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17 avril 1912 : une éclipse solaire perlée fait de l'ombre à la catastrophe du Titanic

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Événements marquants
Evénements ayant marqué le passé et la petite ou la grande Histoire de France. Faits marquants d’autrefois.
17 avril 1912 : une éclipse solaire « perlée »
fait de l’ombre à la catastrophe du Titanic
(D’après « Le Figaro », n° du 17 avril 1912)
Publié / Mis à jour le mardi 17 avril 2012, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 4 mn
 
 
 
Le 17 avril 1912 eut lieu une forme assez rare d’éclipse de soleil dite « perlée », l’événement étant considéré comme suffisamment important pour... que le journal Le Figaro jugeât opportun de faire de l’ombre à la catastrophe du Titanic, reléguée au second plan tandis que l’éclipse jouissait de la une. Jean Mascart, astronome à l’Observatoire de Paris, explique alors à ses contemporains les enjeux et les bénéfices nombreux que l’on peut retirer d’une observation minutieuse de ce phénomène exceptionnel.

Aujourd’hui donc, 17 avril, une éclipse de soleil sera visible aux environs de Paris, écrit notre astronome : nul ne peut rester indifférent à un spectacle aussi curieux ; dans la capitale elle-même, si la lune ne vient pas cacher entièrement le soleil, l’assombrissement sera déjà assez important pour attirer l’attention.

Depuis la plus haute antiquité, les hommes connaissent les cycles qui périodiquement, font apparaître les grands phénomènes célestes et, pour les éclipses, le lent progrès consiste dans la précision croissante avec laquelle nous savons prédire le jour, l’heure et les diverses conditions du phénomène dans les différents lieux de la terre. Nous n’éprouverons plus les frayeurs extraordinaires des âges primitifs devant le monstre qui va dévorer la lumière du flambeau auquel toute la vie est suspendue, ou devant la colère des dieux : devons-nous en être plus fiers, alors que notre science déplace et multiplie les difficultés ?

Ceux qui virent l'éclipse de 1724. Ceux qui veulent voir l'éclipse de 1912

« Ceux qui virent l’éclipse de 1724. Ceux qui veulent voir l’éclipse de 1912 »
Illustration parue dans le supplément du Petit Journal du 21 avril 1912

Examinons de plus près notre éclipse. La terre tourne autour du soleil. Mais la lune, qui tourne autour de la terre, pourra se trouver entre !a terre et le soleil et nous cacher en partie ce dernier. Le diamètre réel de la lune est, assurément, incomparablement plus petit que celui du soleil mais comme, d’autre part, elle est beaucoup plus près de nous, à la distance de soixante rayons terrestres seulement au lieu de vingt-trois mille quatre cents pour le soleil, il en résulte que ces deux corps, lune et soleil, nous paraissent avoir sensiblement le même diamètre apparent.

Voici où le problème se complique : la lune ne tourne pas circulairement autour de la terre ; dans sa trajectoire si variée, sa distance à la terre est tantôt plus grande, tantôt plus petite, et l’écart peut s’élever à cinq fois et demie le diamètre terrestre ; elle nous paraîtra de ce fait plus ou moins grosse suivant la distance. En outre, la terre, et par conséquent la lune, est plus éloignée du soleil en été qu’en hiver : le cône d’ombre porté par la lune sera donc plus long en été qu’en hiver et la variation, de ce fait, peut atteindre un diamètre de notre globe.

Enumérant les différents types d’éclipses, Jean Mascart nous explique que s’agissant de l’éclipse de 1912, le cône d’ombre, primaire ou secondaire, coupe la surface du sol suivant un cercle ; par suite du mouvement de rotation de la terre, ce cercle décrit sur le sol une étroite bande, bande d’autant plus étroite que l’éclipse doit être à peine totale : si l’on veut jouir du spectacle de l’éclipse. totale ou annulaire, c’est sur cette bande qu’il faut se placer, car en dehors de cette zone, comme à Paris, on n’aura que l’apparence beaucoup moins curieuse d’une éclipse partielle.

Et c’est pourquoi, aussi, en un lieu donné, les éclipses totales ou annulaires de soleil sont si rares. Il s’en produit cependant environ deux cents par siècle ; mais, pour la région parisienne, la dernière qui put être observée est celle du 22 mai 1724 ; qui voudra attendre la prochaine, le 11 août 1999 ? écrit notre astronome, qui ajoute que les éclipses de lune sont tout autres : la lune entre dans l’ombre de la terre, elle est donc assombrie en même temps pour toute la terre et non pour une étroite bande. Elles sont donc beaucoup plus faciles à voir : sans doute, par cela, la nature les fit beaucoup moins intéressantes.

