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1er janvier 1806 : rétablissement du calendrier grégorien

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1er janvier 1806 : rétablissement
du calendrier grégorien
(D’après « Manuel pour la concordance des calendriers républicain et grégorien,
ou recueil complet de tous les annuaires depuis la première année
républicaine » (par Antoine-Augustin Renouard), paru en 1805)
Publié / Mis à jour le lundi 1er janvier 2024, par LA RÉDACTION
 
 
Temps de lecture estimé : 10 mn
 
 
 
Le calendrier républicain n’avait jamais été adopté en France universellement : il en résultait une double manière de diviser l’année. Aussi avait-on commencé par abolir les décades, et par leur substituer la semaine, petite période indépendante des mois et des années.

En date du 22 fructidor an XIII (9 septembre 1805), le sénatus-consulte sur le rétablissement du calendrier grégorien porte que « Napoléon, par la grâce de Dieu et les Constitutions de la République, Empereur des Français, à tous présents et à venir, salut.

« Le Sénat, après avoir entendu les orateurs du Conseil d’État, a décrété et nous ordonnons ce qui suit :

« Le Sénat conservateur, réuni au nombre de membres prescrit par l’article XC de l’acte des constitutions du 22 frimaire an VIII ;

« Vu le projet de sénatus-consulte, rédigé en la forme prescrite par l’article LVII de l’acte des constitutions du 16 thermidor an X ;

« Après avoir entendu, sur les motifs dudit projet, les orateurs du gouvernement, et le rapport de la commission spéciale nommée dans la séance du 15 de ce mois, décrète ce qui suit :

« Art. Ier. À compter du 11 nivôse prochain, premier janvier 1806, le Calendrier grégorien sera mis en usage dans tout l’Empire français.

« II. Le présent sénatus-consulte sera transmis par un message à Sa Majesté Impériale.

« Les président et secrétaires, signé François (de Neufchâteau) président ; Colaud, Porcher, secrétaires. Vu et scellé, le chancelier du Sénat, signé Laplace.

« Mandons et ordonnons que les présentes, revêtues des sceaux de l’Etat, insérées au Bulletin des Lois, soient adressées aux Cours, aux Tribunaux et aux Autorités administratives, pour qu’ils les inscrivent dans leurs registres, les observent et les fassent observer ; et notre Grand-Juge Ministre de la Justice est chargé d’en surveiller la publication.

« Donné au palais impérial de Saint-Cloud, le 24 fructidor an XIII, de notre règne le second. Signé Napoléon. »

Voici les motifs du sénatus-consulte présenté au Sénat conservateur, dans sa séance du 15 fructidor, par Regnault de Saint-Jean-d’Angély et Mounier, orateurs du gouvernement :

« Tous les changements, toutes les réformes que la politique a approuvés lorsque le génie les a conçus, que les mœurs ont sanctionnés lorsque les lois les ont consacrés, que les mations étrangères commenceront par envier et finiront par emprunter à la nation française, sont et seront toujours soigneusement maintenus par l’administration, fortement protégés par le gouvernement.

« Tel est, par exemple, l’établissement des nouveaux poids et mesures, que défendront toujours contre la routine, l’obstination, ou l’ignorance, l’unanimité de l’opinion des savants, la base invariable de leur travail, la nature même de cette base, qui est commune à toutes les nations, les avantages de la division pour les calculs, enfin le besoin de l’uniformité pour l’Empire, et tôt ou tard le besoin de l’uniformité pour le monde.

« Mais parmi les établissements dont l’utilité a été niée, dont la perfection a été contestée, dont les avantages sont demeurés douteux, il n’en est point qui ait éprouvé de contradiction plus forte, de résistance plus opiniâtre, que le nouveau Calendrier décrété le 5 octobre 1793, et régularisé par la loi du 4 frimaire an II.

« Il fut imaginé dans la vue de donner aux Français un calendrier purement civil, et qui, n’étant subordonné aux pratiques d’aucun culte, convint également à tous.

« Cependant, quand la première idée de la division décadaire fut proposée, au nom du Comité d’instruction publique de la convention, à un comité de géomètres et d’astronomes pris dans l’académie des sciences, cette innovation fut unanimement désapprouvée et combattue par des raisons qu’il est inutile de rappeler, puisque la division par semaine est déjà rétablie, et que l’opposition des savants portait sur la difficulté et les inconvénients de sa suppression.

