu’il avait le nez écrasé ; la perruque de travers, le visage plat et l’esprit plein de lui-même. Le roi de Prusse fit arrêter Voltaire à Francfort, avec sa nièce qui était venue l’y joindre, et on accusa injustement Maupertuis d’avoir porté le monarque à cette démarche.

Cependant la mauvaise santé du président de l’académie de Berlin l’obligea de revenir en France ; il y séjourna depuis 1756 jusqu’en 1758, qu’il se rendit à Bâle auprès des fameux Bernouilli, dans les bras desquels il mourut.

 
 
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