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18 décembre 820 : mort de Théodulfe d'Orléans, acteur de la « Renaissance carolingienne »

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18 décembre 820 : mort de Théodulfe
d’Orléans, acteur de la
« Renaissance carolingienne »
(D’après « Les hommes illustres de l’Orléanais » (Tome 1), paru en 1852)
Publié / Mis à jour le dimanche 18 décembre 2022, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 4 mn
 
 
 
Honorant le siècle d’Alcuin et la province où ses travaux apostoliques et littéraires lui acquirent droit de cité, le savant évêque fut dans l’Orléanais un des plus actifs coopérateurs de Charlemagne et s’attacha à l’instruction du peuple en imposant aux prêtres, rémunérés par les seuls dons, de tenir de petites écoles

Ce personnage ecclésiastique, bien que né en Espagne (vers 755), appartient à l’Orléanais par le côté le plus saillant de sa vie. Engagé d’abord dans les liens du mariage, Théodulfe (ou Théodulf, ou Théodulphe) eut une fille nommée Gisla. Charlemagne, juste appréciateur de son mérite, le fit venir en France vers l’année 780. Le noble étranger, devenu veuf, entra dans les ordres sacrés. L’évêché d’Orléans et l’illustre abbaye de Fleury (Saint-Benoît-sur-Loire) récompensèrent presque aussitôt sa nouvelle vocation. L’empereur l’honora de diverses missions en rapport avec les devoirs du ministère épiscopal : il le chargea spécialement de réfuter les erreurs naissantes de Félix, évêque d’Urgel, en Espagne, sur la divinité de Jésus-Christ.

Théodulfe était ami des lettres et les cultivait assidûment, comme l’attestent plusieurs inscriptions en vers destinées à la porte et aux différentes cases de sa bibliothèque. Jaloux de contribuer aux progrès des études, il institua les écoles de la cathédrale Sainte-Croix, des abbayes de Saint-Aignan d’Orléans, de Fleury et de Saint-Liphard, à Meung. Il rétablit le monastère de Mici-Saint-Mesmin, ruiné par les guerres, et obtint de saint Benoît d’Aniane quatre pieux cénobites qui devinrent le noyau d’une nouvelle communauté. Les arts lui durent aussi, dans le même pays, l’intéressante construction de l’église de Germigny, près de Fleury, bâtie, dit-on, sur le plan raccourci de la fameuse cathédrale d’Aix-la-Chapelle.

L’évêque d’Orléans appartenait à la célèbre école du Palais, fondée par Charlemagne. De ce foyer sortit une phalange d’hommes remarquables qui, répandus dans les églises et dans les monastères, rendirent aux lettres une vie nouvelle. Théodulfe, nous le verrons plus loin, prit part, comme théologien et comme poète, à cette louable émulation des intelligences.

Saint Théodulfe se consacre à Dieu. Détail d'un vitrail de l'église Saint-Théodulphe de Trigny (Marne)

Saint Théodulfe se consacre à Dieu. Détail d’un vitrail
de l’église Saint-Théodulphe de Trigny (Marne)

En 811, il souscrivit, avec d’autres évêques, au testament de Charlemagne, son protecteur. Louis Ier le Pieux, l’un des fils de l’empereur d’Occident, lui continua d’abord la même bienveillance et le choisit pour aller au-devant du pape Etienne IV qui se rendait à Reims. Cette députation lui valut les honneurs du pallium et le titre personnel d’archevêque. Toutefois, sa faveur ne dura pas longtemps sous le nouveau règne. Il eut l’imprudence de s’engager dans les dissensions de l’empire et de prendre parti pour Bernard, roi d’Italie, révolté contre un malheureux roi que ses fils et ses neveux abreuvaient d’amertume. Bernard, vaincu, nomma ses complices, Théodulfe entre autres. Le prélat subit, en conséquence, la déposition de ses dignités ecclésiastiques et fut exilé dans un monastère de la ville d’Angers, où il demeura quatre ans, captif et solitaire, jusqu’à sa mort, le 18 décembre 820. Il n’eut donc pas le loisir de profiter de l’amnistie générale de Thionville.

Malgré sa condamnation solennelle, le malheureux évêque protestait hautement de son innocence, comme on le voit dans plusieurs de ses poésies adressées à des confrères : par exemple, il écrivait à Aigulphe, archevêque de Bourges, des vers pleins d’énergie dont voici la traduction : « Je l’ai crié, je le crie et je le crierai toujours, tant que la vie n’aura pas abandonné mon corps ni mon âme : quiconque ne me croit pas maintenant sera bien forcé de me croire devant le trône du grand juge. »

Il est bien difficile de ne pas sentir dans ces vives paroles le cri d’une conscience sincèrement indignée, d’autant mieux que les témoignages historiques laissent encore beaucoup de doutes sur la culpabilité du personnage.

