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Un tramway au XVIIe siècle

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Inventions, Découvertes
Inventions et découvertes dans les domaines des sciences et des arts. Origine des travaux de recherche ou des trouvailles fortuites.
Tramway (Un) au XVIIe siècle
(D’après « Musée universel : revue illustrée hebdomadaire », paru en 1876)
Publié / Mis à jour le mercredi 4 janvier 2023, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 3 mn
 
 
 
Existe-t-il encore quelqu’un croyant au progrès, cependant qu’il n’est, à bien y regarder, pas une seule force mécanique qui ne fût au moins pressentie par les Grecs, une seule application de physique ou de chimie qui n’ait été employée par eux ? Sans remonter de deux millénaires, on peut affirmer que le tramway existait déjà en France au XVIIe siècle, sillonnant le parc du château de Marly.

Il n’y a rien de neuf sous le soleil ; la nature se transforme, mais ce sont toujours les mêmes éléments qui reparaissent, ou, pour reprendre l’épigraphe du poète latin Horace : Multa renascentur quae jam cecidere (Bien des choses renaîtront qui sont déjà tombées). Quoi ! direz-vous, la vapeur qui date à peine d’un siècle... ? écrit le critique d’art Victor Chapier en 1876. Eh ! que croyez-vous là ? La vapeur est vieille comme le monde. Héron d’Alexandrie, mathématicien grec du Ier siècle ap. J.-C., s’amusait à faire danser des boules légères au bout d’un jet de vapeur. Ce n’était là qu’un amusement, à la vérité ; mais c’est que sans doute les anciens ne voulaient pas donner à l’eau chauffée un rôle plus noble. Par un raffinement de civilisation, ironise Champier, ils refusaient d’inventer les chemins de fer, causes permanentes d’accidents, et d’ailleurs instruments de perdition, comme le disait naguère certain curé de village.

Et non seulement la vapeur mais les aérostats étaient connus. Pends-toi, brave Montgolfier ! reprend notre critique. Ou du moins, puisqu’il est trop tard, apprends que bien avant Cyrano de Bergerac on avait vu des œufs de poules remplis de rosée s’envoler dans l’air et flotter comme des ballons. Aulu-Gelle, grammairien et compilateur latin vivant au IIe siècle, a raconté même qu’il avait admiré une colombe mécanique qui volait et s’agitait dans l’espace, grâce à un air subtil dont son corps était rempli.

Et il n’est pas jusqu’aux miracles dont l’invention ne soit antique. Les prêtres des vieilles religions en faisaient d’admirables et, à bien des égards, supérieurs à ceux qu’on voit maintenant. En Egypte les autels étaient machinés avec la dernière habileté. L’eau destinée aux libations, dans les cérémonies sacrées, se trouvait à l’intérieur dans une cavité communiquant par un tube avec la coupe placée sur l’autel ou dans la main du prêtre ; au moment de faire le miracle, la coupe étant encore vide, on apportait un feu ardent sans lequel aucune cérémonie n’était possible. Mis sur l’autel, il échauffait l’air intérieur qui, en se dilatant, pressait énergiquement la surface du liquide et le faisait monter, par le tube jusque dans la coupe. La libation avait lieu ainsi et le peuple criait au prodige.

S’étonnera-t-on, après cela, quand nous dirons que les tramways dont on sillonne en ce moment tous les boulevards parisiens — Victor Champier écrit ceci dans le dernier quart du XIXe siècle —, que les tramways dont les Anglais s’attribuent si fièrement l’invention, dont les Américains font depuis vingt ans un si grand usage, s’étonnera-t-on quand nous dirons qu’ils sont tout simplement d’origine française, qu’ils datent du XVIIe siècle, à moins toutefois qu’ils ne remontent au temps des Assyriens ou qu’un demi-dieu indien ne les ait fait connaître aux hommes il y a des milliers d’années ?

Voici le fait. Il y a quelques mois, au palais des Champs-Elysées, le maréchal de Mac-Mahon, président de la République — Patrice de Mac-Mahon, 3e président de la République, de 1873 à 1879 —, visitant les galeries de l’Exposition de l’Union centrale, s’arrêta au pied du grand escalier d’honneur et entra dans une des élégantes boutiques réservées à la librairie. Il se trouva devant les livres édités parla librairie Morel, et là se mit à feuilleter un grand in-folio, magnifiquement imprimé, rempli de beaux dessins, et qui avait pour titre : Château de Marly-le-Roi, construit en 1676, détruit en 1798, par Auguste-Alexandre Guillaumot.

Le maréchal examinait les gravures un peu nonchalamment et sans y accorder beaucoup d’attention, ainsi qu’il convient à un éminent personnage. Tout à coup il leva la tête, se retourna vers ses aides de camp : « Voyez donc, dit-il ; c’est un tramway ! » En effet, la gravure représentait une sorte de traîneau roulant sur des rails au milieu du parc de Marly, ayant pour voyageurs les dames de la cour et le roi Louis XIV en personne, qui, debout à l’arrière, semblait présider à la course.

Vue de l'entrée du Château de Marly en 1750

Vue de l’entrée du Château de Marly en 1750

On sait quelle prédilection le roi-soleil avait pour Marly et combien de prodigalités il avait faites pour construire dans ce pays le magnifique château où il aimait à donner des fêtes. Dans le parc étaient ménagés une foule de jeux destinés à faire passer agréablement le temps à ses invités. Entre autres, il y avait le jeu de la roulette, sorte de chemin de fer mis en mouvement à force de bras. C’est ce jeu qui était représenté dans le volume que feuilletait le maréchal de Mac-Mahon.

Le wagon royal, orné à l’arrière de chimères dorées, roulait sur des galets d’un très petit diamètre, et les rails, maintenus par des coussinets, se trouvaient en outre contenus par une vigoureuse charpente. Le terrain conserve encore en cet endroit la pente qui lui fut donnée pour obtenir la force d’impulsion, amortie à l’arrivée par un mouvement inverse ; l’avant-train était armé de crochets destinés à le remonter lorsque la noble compagnie l’avait quitté au milieu du trajet.

Il faut ajouter, pour bien constater le mérite de l’invention avec sa date, que des plaques tournantes permettaient de changer la direction du véhicule à angle droit. Nous n’avons encore aujourd’hui aucun tramway muni de ce précieux appareil. Et maintenant, conclut Victor Champier, si l’on me demande le nom de l’inventeur, je serai forcé de convenir que je l’ignore. Mais que fait un nom ? Il suffit de savoir que la chose existait : quod erat demonstrandum.

 
 
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