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Coutumes et traditions : pénitents de Limoges (Haute-Vienne)

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Coutumes, Traditions
Origine, histoire des coutumes, traditions populaires et régionales, fêtes locales, jeux d’antan, moeurs, art de vivre de nos ancêtres
Pénitents de Limoges (Haute-Vienne)
décembre 1999, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 3 mn
 

Les treizième et quatorzième siècles, si profondément troublés par les prétentions du saint-siège à l’encontre de l’autorité souveraine des princes chrétiens et par la résistance de ceux-ci, furent une époque florissante pour les confréries de pénitents, associations religieuses de laïques réunis, disent leurs statuts, dans un but de prière en commun et d’oeuvres de charité.

Cent ans auparavant, l’enseignement d’Abailard, la prédication d’Arnaud de Bresse et l’exemple du Lyonnais Pierre Valdo, fondateur de la secte des Vaudois, avaient introduit dans le monde le principe de libre examen et l’esprit de controverse ; ces deux promoteurs des luttes sanglantes qui aboutirent à la Réforme, multiplièrent le nombre des opposants confondus sous le nom d’hérétiques.

L’Église catholique, se jugeant menacée, favorisa, provoqua, pour ajouter à ses forces, la création de corporations pieuses et d’établissements religieux. De toutes parts on érigea des abbayes, on bâtit des monastères que l’ardeur d’un infatigable prosélytisme peupla de moines et de religieuses de toutes les couleurs. A ces auxiliaires du clergé régulier, liés comme lui par des voeux éternels, se joignirent, comme ces corps de partisans qui servent dans nos armées sans en faire officiellement partie, des troupes de fidèles se recrutant elles-mêmes dans toutes les classes de la société. Bourgeois, paysans, gens de métier, se groupèrent en compagnies. Ces groupes, placés chacun sous l’invocation et la bannière d’un saint différent, prirent la dénomination de confréries.

Pour ne parler que de celles qui s’établirent en France, il y en avait à Lyon, à Avignon, dans le Languedoc et le Dauphiné. La première de toutes, qui dut, suppose-t-on, sa création à la terreur superstitieuse de l’an 1000, fut fondée à Péronne au commencement du onzième siècle.

Nées beaucoup plus tard, les confréries de pénitents de Limoges ne furent pas moins célèbres. Celle des pénitents noirs de Sainte-Croix eut pour fondateur un ecclésiastique nommé Bernard Bardon de Brun, auteur d’une tragédie intitulée : Saint Jacques. En 1596, il voyait représenter son oeuvre théâtrale à Limoges par les élèves du collége des Jésuites ; deux ans plus tard, l’évêque Henri de la Martonie approuvait les statuts que l’auteur tragique avait fait adopter par ses pénitents noirs.

Pénitents de Limoges (costumes exposés en 1874 dans le Musée historique du costume). Dessin de Sellier

Pénitents de Limoges (costumes
exposés en 1874 dans le Musée historique
du costume). Dessin de Sellier

Le rescrit épiscopal est à la date du 10 septembre 1590. A la confrérie due à l’initiative de Bernard Bardon de Brun, quatre vinrent successivement s’adjoindre qui étaient, ainsi que l’écrit M. Laforest, « comme les branches d’une même famille » .

Chacune des cinq corporations avait sa couleur particulière à laquelle on attachait un sens symbolique. Il y avait les pénitents noirs, dont la robe figurait la tristesse du Calvaire ; celle des bleus, l’azur du ciel des Thébaïdes ; celle des blancs, l’innocence de la vie chrétienne ; celle des gris, les salutaires rigueurs de la pénitence ; enfin, la robe couleur feuille morte rappelait les tristesses de la solitude où Madeleine alla cacher ses pleurs et expier ses péchés.

Ces confréries étaient dites voilées, à cause du vêtement dont les pénitents se voilaient la face. Ce vêtement, nommé sac de la pénitence, ou vulgairement cagoule, avait, en effet, la forme d’un sac renversé, tombant jusqu’aux pieds, terminé en pointe par le haut et percé de deux trous à la hauteur des yeux.

Suivant les prescriptions de leurs statuts, les confrères devaient paraître aux cérémonies publiques sous le sac de la pénitence, une torche à la main et pieds nus ; ils avaient en outre pour devoir d’enseigner les commandements de Dieu aux gens de leurs maisons et aux ignorants ; le jeûne leur était imposé le dernier vendredi de chaque mois. Les confrères devaient aussi visiter et assister les pauvres, les malades et les prisonniers. A la mort d’un membre de la confrérie, le défunt était exposé vêtu de l’habit de pénitence, la face découverte et les pieds nus, puis porté à l’église et au cimetière par six de ses confrères.

Malgré l’article des statuts qui donnait une place aux pénitents dans les cérémonies publiques, ce ne fut qu’en 1643 qu’ils firent pour la première fois, à Limoges, partie de la procession de l’octave de la Fête-Dieu, encore le droit de s’y montrer sous l’habit réglementaire et d’y promener leurs bannières leur fut-il contesté par les magistrats siégeant au présidial. Les pénitents protestèrent ; un arrêt du Parlement les renvoya devant le conseil du roi ; enfin l’évêque intervint et obtint un jugement qui déclarait les décisions du présidial abusives et attentatoires à l’autorité ecclésiastique. Grâce à ce jugement, les pénitents continuèrent à assister en corps aux processions de l’octave du Saint-Sacrement.

Une nouvelle confrérie fut autorisée en 1661, à Limoges : celle des pénitents de la charité, sous le titre, de Jésus souffrant. Les membres de cette nouvelle corporation avaient adopté la robe couleur pourpre. Ils avaient pour mission spéciale d’assister les misérables les plus délaissés, les prisonniers et les condamnés à mort. A la nouvelle d’une condamnation à la peine capitale, la confrérie nommait douze visiteurs. Ceux-ci, couverts du sac de la pénitence, parcouraient la ville et quittaient les rues des aumônes destinées à adoucir les derniers moments du condamné et à faire prier pour lui.

Le premier condamné à mort qui fut assisté par les pénitents pourpres était, dit Pierre Mesnager, « un simple homme de Saint-Julien qui, lors de leur établissement, avait déjà commencé la mauvaise affaire de sa condamnation ». C’était dans cette confrérie, assure-t-on, à qui s’offrirait pour remplir l’office le plus rebutant, le ministère le plus douloureux. Ainsi, le droit de détacher le supplicié du gibet, de l’ensevelir dans le suaire, était mis à l’encan et adjugé au plus haut enchérisseur.

Mais cette charitable émulation était-elle universellement pratiquée par les confrères de la pénitence, et confrérie ne fut-il pas parfois synonyme de frairie ? On lit dans l’Estoile que certain moine nommé le Poncet, prêchant à Notre-Dame, dit en chaire : « J’ai esté averti de bon lieu qu’hier au soir, vendredi, jour de la procession, la broche, où rôtissait un gros chapon, tournait pour ces bons pénitents. Ah ! malheureux hypocrites, vous vous moquez donc de Dieu sous le masque, et portez pour contenance un fouet à votre ceinture ; ce n’est pas là, de par Dieu, où il faudrait le porter ; c’est sur vostre dos et vos épaules, et vous en étriller très bien. Il n’y a pas un de vous qui ne l’ait gagné très bien ».

L’Estoile nous apprend que le lendemain de ce prône audacieux, le roi fit emprisonner le Poncet. Il faut ajouter que ceci avait lieu en 1585, et que le roi, qui avait nom Henri, était au nombre des pénitents blancs qui se régalèrent d’un chapon rôti, le vendredi 25 mars, au sortir de la procession.

 
 
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