LA FRANCE PITTORESQUE
11 mars 1649 : traité qui
met fin à la première guerre de la
Fronde, sous la minorité de Louis XIV
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Publié le dimanche 10 mars 2013, par Redaction
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La minorité de Louis XIV fut troublée par deux guerres civiles, dont le prétexte fut la haine contre Mazarin, mais dont la véritable cause était l’ambition de quelques grands, qui voulaient élever leur puissance sur les débris de l’autorité royale.

Louis XIV ayant été obligé de quitter sa capitale, le grand Condé, le seul prince qui eût suivi la cour, fut chargé de faire le siège de Paris. De son côté, la capitale avait levé des troupes pour sa défense. Un homme, chargé par son état de veiller au maintien de la paix, était celui qui attisait le plus le feu de la discorde. Nous voulons parler de François-Paul de Retz, coadjuteur de Paris. Il leva lui-même un régiment, qu’on appela le régiment des Corinthiens, parce qu’il était archevêque titulaire de Corinthe. Pour couvrir leur révolte, les Parisiens déclarèrent qu’ils n’avaient en vue que les intérêts du roi et sa délivrance, en mettant sur leurs drapeaux cette devise : Regem nostrum quaerimus.

Le prince de Condé ayant emporté le pont de Charenton, le régiment du coadjuteur (le régiment des Corinthiens) s’avisa de faire une sortie sur les royalistes : il est battu ; et, en rentrant dans la ville, il est reçu avec des huées et des éclats de rire. On appela cet échec, la première aux Corinthiens. Tel était l’esprit de la Fronde : c’était une espèce de tragicomédie ; le sarcasme se mêlait à la fureur, et on se faisait la guerre autant à coups de langue et de plume, qu’à coups d’épée.

Les cabarets et les autres maisons de débauche étaient les tentes où l’on tenait les conseils de guerre, au milieu des plaisanteries, des chansons et de la gaieté la plus dissolue. La licence était si effrénée, qu’une nuit les principaux officiers de la Fronde ayant rencontré dans la rue le Saint Sacrement qu’on portait à un homme soupçonné d’être royaliste, reconduisirent le prêtre à coups de plat d’épée.

Après quelques nouveaux avantages remportés par le prince de Condé, des conférences s’ouvrirent le 3 mars à Rueil, entre la cour et le parlement, et autres compagnies souveraines. Pendant que le cardinal Mazarin retenait les députés pour conférer, les Frondeurs, profitant de l’absence des magistrats, prenaient le dessus dans l’assemblée des chambres, et furent à la veille de faire révoquer la députation. D’un autre côté, les troupes, bien retranchées entre la Marne et la Seine, semblaient n’attendre que les secours de l’archiduc et de l’armée de Turenne.

Ces circonstances décidèrent le ministre et les députés : ces derniers prirent sur eux l’accommodement qui fut signé à Rueil le 11 mars ; il contenait vingt-un articles, dont les principaux étaient une amnistie générale ; la nullité des arrêts du parlement, depuis le 6 janvier ; le licenciement des troupes du parlement, et l’éloignement de celles du roi ; la décharge générale de tous les deniers royaux enlevés dans les recettes ; la remise de la Bastille et de l’Arsenal entre les mains du roi. Les intérêts des généraux furent totalement oubliés ; et jamais surprise ne fut pareille à la leur, lorsqu’on leur annonça que la paix était signée : aussi ne négligèrent-ils rien pour faire partager au peuple leur mécontentement.

Lorsque les députés entrèrent par la porte Saint-Honoré, la populace voulait les déchirer, et on eut mille peines à la contenir. Ces députés, au nombre desquels était l’intrépide Molé, premier président, et le président de Mesmes, essuyèrent avec courage et sang-froid ce premier choc, et ensuite les résistances et la fureur des généraux et des Frondeurs du parlement. Molé brava tout, et on l’entendit prononcer l’arrêt avec la même fermeté que dans une audience ordinaire. Les Parisiens ne lui pouvaient pardonner d’avoir souffert que Mazarin restât à la tête des affaires du royaume ; et les membres du parlement, d’avoir laissé signer le traité à un ministre qu’ils avaient proscrit.

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