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18 janvier 1803 : mort de mademoiselle Clairon

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18 janvier 1803 : mort de
mademoiselle Clairon
Publié / Mis à jour le samedi 18 janvier 2025, par LA RÉDACTION
 
 
Temps de lecture estimé : 2 mn
 

Une séance unique au théâtre, quelques coups d’œil furtivement jetés d’une fenêtre voisine sur l’appartement où mademoiselle Daugeville s’exerçait à la danse et à la partie mimique de son art, déterminèrent, dans une jeune fille de onze ans, un penchant si vif pour la scène, qu’elle s’y voua, pour ainsi dire, sous la menace d’un arrêt de mort : cette jeune fille était mademoiselle Clairon ; l’arrêt partait de la bouche d’une mère violente, ignorante et superstitieuse, qui commença même, s’il faut en croire la victime, à le mettre à exécution, mais qui s’arrêta quand elle vit que les plus terribles souffrances n’influaient en rien sur les résolutions de sa fille.

Sans doute une âme de cette trempe était appelée à jouer la tragédie. Toutefois, avant de parvenir à représenter ces héroïnes qui luttent avec une énergie extraordinaire contre les destinées ou les passions, la jeune Clairon fit un apprentissage comique et lyrique. A douze ans elle parut sur le Théâtre-Italien ; puis elle parcourut la province : lorsqu’enfin elle revint à Paris, avec un ordre de début pour la scène qu’elle devait réformer et agrandir, c’était en qualité de soubrette qu’on l’admettait à s’y montrer. Son talent devait triompher de tous les obstacles.

Mademoiselle Clairon. Estampe de Jean-François Janinet (1752-1814)
Mademoiselle Clairon. Estampe de Jean-François Janinet (1752-1814)

La débutante, qui était également obligée de se tenir prête à jouer les petits rôles dans la tragédie, demanda pour son coup d’essai le rôle de Phèdre, que mademoiselle Dumesnil possédait sans partage. Cette demande fit trembler tout le monde, excepté celle qui semblait de voir trembler le plus : le succès répondit à l’audace. Ce début, qui marqua dans les fastes dramatiques, eut lieu le 19 septembre 1743 : mademoiselle Clairon était alors âgée de vingt ans.

A ces vingt années ajoutons-en vingt-deux autres, et nous aurons toute la période glorieuse que la grande actrice remplit sur la scène française. Au bout de ce terme, le refus qu’elle fit, ainsi que tous ses camarades, de jouer dans le Siège de Calais avec un acteur nommé Dubois, auquel on reprochait une bassesse, la conduisit au Fort-l’Evesque, et l’exila du théâtre ; car elle ne voulut jamais y rentrer par une voie humiliante.

Une autre fortune l’attendait dans les états d’un prince d’Allemagne, le margrave d’Anspach : peut-être dans les intrigues de cour trouva-t-elle plus d’ennuis et plus de dangers encore que dans celles du théâtre. Après dix-sept années d’exil volontaire, mademoiselle Clairon revint dans sa patrie, où elle mourut à l’âge de quatre- vingts ans.

Garrick, qui avait présagé ses hautes destinées théâtrales, lui reprochait, dit-on, d’être trop actrice. En effet, l’excès de l’art paraît avoir été le défaut de son talent, défaut qu’elle a transmis à ses élèves. Mais les réformes qu’elle introduisit dans la diction et clans le costume, en rapprochant l’une de la nature, et l’autre de l’histoire, prouvent qu’elle était douée du véritable génie de son art.

Les Mémoires de Marmontel contiennent des détails sur cette révolution dramatique, à laquelle mademoiselle Clairon préluda dans une petite salle de province. A son retour elle eut le courage, car c’en était un, de jouer à la cour le rôle de Roxane, dans Bajazet, sans paniers et les bras nus. Après un succès brillant, Marmontel venait la féliciter : « Hé ! ne voyez-vous pas, lui dit-elle, que ce succès me ruine ? Toute ma riche garde-robe est dès ce moment réformée : j’y perds dix mille écus d’habits ; mais le sacrifice en est fait ! »

Les orages du cœur troublèrent souvent l’existence de mademoiselle Clairon ; les premières pages de ses Mémoires contiennent le récit d’une aventure merveilleuse, qui prouve qu’elle avait la faiblesse de croire aux revenants et aux esprits.

 
 
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