« Cette substitution de la semaine à la décade a déjà fait perdre au calendrier français un de ses avantages les plus usuels, c’est-à-dire, cette correspondance constante entre le quantième du mois et celui de la décade. En effet, le nombre 7 n’étant diviseur ni des nombres de jours du mois, ni de celui des jours de l’année, il est impossible, dans le calendrier français qui, en cela, ressemble à tous les autres, d’établir une règle tant soit peu commode pour trouver le quantième du mois par celui de la semaine, ou réciproquement.

« Les avantages qui restent encore au calendrier français, ne seraient pas pourtant à dédaigner : la longueur uniforme des mois composés constamment de 30 jours ; les saisons qui commencent avec le mois, et ces terminaisons symétriques qui font apercevoir à quelle saison chaque mois appartient, sont des idées simples et commodes qui assureraient au calendrier français une préférence incontestable sur le calendrier romain, si on les proposait aujourd’hui tous deux pour la première fois ; ou, pour mieux dire, personne n’oserait aujourd’hui proposer le calendrier romain, s’il était nouveau.

« Dans le calendrier français on voit une division sage et régulière, fondée sur la connaissance exacte de l’année et du cours du soleil ; tandis que dans le calendrier romain on voit, sans aucun ordre, des mois de 28, 29, 30 et 31 jours, des mois qui se partagent entre des saisons différentes ; enfin le commencement de l’année y est fixé, non pas à un équinoxe ou à un solstice, mais 9 ou 10 jours après le solstice d’hiver.

« Dans ces institutions bizarres on trouve l’empreinte des superstitions et des erreurs qui ont successivement entravé ou même dirigé les réformateurs successifs du calendrier, Numa , Jules César et Grégoire XIII.

« C’est, par exemple, pour ne rien ajouter à la longueur d’un mois consacré aux manes et aux expiations, que février n’eut que 28 jours ; c’est pour d’autres raisons aussi vaines, que Numa avait fait tous les autres mois d’un nombre impair de jours.

« C’est par respect pour ces préjugés, et pour ne pas déplacer certaines fêtes, que Jules César, en corrigeant la longueur de l’année solaire, ne toucha point au mois de février, ce qui lui donnait 7 jours à répartir entre les onze autres mois ; et c’est de là qu’est venue la nécessité d’avoir plusieurs mois de 31 jours de suite, comme ceux de juillet et août, décembre et janvier.

« Enfin, c’est parce que le concile de Nicée, où l’on ignorait la vraie longueur de l’année et l’anticipation des équinoxes dans le calendrier Julien, avait établi, pour la célébration de la Pâque, une règle devenue impraticable par le laps du temps ; et c’est par l’importance que Grégoire XIII mit à assurer à jamais l’exécution du canon du concile, relatif à la fête de Pâques, qu’il entreprit sa réformation.

« Tous les embarras de ce calendrier sont venus de ce qu’il fut commencé dans un temps où, par ignorance de l’année solaire, on était forcé de se régler sur la lune, et de ce qu’ensuite, lorsqu’on eut une connaissance moins inexacte du cours du soleil, on ne voulut pas renoncer tout à fait à l’année lunaire, pour ne point déranger l’ordre des fêtes réglées primitivement sur la lune.

« Rien n’est plus simple que l’année civile, qui, depuis longtemps, est purement solaire ; rien de plus inutilement compliqué que l’année ecclésiastique, qui est luni-solaire.

« Ce n’est pas que le calendrier français soit lui-même à l’abri de tout reproche, ni qu’il ait toute la perfection désirable, perfection qu’il était si facile de lui donner, s’il eût été l’ouvrage de la raison tranquille.

« Il a deux défauts essentiels :

« Le premier et le plus grave, est la règle prescrite pour les sextiles, qu’on a fait dépendre du cours vrai et inégal du soleil, au lieu de les placer à des intervalles fixes. Il en résulte que, sans être un peu astronome, on ne peut savoir précisément le nombre de jours qu’on doit donner à chaque année, et que tous les astronomes réunis seraient, en certaines circonstances, assez embarrassés pour déterminer à quel jour telle année doit commencer, ce qui a lieu quand l’équinoxe arrive tout près de minuit.

« Il n’existe encore aucun instrument, aucun moyen assez précis pour lever le doute en ces circonstances ; la décision dépendrait de savoir à quelles tables astronomiques on donnerait la préférence, et ces tables changent perpétuellement.

