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1764 : la Gazette de France gourmandée par l’Académie des sciences au sujet d’une éclipse de soleil

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Événements marquants
Evénements ayant marqué le passé et la petite ou la grande Histoire de France. Faits marquants d’autrefois.
1764 : la Gazette de France
gourmandée par l’Académie des sciences
au sujet d’une éclipse de soleil
(D’après « Encyclopédie méthodique ou par ordre de matières.
Mathématiques. Tome premier », paru en 1784)
Publié / Mis à jour le jeudi 19 mars 2015, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 3 mn
 
 
 
En raison des effets supposés des éclipses, encore craints au XVIIIe siècle d’une grande partie de la population, la Gazette de France, dans son numéro du 19 mars 1764, invite les Français à ne pas redouter l’obscurité totale découlant de celle qui se déroulera le 1er avril suivant. Mais ces précautions inutiles en prévision d’une éclipse qui en réalité ne devait être qu’annulaire, irrite l’Académie des sciences qui exige la parution d’un avis rectificatif.

Les plus anciens auteurs nous ont conté comme autant d’événements remarquables les grandes éclipses de soleil. Il en est parlé dans Isaïe, chapitre 23 ; dans Homère Pindare ; dans Pline, livre II, chapitre 12 ; dans Denis d’Halicarnasse, livre II. Ce dernier dit qu’à la naissance de Romulus et à sa mort, il y eut des éclipses totales de soleil, dans lesquelles la terre fut dans une obscurité aussi grande qu’au milieu de la nuit. Hérodote nous apprend que dans la sixième année de la guerre entre les Lydiens et les Mèdes, il arriva, pendant la bataille, que le jour se changea en une nuit totale. Thalès, le Milésien, l’avait annoncée pour cette année-là ; Pline, livre II, chapitre 2, parle aussi de la prédiction de Thalès.

Nicolas de Lacaille (1713-1762) et Alexandre Pingré (1711-1796) donnèrent un catalogue de toutes éclipses de soleil et de lune, arrivées depuis l’ère vulgaire, dans l’Art de vérifier les dates. Du Vaucel, auteur de nombreux mémoires d’astronomie, prolongea le calcul jusqu’à l’an 2000, dans la troisième édition parue en 1783.

Clavius, qui fut témoin de l’éclipse de soleil du 21 août 1560 à Conimbre, nous dit que l’obscurité était, pour ainsi dire, plus grande, ou du moins plus sensible et plus frappante que celle de la nuit : on ne voyait pas où pouvoir mettre le pied, et les oiseaux retombaient vers la terre, par l’effroi que leur causait une si triste obscurité. A Paris, le 22 mai 1724, on vit le soleil, Mercure, Vénus, qui étaient sur le même alignement ; il parut peu d’étoiles à cause des nuages. La première petite partie du soleil qui se découvrit, lança un éclair subit et très vif, qui parut dissiper l’obscurité entière. Le baromètre ne varia point, le thermomètre baissa un peu. L’on vit autour du soleil une couronne blanche, mais pâle, dont on avait parlé dans l’Histoire de l’Académie, pour 1706.

Le roi Louis XV ayant désiré savoir s’il y aurait à Paris des éclipses totales dans l’espace de quelques années, du Vaucel fut invité à se livrer à cette recherche, et trouva que de 1769 à 1900, en 132 ans, il y aurait 59 éclipses de soleil à Paris ; aucune ne serait totale ; une seule annulaire, celle du 9 octobre 1847.

Si les éclipses totales sont des phénomènes importants pour les astronomes, jusqu’au XVIIIe siècle on ne les regarda que comme des phénomènes curieux, étonnants, capables d’inspirer la terreur. C’est ce qui causa, en 1764, la méprise de la Gazette de France, du lundi 19 mars, où l’on trouve l’article suivant, qui avait été envoyé par un curé de province :

« On craint que l’office du matin, qui doit se célébrer dans les différentes paroisses le dimanche premier avril prochain, ne soit troublé par la frayeur et la curiosité que peut exciter parmi le peuple l’éclipse annulaire du soleil ; on a cru qu’il ne serait pas inutile de rendre public l’avis suivant.

« Les curés, tant des villes que de la campagne, sont invités à commencer, plus tôt qu’à l’ordinaire, l’Office du quatrième dimanche du carême, à cause de l’éclipse totale du soleil qui, sur les dix heures du matin, ramènera les ténèbres de la nuit. Ils sont priés, en même temps, d’avertir le peuple que les éclipses n’ont sur nous aucune influence, ni morale, ni physique, qu’elles ne présagent et ne produisent ni stérilité, ni contagion, ni guerre, ni accident funeste, et que ce sont des suites nécessaires du mouvement des corps célestes, aussi naturelles que le lever ou le coucher du soleil, ou de la lune. »

Dans l’assemblée de l’Académie du 21 mars, l’on parla avec surprise de cette annonce : on ne concevait pas qu’il eût paru dans la Gazette de France, un avertissement où l’on confondait une éclipse annulaire avec une éclipse totale, et où l’on annonçait une obscurité entière, tandis que tous les almanachs avaient dû suffire pour prévenir la fausseté et l’inutilité de cette annonce, qui avait été démentie depuis longtemps, notamment par les Ephémérides de Lacaille.

Il fut décidé, dans l’Académie, que comme il restait encore dix jours avant l’éclipse du 1er avril, on ferait mettre dans la Gazette un avertissement contraire. Il parut en effet, cinq jours avant l’éclipse, dans les termes suivants : « Le sieur Cassini de Thury, de l’Académie Royale des Sciences, a présenté au Roi un Mémoire sur l’éclipse annulaire du soleil, du premier avril prochain. D’après les observations faites sur les dernières éclipses du soleil, tant annulaires que totales, il résulte que celle du premier avril ne ramènera pas les ténèbres de la nuit, comme on l’a dit dans l’avis inséré dans la Gazette du 19 de ce mois. »

Malgré cet avertissement, le bruit qui s’était répandu dans toute la France d’une éclipse totale, fit avancer l’office dans le plus grand nombre des paroisses. Même à Paris, l’impression y était formée, et l’on ne tenait nul compte du second avis publié. On avait distribué, dans la capitale, un nombre prodigieux d’exemplaires de deux cartes où l’astronome et mathématicienne Nicole-Reine Lepaute (1723-1788) avait tracé les phases de cette éclipse ; on y voyait expressément la figure du soleil débordant la lune tout autour : cela aurait bien dû suffire au public pour lui apprendre qu’il ne pouvait point y avoir d’obscurité, les plus simples éléments de l’astronomie suffisant au demeurant pour savoir qu’une éclipse ne peut être totale que sur un petit espace en largeur, la lune étant bien plus petite que la terre.

Vingt ans plus tard, on pouvait encore entendre reprocher aux astronomes qu’ils se trompaient quelquefois, puisqu’ils avoient annoncé (pour 1764) une éclipse totale qui n’avait pas eu lieu...

 
 
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