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12 février 1804 : mort de Kant

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12 février 1804 : mort de Kant
Publié / Mis à jour le mardi 23 mars 2010, par LA RÉDACTION
 
 
Temps de lecture estimé : 5 mn
 

Emmanuel Kant, le réformateur de la philosophie, l’émule d’Aristote, naquit en 1724, le 22 avril, d’une famille d’artisans, originaire d’Ecosse. La vie de cet homme extraordinaire s’est écoulée avec calme et uniformité, à Kœnigsberg, au milieu des frimais du nord, sans être honorée des faveurs du pouvoir, ni troublée par les rêves de l’ambition ou la soif de la gloire ; sans offrir d’autres épisodes que les événements sans couleur qui marquent l’existence monotone d’un professeur d’université. Peu avide de renommée, quoiqu’il soit parvenu à rendre son nom immortel, il se montra toujours satisfait du plaisir silencieux de la réflexion, et les jouissances qu’il trouvait en lui-même le consolèrent facilement des dédains de la cour. A un esprit fin et juste, à une puissance infinie de méditation, il joignait un savoir immense dans les langues, l’histoire, la littérature, les mathématiques et les sciences naturelles, fruit de fortes et persévérantes études : ces qualités ont fait de lui l’un des penseurs les plus profonds, les plus hardis, les plus indépendants.

Le système philosophique dont il fut créateur, et dont l’empreinte se retrouve profondément gravée dans tout ce que ses compatriotes ont fait depuis, tant en philosophie qu’en littérature, embrasse dans une même théorie les lois de l’intelligence, les principes de la morale et le sentiment du beau. Il a pour but de rétablir l’activité spontanée dans l’âme, la conscience dans la morale et l’idéal dans les arts. Sa base fondamentale est une théorie nouvelle de l’origine des connaissances humaines.

Deux systèmes sur l’entendement humain se partageaient alors l’empire de la philosophie ; l’un, bâti dans les nuages, qui appuyait l’idéalisme d’arguments purement spéculatifs ; l’autre, qui attribuait toutes nos idées à nos sensations, soit externes, soit internes, et dont un scepticisme décourageant était l’inévitable conséquence. Kant, frappé surtout de ce dernier trait, voulut savoir s’il était possible à l’esprit humain d’arriver à la certitude absolue, et le premier pas qu’il fit déroula une carrière immense devant lui. La marche qu’il suivit fut inverse de celle qu’on avait adoptée jusqu’alors, car au lieu de procéder de l’objet au sujet, ce fut en partant du sujet qu’il tenta d’arriver à l’objet.

Il commença donc par étudier l’organisation de la faculté dont nous sommes obligés de nous servir quand nous voulons pénétrer jusqu’à la nature extérieure ; c’est-à-dire par analyser l’instrument au moyen duquel l’homme pense et raisonne. Il le trouva composé de trois facultés distinctes ; la sensibilité, qui reçoit les impressions et les change en intuitions ; l’entendement, qui forme les conceptions ; et la raison, qui combine ces conceptions élaborées, pour en déduire des conclusions. Puis il reconnut que chacune de ces facultés est astreinte, dans ses procédés, à des lois ou formes virtuelles, primitivement inhérentes ou innées en elle, qui ne nous permettent pas de concevoir rien autrement que ces lois ne nous le représentent. A la sensibilité appartiennent le temps et l’espace, conditions générales auxquelles sont soumises toutes nos perceptions, moules dans lesquels il faut que les objets se façonnent avant de pouvoir entrer dans la sphère de notre faculté’ de connaître, formes impératives enfin, qui sont en nous et non dans les objets, et qui font que la géométrie et l’arithmétique sont des sciences d’une évidence complète, parce qu’elles reposent sur les notions nécessaires de notre esprit.

Les principes dévolus à l’entendement,,et sans lesquels nous ne pouvons rien comprendre, sont au nombre de douze : l’unité, la pluralité, la totalité, l’affirmation ou réalité, la négation ou privation, la limitation, la causalité ou liaison des causes et des effets, la communauté ou loi d’action et de réaction, la possibilité et l’impossibilité, l’existence et la non existence, la nécessité et la contingence. Ces formes ou notions, tout aussi inhérentes à notre conception que l’espace et le temps, n’ont de résultat que quand on les applique au jugement des objets extérieurs, de manière que s’il est bien vrai d’une part que l’expérience serait un chaos sans tes lois de l’entendement, de l’autre ces lois n’ont cependant pour objet que les éléments donnés par elle : au-delà de ces Limites la métaphysique ne peut rien nous apprendre, ou plutôt elle n’existe pas, dans le sens qu’on a coutume d’y attacher. D’où il suit que l’homme qui a su le mieux manier les armes de la métaphysique est précisément celui qui s’en est servi pour démontrer sans réplique son insuffisance : ce : qui a fait dire à une femme célèbre, que, nouveau Curtius, il s’était jeté dans le gouffre de l’abstraction pour le combler.

Quant aux formes de la raison, ce sont l’idée de l’unité absolue ou de l’être simple, celle de la totalité absolue, et celle de la réalité absolue ou de la cause première, en vertu desquelles l’homme, au lieu de s’arrêter aux causes prochaines, prolonge indéfiniment la chaîne des plus éloignées, et, toujours mécontent de ce qu’il a fait, ne croit jamais ni ses .observations ou recherches assez complètes, ni leur ensemble assez bien coordonné, ni leur application assez utile ou assez variée.