« Ce défaut, peu sensible pour les contemporains, a les conséquences les plus graves pour la chronologie : il pourrait toutefois se corriger avec facilité ; il suffirait de supprimer l’art. 3 de la loi qui a réglé ce calendrier, et d’ordonner qu’à commencer de l’an XVI les sextiles se succédassent de quatre ans en quatre ans ; les années séculaires de quatre cents ans en quatre cents ans.

« Cette correction, réclamée par les géomètres et les astronomes, avait été accueillie par Romme, l’un des principaux auteurs du calendrier ; il en avait fait la matière d’un rapport et d’un projet de loi, imprimé et distribué le jour même de la mort de son auteur, et que cette raison seule a empêché d’être présenté à la Convention.


Allégorie pour floréal. Gravure de Salvatore Tresca (1750-1815)
d’après un dessin de Louis Lafitte (1770-1828)

« Mais un défaut plus important du calendrier français est dans l’époque assignée pour le commencement de l’année. On aurait dû, pour contrarier moins nos habitudes et les usages reçus, le fixer au solstice d’hiver, ou bien à l’équinoxe du printemps, c’est-à-dire, au passage du soleil par le point d’où tous les astronomes de tous les temps et de tous les pays ont compté les mouvements célestes.

« On a préféré l’équinoxe d’automne pour éterniser le souvenir d’un changement qui a inquiété toute l’Europe ; qui, loin d’avoir l’assentiment de tous les Français, a signalé nos discordes civiles ; et c’est du nouveau calendrier qu’ont daté en même temps la gloire de nos camps et les malheurs de nos cités.

« Il n’en fallait pas davantage pour faire rejeter éternellement ce calendrier par toutes les nations rivales, et même par une partie de la nation française.

« C’est la sage objection qu’on fit dans le temps, et qu’on fit en vain aux auteurs du calendrier :

Vous avez, leur disait on, l’ambition de faire adopter un jour par tous les peuples votre système des poids et mesures, et pour cela vous ménagez tous les amours-propres. Rien dans ce système ne laissera voir qu’il est l’ouvrage des Français. Vous faites choix d’un module qui appartient à toutes les nations. Eh bien ! il existe en Europe et en Amérique une mesure universelle qui ne doit pas plus appartenir à une nation qu’à une autre, et dont toutes, presque toutes du moins, sont convenues ; c’est la mesure du temps, et vous voulez la détruire ; et vous mettez à la place une ère qui a pour origine une époque particulière de votre histoire ; époque qui n’est pas jugée, et sur laquelle les siècles seuls prononceront. Les français eux-mêmes, ajoutait-on, divisés d’opinion sur l’institution que vous voulez consacrer, résisteront à l’établissement de votre calendrier. Il sera repoussé par tous les peuples qui cesseront de vous entendre, et que vous n’entendrez plus, à moins que vous n’ayez deux calendriers à la fois, ce qui est beaucoup plus incommode que de n’en avoir qu’un seul, fût-il plus mauvais encore que le calendrier nouveau.

« Cette prédiction, Messieurs, s’est accomplie ; nous avons, en effet, deux calendriers en France. Le calendrier français n’est employé que dans les actes du gouvernement, ou dans les actes civils, publics ou particuliers qui sont réglés par la loi ; dans les relations sociales, le calendrier romain est resté en usage ; dans l’ordre religieux, il est nécessairement suivi, et la double date est ainsi constamment employée.

« Si pourtant, Messieurs, ce calendrier avait la perfection qui lui manque ; si les deux vices essentiels que j’ai relevés plus haut ne s’y trouvaient pas, S. M. Impériale et Royale ne se serait pas décidée à en proposer l’abrogation.

« Elle eût attendu du temps, qui fait triompher la raison des préjugés, la vérité de la prévention, l’utilité de la routine, l’occasion de faire adopter par toute l’Europe, par tous les peuples civilisés, un meilleur système de mesure des années, comme on peut se flatter qu’elle adoptera un jour un meilleur système des mesures, des espaces et des choses.

« Mais les défauts de notre calendrier ne lui permettaient pas d’aspirer à l’honneur de devenir le calendrier européen. Ses auteurs n’ont pas profité des leçons qu’après l’histoire, les savants contemporains leur avaient données. Il faut, quand on veut travailler pour le monde et les siècles, oublier le jour que l’on compte, le lieu où l’on est, les hommes qui nous entourent ; il faut ne consulter que la sagesse, ne céder qu’à la raison, ne voir que l’avenir.