Demain, notre éclipse ; commence par être annulaire au Venezuela, explique Jean Mascart ; puis le cône d’ombre traverse l’Atlantique, où l’éclipse devient totale, passe au nord du Portugal, au nord-ouest de l’Espagne, traverse le golfe de Gascogne, entre en France près des Sables-d’Olonne et se dirige vers Paris. Plus, loin, il ajouter qu’en dehors de la curiosité que comporte un phénomène très rare, les éclipses totales offrent un haut intérêt scientifique et sont toujours attendues par les astronomes avec une vive impatience : le soleil est ta source de notre vie superficielle, la principale source d’énergie sur la terre ; il règle nos climats comme la circulation atmosphérique, et s’il est vrai, comme on le peut aujourd’hui pressentir, qu’il est le siège de manifestations en relation intime avec nos phénomènes météorologiques, on entrevoit la possibilité dans l’avenir de prédire les changements atmosphériques, ce qui rendrait grand service, notamment à l’agriculture.

En fait, en tout pays, les études solaires prirent un essor remarquable durant ces dernières années, observe l’astronome, qui poursuit : or le soleil est le siège de flammes, de protubérances, qui s’élancent à quelque cent mille kilomètres de sa surface ; il est entouré d’une vaste atmosphère, d’une couronne aux aspects changeants et qui nous renseigne sur l’état d’activité de notre corps central : tout cela est noyé dans l’éclat du soleil et nous ne pouvons réellement le voir, en jouir pleinement et l’étudier encore plus utilement, que lorsque la lune nous cache la surface solaire, pendant une éclipse totale.

Observateurs de l'éclipse du 17 avril 1912

Observateurs de l’éclipse du 17 avril 1912

Outre les études théoriques, outre la beauté du spectacle, les flammes, les protubérances, la couronne, chacun peut s’intéresser à l’éclipse, le plus modeste amateur, même à l’œil nu, peut faire d’utiles observations : noter si l’on voit le disque de la lune en dehors du soleil ; apprécier les variations des ombres pendant tes instants qui suivent ou précèdent la phase principale ; inscrire les variations de la température, de la coloration de l’atmosphère et des nuages, l’abaissement apparent du ciel au Zénith ; dessiner la couronne et les rayons lumineux ; observer si l’on remarque vers l’Ouest l’arrivée du cône d’ombre de la totalité ; étudier l’influence de l’éclipse sur les plantes, l’homme et les animaux qui manifestent généralement une certaine frayeur.

Quant aux amateurs photographes, ils pourront prendre plusieurs fois le même paysage, ou les mêmes objets, avec des plaques identiques et les mêmes temps de pose ; les mieux outillés pourraient tenter, avec des plaques anti-halo, la photographie des diverses phases de l’éclipse et de la couronne, même du soleil. Si l’on veut dédoubler un objectif rectiligne ou anastigmate de foyer un peu long et fabriquer une « rallonge » pour la chambre noire, on pourra obtenir des images assez grandes du soleil. De toutes façons, on devra employer des plaques lentes et faire des instantanés très rapides — sauf si l’on tente l’instant même de la totalité.

Toute observation aura sa valeur. Cette valeur sera plus grande, bien entendu, si l’on repère avec soin, sa position géographique sur une carte, ce qui n’est pas difficile et, surtout, si l’on note avec précision l’heure de chaque observation. Dès 8h45 du matin, la tour Eiffel enverra les signaux horaires par radiotélégraphie, toutes les deux heures ; enfin, un ballon captif et un dirigeable seront chargés par le ministère de la Guerre de collaborer à l’étude de cet important phénomène astronomique.

Les amateurs, les simples curieux ne devront pas oublier de se couvrir les yeux de forts verres noirs, de fumer copieusement les objectifs de leurs jumelles. Les professionnels concentrent leurs efforts pour déterminer le passage exact de la zone de totalité et sa durée : ils obtiendront ainsi des éléments plus précis encore que ceux que l’on possède à ce jour, dans le but d’améliorer la prévision des éclipses futures. Le progrès est lent, conclut Jean Mascart. A ceux qui trouveraient — ils ne doivent pas manquer ! — que les astronomes sont bien coupables de tant d’incertitudes, nous conseillerons bien volontiers de se mettre à l’œuvre pour nous aider ; ils se rendront compte exactement des difficultés... et nous ne craignons pas le progrès, nous l’appelons de nos vœux.

Mais fera-t-il beau temps pour assister au spectacle grandiose de l’éclipse ? Les pronostics ne sont pas brillants. Cependant, après s’être fait attendre soixante-quinze ans, la comète de Halley nous fut si inclémente que le ciel nous devrait bien une compensation : les nuages se rappellent-ils leur irrévérence ?... Il faut toujours « essayer » de voir l’éclipse.

 
 
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