Les copistes, et après eux les imprimeurs, ont soigneusement conservé les productions de Théodulfe. La meilleure édition de ses œuvres est celle qu’a donnée le père Sirmond, en 1696 (imprimerie royale). Les ouvrages en prose sont des capitulaires adressés au clergé orléanais, des traités de théologie et quelques fragments de sermons. Les capitulaires contiennent des renseignements pleins d’intérêt sur la discipline ecclésiastique, l’administration des paroisses, les mœurs du clergé et l’état général de la société.

L’instruction du peuple fut un des objets de sa sollicitude pontificale. « Les prêtres, suivant les articles 19 et 20 du premier capitulaire, devaient tenir de petites écoles dans les campagnes, sans recevoir d’autre salaire que les offrandes bénévoles des familles. » Les études supérieures florissaient alors à Sainte-Croix, à Saint-Benoît et à Saint-Liphard. La première de ces institutions paraît avoir été le berceau de l’Université d’Orléans, qui de tout temps reconnut Théodulfe pour un de ses fondateurs.

Le style des écrits en prose est naturel, clair et sobre d’ornements : les sujets exigeaient plus de simplicité que d’élégance ; on y reconnaît cependant le cachet d’une bonne latinité. Les poésies forment la portion la plus considérable et la plus brillante des œuvres de Théodulfe : de son vivant, elles lui valurent le titre quelque peu ambitieux de Pindare carlovingien. La plupart se rapportent à des matières profanes. Le seul morceau empreint d’un caractère exclusivement religieux est l’hymne en distiques : Gloria, laus et honor. L’auteur la composa pendant sa captivité d’Angers, pour la procession extérieure du dimanche des Rameaux. La liturgie catholique en a conservé un fragment ; les douze premiers vers se chantent encore dans cette même solennité, au moment où la procession rentre à l’église.

La variété d’inscriptions et de petites pièces qui parsèment ces mélanges poétiques annonce un versificateur de circonstance et d’à-propos. Les louanges de Charlemagne vont parfois jusqu’à l’hyperbole, témoin cette exclamation :

O facies, facies, ter cocto clarior auro !
Felix qui polis est semper adesse tibi !

Ailleurs (1ère pièce du 3e livre), se déroule un tableau d’intérieur de la famille impériale, dont Théodulfe partageait l’intimité : il décrit longuement les perfections physiques et morales, voire même la toilette des princesses, les mets servis sur la table de l’auguste amphitryon, les passe-temps de cette cour plus policée qu’on ne pense, les intermèdes musicaux qui charmaient les après-dînées de Charlemagne. Les satires personnelles y jouaient aussi leur rôle, comme l’attestent plusieurs traits fort acerbes contre certains originaux, plastrons accoutumés de sa verve incisive.

Les différentes classes de la société passent tour à tour sous le fouet des censures du poète. L’ordre judiciaire, entre autres, occupe une place privilégiée dans ses préoccupations de moralité publique. Une mission officielle dans la province Narbonnaise lui avait fait voir de près les abus de cette branche d’administration publique. A son retour, il publia un poème de neuf cent cinquante-six vers, intitulé : Paraenesis ad judices (exhortation aux juges). C’est la plus longue de ses compositions, également la plus intéressante comme peinture de mœurs et comme document historique. Le détail d’une foule de petits moyens que les Narbonnais employèrent, mais en vain, pour corrompre le commissaire impérial, est surtout d’une vérité saisissante.

Théodulfe s’appliquait à la transcription fidèle et à l’illustration artistique des textes sacrés. La première pièce du second livre de ses poésies ornait le frontispice d’une bible exécutée avec magnificence. On y remarque également l’épître dédicatoire d’un psautier en lettres d’or et d’argent, que l’auteur envoyait à sa fille Gisla : tout en lui recommandant l’étude des saintes écritures, il l’avertit qu’elle se doit d’abord à sa quenouille et aux soins du ménage : Sit lanae studium, sit cura domestica semper.

L’évêque d’Orléans cultivait aussi la géographie, car il avait fait peindre dans une des salles de sa demeure un globe terrestre dont il trace la description. L’arbre encyclopédique, sujet d’une autre pièce de vers, présente la synopsie des connaissances humaines à l’époque carolingienne. La grammaire, la rhétorique, la dialectique, la musique, la géométrie et l’astronomie, y sont figurées avec leurs attributs mythologiques. Nourri de la lecture des classiques latins, Théodulfe a fait passer dans ses écrits quelques-unes de leurs beautés. Son style, malgré des taches très visibles, vaut mieux que celui de ses contemporains, et se ressent moins de la décadence générale.

En résumé, ce n’est pas une médiocre distinction d’avoir pris place dans le mouvement intellectuel dont Charlemagne fut un instant le centre et la force impulsive, d’avoir compris et secondé les vues avancées du monarque sur l’instruction publique et sur le rétablissement des bonnes études.

 
 
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