« En méconnaissant ces principes, on ne fait que montrer des institutions passagères, auxquelles l’opinion résiste, que l’habitude combat même chez les peuples pour qui elles sont faites ; et qu’au-dehors la raison repousse comme une innovation sans utilité, comme une difficulté à vaincre, sans bienfaits à recueillir.

« Le calendrier grégorien, auquel S. M. vous propose, Messieurs, de revenir, à l’avantage inappréciable d’être commun à presque tous les peuples de l’Europe. Longtemps, à la vérité, les protestants le repoussèrent ; les Anglais, en haine du culte romain, l’ont rejeté jusqu’en 1753 ; les Russes ne le reconnaissent pas encore : mais, tel qu’il est, il peut être regardé comme le calendrier commun de l’Europe ; tandis que le nôtre nous mettait pour ainsi dire en scission avec elle, et en opposition avec nous-mêmes ; puisque le calendrier grégorien était resté en concurrence avec le nouveau ; puisqu’il était constamment dans nos usages et dans nos mœurs, quand le calendrier français n’était que dans nos lois et nos actes publics.

« Dans cette position, Messieurs, S. M. a cru qu’il vous appartenait de rendre à la France, pour ses actes constitutionnels, législatifs et civils, l’usage du calendrier qu’elle n’a pas cessé d’employer en concurrence avec celui qui lui fut donné en 1793, et dont l’abrogation de la division décimale avait fait disparaître les principaux avantages.

« Quand vous aurez consacré le principe, les détails d’application seront réglés suivant les besoins du gouvernement et de l’administration. Un jour viendra, sans doute, où l’Europe calmée, rendue à la paix, à ses conceptions utiles, à ses études savantes, sentira le besoin de perfectionner les institutions sociales, de rapprocher les peuples, en leur rendant ces institutions communes ; où elle voudra marquer une ère mémorable par une manière générale et plus parfaite de mesurer le temps.

« Alors un nouveau calendrier pourra se composer pour l’Europe entière, pour l’univers politique et commerçant, des débris perfectionnés de celui auquel la France renonce en ce moment, afin de ne pas s’isoler au milieu de l’Europe ; alors les travaux de nos savants se trouveront préparés d’avance, et le bienfait d’un système commun sera encore leur ouvrage. »

Le sénateur Laplace effectue le rapport suivant au Sénat lors de la séance du 22 fructidor an XIII, au nom d’une commission spéciale nommée dans la séance du 15, pour l’examen du projet de Sénatus-consulte portant rétablissement du calendrier grégorien :

« Le projet de sénatus-consulte qui vous a été présenté dans la dernière séance, et sur lequel vous allez délibérer, a pour but de rétablir en France le calendrier grégorien, à compter du 11 nivôse prochain, 1er janvier 1806. Il ne s’agit point ici d’examiner quel est de tous les calendriers possibles, le plus naturel et le plus simple. Nous dirons seulement que ce n’est ni celui qu’on veut abandonner, ni celui qu’on propose de reprendre.

« L’orateur du gouvernement vous a développé avec beaucoup de soin leurs inconvénients et leurs avantages Le principal défaut du calendrier actuel est dans son mode d’intercalation. En fixant le commencement de l’année, au minuit qui précède à l’observatoire de Paris l’équinoxe vrai d’automne, il remplit, à la vérité, de la manière la plus rigoureuse, la condition d’attacher constamment à la même saison l’origine des années ; mais alors elles cessent d’être des périodes du temps régulières et faciles à décomposer en jours, ce qui doit répandre de la confusion sur la chronologie, déjà trop embarrassée par la multitude des ères.

« Les astronomes, pour qui ce défaut est très sensible, en ont plusieurs fois sollicité la réforme. Avant que la première année bissextile s’introduisît dans le nouveau calendrier, ils proposèrent au comité d’instruction publique de la Convention nationale d’adopter une intercalation régulière, et leur demande fut accueillie favorablement.

« À cette époque, la Convention revenue à de bons principes, et s’occupant de l’instruction et du progrès des lumières, montrait aux savants une considération et une déférence dont ils conservent le souvenir. Ils se rappelleront toujours avec une vive reconnaissance que plusieurs de ses membres, par un noble dévouement au milieu des orages de la Révolution, ont préservé d’une destruction totale les monuments des sciences et des arts. Romme, principal auteur du nouveau calendrier, convoqua plusieurs savants ; il rédigea, de concert avec eux, le projet d’une loi par laquelle on substituait un mode régulier d’intercalation, au mode précédemment établi ; mais enveloppé peu de jours après dans un évènement affreux , il périt, et son projet de loi fut abandonné.