Ainsi, d’après Kant, les impressions, rencontrant d’abord la sensibilité, dont-elles revêtent les formes, deviennent pour nous des objets étendus, des corps. L’entendement les façonne et modifie ensuite en vertu de ses propres lois générales, et nous les présente comme étant liées d’après une ou plusieurs de ces lois. Enfin la raison s’en empare à son tour, et les plie encore aux formes de son activité spéciale, nous les offre comme des réalités absolues, ou comme un tout absolu, ou comme une unité absolue.

D’après cela rien de plus facile que de déduire ce que la nature extérieure doit être pour nous. Ce n’est pas, comme dans les anciens systèmes, la pensée qui se calque sur la nature, mais la nature elle-même qui revêt les formes de l’intelligence. La vérité n’est pas l’accord d’une idée avec une chose supposée représentée par elle, mais la concordance parfaite entre les phénomènes observés par nous et les lois fondamentales de nos facultés intellectuelles. Enfin l’univers est entièrement phénoménal, un tableau purement subjectif d’apparences, dont on ne peut dire s’il ressemble le moins du monde à l’univers réel, aux choses considérées en elles-mêmes, que nous n’avons aucun moyen d’apercevoir telles qu’elles sont.

Ce léger aperçu suffit pour démontrer que, comme on l’a dit avec raison, Kant ne fait pas époque pour avoir pensé que, dans nos représentations des choses extérieures, il se mêlait à l’impression reçue du dehors celle de notre mode de la recevoir : c’est pour avoir tâché de déterminer avec précision la part qui, dans toutes nos sensations, perceptions et propositions, revient à notre propre manière de sentir, de percevoir et de juger ; c’est pour avoir entrepris de déduire de quelques faits primitifs bien observes et bien analysés, le mécanisme intellectuel qui constitue l’organisation de notre faculté de connaître ; pour avoir fondé sur cette analyse une théorie du jeu des ressorts de la pensée ; pour avoir assigné à chacune de nos facultés ses bornes, ses droits, sa portée ; enfin, pour avoir fixé l’étendue et les limites de la juridiction de chacune d’elles, et surtout la valeur des titrés d’acquisitions ou de conquêtes que la raison s’est de tous temps vantée d’avoir faites dans les régions soustraites à nos sens. Personne n’a mieux connu que lui les bornes de l’esprit humain ;. mais personne non plus ne les a reculées davantage. A de si éminents travaux on ne peut comparer ni quelques aperçus vagues et indéterminés saisis par Platon, Descartes et Pascal, ni même l’importante restriction apportée par Cabanis à la philosophie empirique de Locke.

Mais pour avoir montré que les excursions de la raison spéculative hors du champ de l’expérience sont à jamais frappées de stérilité, et qu’en perdant l’appui de son guide nécessaire, cette faculté devient une arme sans trempe, avec laquelle on peut, à son gré, et avec un succès égal, défendre ou renverser les principes de la morale, et de la religion, Kant n’avait pas pour but de saper ces deux grands intérêts de l’homme et de la société. Il voulait seulement en écarter les discussions abstraites, qui alimentent sans cesse le scepticisme. Après les avoir mis ainsi à l’abri des attaques du raisonnement, il les transporta sur, an tout autre terrain,et en attribua la possession exclusive au sentiment, qui, suivant lui, n’admet pas le doute. Or, il entendait par sentiment ou conscience une faculté tout aussi inhérente, à l’homme que celle de former des idées, et par laquelle il se reconnaît d’une manière immédiate, avec parfaite certitude, pour un être libre c’est-à-dire possédant un arbitre exempt de toute nécessité, et qui le constitue personne morale ou responsable de ses actions. Cette faculté est astreinte, comme celle de l’intelligence, à des lois propres, ail nombre de deux, dont l’une nous porte à rechercher notre propre bien tandis, que l’autre nous prescrit de faire le bien et d’être vertueux sans restriction. Mais ces deux lois fondamentales de l’être moral étant sans cesse en opposition dans l’ordre de choses auquel l’homme appartient sur la terre, Kant en concluait la nécessité d’une autre vie, où elles seront pleinement satisfaites ;, et comme conséquence immédiate, celle d’un Dieu, c’est-à-dire d’un arbitre tout puissant et omniscient, pour assigner à chacun la portion de bonheur dont il se sera rendu digne. Si ces principes ne paraissent point aussi clairs que le sont ceux de sa métaphysique, du moins doit-on avouer que nul système philosophique n’en offre de plus purs ni de plus austères.

Dans un article qui ne saurait être qu’une rapide esquisse d’une des plus vastes conceptions de l’esprit spéculatif, il fallait négliger tous les détails et s’arrêter seulement aux sommités. Il était impossible de suivre Kant dans l’application qu’il fait de ses doctrines à la théorie du beau et du sublime, à celle des beaux-arts, à la théologie rationnelle, à la législation, au droit public. Le but devait être de faire connaître l’esprit général de ce système, qui peut être considéré comme une des créations les plus ingénieuses et les plus hardies de l’esprit humain.

Malheureusement Kant a totalement dédaigné l’artifice du style, et l’on a besoin d’être soutenu par le puissant attrait de tout ce qui porte le cachet du génie pour surmonter le dégoût qu’inspirent la terminologie barbare et le fatigant néologisme dont il semble avoir pris plaisir à masquer ses pensées, comme s’il eût voulu dérober aux intelligences vulgaires la jouissance de travaux si brillants et si originaux.

 
 
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