LA FRANCE PITTORESQUE
Jeter une chose à croix et à pile
()
Publié le vendredi 10 août 2018, par Redaction
Imprimer cet article
Abandonner une chose aux chances du hasard
 

Tout le monde connaît le jeu désigné par l’expression Jouer à croix et à pile (devenue ensuite Jouer à pile ou face), qui est venue de ce que les monnaies du temps de saint Louis et de quelques-uns de ses successeurs, portaient sur une face l’empreinte d’une croix, et sur l’autre celle de deux piles ou piliers.

Les uns pensent, avec l’historien italien Villani, que ces piles représentaient des bernicles, instruments de torture dont ce roi avait été menacé durant sa captivité, et dont les figures devaient rester pour rappeler un tel affront jusqu’à ce que lui ou ses barons en eussent tiré vengeance. Les autres croient qu’elles étaient des colonnes pareilles à celles que Louis le Débonnaire avait fait mettre sur ses monnaies où elles soutenaient une église surmontée d’une croix, avec cette légende : Xristiana religio.

Gros tournois : monnaie d'argent créée par saint Louis lors de sa réforme monétaire (1260)

Gros tournois : monnaie d’argent créée par saint Louis lors de sa réforme monétaire (1260)

Borel a rapporté d’autres explications que voici : « Pile vient d’un ancien mot qui signifie prince (aussi est-ce le côté où est la tête du prince qu’on nomme pile), ou bien de pileus, bonnet, parce que le piIeus étant la marque de la liberté, on l’avait mis sur certaines monnaies ; ou bien encore de pyle qui en ancien gaulois se disait pour navire (d’où dérive pilote), car en la première monnaie, qui fut celle de Janus ou Noé, était représentée le navire ou arche, et j’en ai plusieurs de telles (monnaies) tant d’argent que de bronze. » (Antiquités gauloises)

Les monnaies de plusieurs villes de la Grèce et celles de Rome offraient d’un côté la tête de Janus, et de l’autre un vaisseau, qui était quelquefois remplacé chez les Grecs par une guirlande. Ces signes avaient été choisis en raison de ce que Janus passait pour l’inventeur de l’argent monnayé, des vaisseaux et des guirlandes. Les Romains jouaient comme nous en jetant en l’air une pièce de monnaie, et ils disaient : Caput aut navis, tête ou vaisseau. Macrobe et saint Augustin parlent de ce jeu.

Les Italiens disent : Fiore o santo, fleur ou saint, parce que les monnaies de Florence et de quelques autres villes sont marquées de ces signes. L’expression des Espagnols est : castillo y léon, par allusion aux figures empreintes sur leurs pièces, dont un côté présente un château qui forme les armes du royaume de Castille, et l’autre un lion qui forme les armes du royaume de Léon. En Angleterre, on appelle king’s side, côté du roi, celui où est l’effigie du monarque, et cross side, côté de la croix, celui où se trouve ce signe du christianisme.

Copyright © LA FRANCE PITTORESQUE
Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

Imprimer cet article

LA FRANCE PITTORESQUE