« Il faudrait cependant y revenir, si l’on conservait le calendrier actuel qui, changé par là dans un de ses éléments les plus essentiels, offrirait toujours l’irrégularité d’une première bissextile placée dans la troisième année. La suppression des décades lui a fait éprouver un changement plus considérable. Elles donnaient la facilité de retrouver à tous les instants le quantième du mois ; mais à la fin de chaque année, les jours complémentaires troublaient l’ordre des choses, attaché aux divers jours de la décade ; ce qui nécessitait alors des mesures administratives. L’usage d’une petite période indépendante des mois et des années, telle que la semaine, obvie à cet inconvénient ; et déjà l’on a rétabli en France cette période, qui, depuis la plus haute antiquité dans laquelle se perd son origine, circule sans interruption à travers les siècles, en se mêlant aux calendriers successifs des différents peuples.

« Mais le plus grave inconvénient du nouveau calendrier, est l’embarras qu’il produit dans nos relations extérieures : en nous isolant, sous ce rapport, au milieu de l’Europe ; ce qui subsisterait toujours ; car nous ne devons pas espérer que ce calendrier soit jamais universellement admis. Son époque est uniquement relative à notre histoire ; l’instant où son année commence est placé d’une manière désavantageuse, en ce qu’il partage et répartit sur deux années, les mêmes opérations et les mêmes travaux : il a les inconvénients qu’introduirait dans la vie civile, le jour commençant à midi suivant l’usage des astronomes.

Napoléon Ier s'éveillant à l'immortalité. Détail d'une sculpture de François Rude (1842)

Napoléon Ier s’éveillant à l’immortalité. Détail d’une sculpture de François Rude (1842)

« D’ailleurs, cet instant se rapporte au seul méridien de Paris. En voyant chaque peuple compter de son principal observatoire les longitudes géographiques, peut-on croire qu’ils s’accorderont tous à rapporter au nôtre le commencement de leur année ? Il a fallu deux siècles et toute l’influence de la religion pour faire adopter généralement le calendrier grégorien. C’est dans cette universalité si désirable, si difficile à obtenir, et qu’il importe de conserver lorsqu’elle est acquise, que consiste son plus grand avantage.

« Ce calendrier est maintenant celui de presque tous les peuples d’Europe et d’Amérique ; il fut longtemps celui de la France ; présentement il règle nos fêtes religieuses, et c’est d’après lui que nous comptons tous les siècles. Sans doute il a plusieurs défauts considérables ; la longueur de ses mois est inégale et bizarre ; l’origine de l’année n’y correspond à celle d’aucune des saisons ; mais il remplit bien le principal objet d’un calendrier, en se décomposant facilement en jours, et en conservant à très peu près le commencement de l’année moyenne, à la même distance de l’équinoxe.

« Son mode d’intercalation est commode et simple. Il se réduit, comme on sait, à intercaler une bissextile tous les quatre ans ; à la supprimer à la fin de chaque siècle, pendant trois siècles consécutifs, pour la rétablir au quatrième ; et si, en suivant cette analogie, on supprime encore une bissextile tous les quatre mille ans, il sera fondé sur la vraie longueur de l’année. Mais, dans son état actuel, il faudrait quarante siècles pour éloigner seulement d’un jour l’origine de l’année moyenne de sa véritable origine. Aussi les savants Français n’ont jamais cessé d’y assujettir leurs tables astronomiques, devenues par leur extrême précision la base des éphémérides de toutes les nations éclairées.

« On pourrait craindre que le retour à l’ancien calendrier ne fût bientôt suivi du rétablissement des anciennes mesures. Mais l’orateur du gouvernement a pris soin lui-même de dissiper cette crainte. Comme lui, nous sommes persuadés que, loin de rétablir le nombre prodigieux de mesures différentes qui couvraient le sol de la France, et entravaient son commerce intérieur, le gouvernement, bien convaincu de l’utilité d’un système unique de mesures et de la perfection du système métrique, prendra les moyens les plus efficaces pour en accélérer l’usage, et pour vaincre la résistance que lui opposent encore les anciennes habitudes, qui déjà s’effacent de jour en jour.

« D’après toutes ces considérations , votre commission vous propose, à l’unanimité, l’adoption du projet de sénatus-consulte présenté par le gouvernement. »

 
 
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