LA FRANCE PITTORESQUE
19 juin 1790 : suppression de la noblesse
héréditaire et des titres honorifiques
(D’après « Éphémérides universelles, ou Tableau religieux, politique,
littéraire, scientifique et anecdotique, etc. » (Tome 6), édition de 1834)
Publié le samedi 19 juin 2021, par Redaction
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L’Assemblée constituante, dans sa séance du 19 juin 1790, compléta l’œuvre qu’elle avait commencée dans celle du 4 août 1789, supprimant la noblesse héréditaire et toutes les qualifications qui en dérivent
 

Cette proposition, faite par un membre obscur, fut aussitôt appuyée par Charles de Lameth, de La Fayette, de Noailles, Mathieu de Montmorency, et chacun d’eux se fit gloire d’en amplifier le sens et l’étendue.

Voici un fragment du décret qui fut rendu, malgré l’opposition de l’abbé Maury et de quelques nobles : « L’Assemblée nationale décrète que la noblesse héréditaire est pour toujours abolie en France ; qu’en conséquence les titres de marquis, chevalier, écuyer, comte, vicomte, messire, prince, baron, vidame, noble, duc, et tous autres titres semblables, ne seront pris par qui que ce soit, ni donnés à personne ; qu’aucun citoyen français ne pourra prendre que le vrai nom de sa famille ; qu’il ne pourra non plus porter, ni faire porter de livrée, ni avoir d’armoiries ; que l’encens ne sera brûlé dans les temples que pour honorer la Divinité, et ne sera offert à qui que ce soit ; que les titres de monseigneur et messeigneurs ne seront donnés ni à aucun corps, ni à aucun individu, ainsi que les titres d’excellence, d’éminence, de grandeur, etc. »

Suppression de la noblesse héréditaire et des titres honorifiques

Suppression de la noblesse héréditaire et des titres honorifiques (estampe du temps)

La suppression des mots fut plus sensible à l’aristocratie que ne l’avait été celle des choses : la séance du 19 juin détermina plus que toute autre son émigration et ses attaques. Dans le nombre des propositions, Lepelletier de Saint-Fargeau avait fait celle de renoncer aux noms de terres, que plusieurs familles portaient depuis des siècles, pour reprendre les anciens noms patronymiques. Ainsi les Montmorency se seraient appelés Bouchard ; La Fayette Mothié ; Mirabeau Riquetti. Le lendemain du jour où le décret fut porté, les journalistes imprimèrent, dans le compte des séances, Riquetti l’aîné, au lieu du comte de Mirabeau. Celui-ci s’approcha, furieux, des écrivains présents à l’Assemblée, et leur dit : Avec votre Riquetti, vous avez désorienté l’Europe pendant trois jours.

« Ce mot, dit madame de Staël, encouragea chacun à reprendre le nom de son père : il eût été bien difficile de l’empêcher sans une inquisition bien contraire aux principes de l’Assemblée ». Dix-huit ans après l’abolition de l’ancienne noblesse, Bonaparte en créait une nouvelle (1er mars 1808), et, six ans plus tard, la Charte les consacrait toutes les deux, chez ce même peuple qui avait déclaré n’en plus vouloir aucune.

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