LA FRANCE PITTORESQUE
Faire des cris de Mélusine
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Publié le vendredi 30 septembre 2022, par Redaction
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Hurler. Pousser des cris perçants
 

On a prétendu que Mélusine était une altération de mère Lucine, mater Lucina, déesse invoquée par les femmes en couches, et que l’expression signifiait proprement crier comme une femme qui accouche.

Cette expression a une tout autre origine : elle rappelle la fée Mélusine, dont Jean d’Arras a écrit, vers la fin du XIVe siècle, la merveilleuse histoire, que des écrivains français et allemands du XVIe siècle ont augmentée d’une infinité de détails. À les en croire, Mélusine était une fée aussi prudente qu’habile, à qui l’on doit la construction de Saintes, de La Rochelle, des châteaux de Lusignan, de Pons, d’Issoudun, et enfin tous les monuments qui subsistent encore dans le Poitou.

Raimondin découvrant le secret de Mélusine

Raimondin découvrant le secret de Mélusine

Elle avait épousé Raimondin, comte de Poitiers, sous la condition qu’il ne s’informerait jamais de ce qu’elle devenait le samedi. C’était le jour où, après s’être métamorphosée en serpent, elle allait se jeter dans une cuve pleine d’eau. L’imprudente curiosité de Raimondin fut punie par les reproches amers de Mélusine, qui disparut aussitôt du château de Lusignan, où, suivant la tradition populaire, elle est cependant revenue plusieurs fois depuis, mais seulement dans des occasions importantes, et pour annoncer par des cris effroyables de terribles calamités, principalement lorsque quelque seigneur de la maison de Lusignan ou quelqu’un des rois de France était menacé de la mort.

Brantôme nous assure que lorsque le château fut rasé par ordre de Henri III, plusieurs personnes la virent distinctement en l’air, et que les officiers de l’armée l’entendirent se lamenter comme une fauvette dont on détruit le nid et dont on dérobe les petits. On prétend qu’elle reparut, dans la suite, au milieu des décombres de l’antique manoir, pour annoncer la mort de Henri IV et de Louis XIII. Son histoire, que l’empereur Charles-Quint et la reine Catherine de Médicis voulurent apprendre sur les lieux mêmes, est connue de tous les paysans du Poitou. Au XIXe siècle encore, les mères ne cessaient d’en faire des récits aux petits enfants, qui pâlissaient d’effroi en les écoutant.

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Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

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