LA FRANCE PITTORESQUE
8 mars 1749 : mort de l’historien
et linguiste Nicolat Fréret
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Publié le mercredi 6 mars 2013, par Redaction
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Nicolas Fréret, né à Paris en 1688, fut reçu à l’Académie des belles-lettres en 1714, et le premier mémoire qu’il y lut roulait sur l’origine des Français. Quelques réflexions hardies de ce mémoire, jointes d’ailleurs à quelques propos indiscrets sur Ie régent, le conduisirent à la Bastille.

On raconte, qu’à son premier interrogatoire, il demanda la permission de faire à son tour une seule question : « Pourquoi suis-je ici ? » et que la réponse fut : « Vous êtes bien curieux. » On ajoute que, lorsqu’on se détermina enfin à lui rendre la liberté, un magistrat lui dit : « Laissez là la France et les Français, et les sujets modernes ; l’antiquité vous offre un si vaste champ ! »

La chronologie et la géographie doivent à Fréret des progrès considérables ; il est principalement célèbre par la première ; et quant à la seconde, il s’est trouvé parmi ses papiers treize cent cinquante-sept cartes géographiques, toutes de sa main, indiquant des erreurs à réformer ou des idées plus exactes à établir sur ce qui concerne la Gaule, l’Italie, la Grèce, les îles de l’Archipel, l’Asie mineure, l’Arménie, la Perse et l’Afrique. Par ses profondes recherches sur la chronologie, il est parvenu à concilier avec le récit de Moïse, et à réduire à la chronologie de l’Ecriture sainte, toutes ces chronologies fabuleuses des Chaldéens, des Egyptiens, des Chinois.

Il était très savant dans les langues ; et telle était son ardeur pour s’instruire, qu’il avait voulu entreprendre le voyage de la Chine, uniquement pour approfondir l’histoire de ce pays. Il s’instruisit du moins, et de cette histoire et de la langue chinoise, autant qu’il était possible, de le faire à Paris. Il mit à contribution tout le savoir d’un lettré chinois, Arcadio Hoang, que de Lionne, évêque de Rosalie, avait amené à Paris en 1712.

Aucun académicien n’a autant enrichi le recueil de l’Académie ; aucun secrétaire n’a moins avancé ce recueil : d’autant plus négligent secrétaire qu’il était académicien plus ardent, plus laborieux, plus universel ; il produisait toujours et ne publiait point les productions de ses confrères.

Indépendamment de toutes les connaissances que supposent la variété, l’abondance et la difficulté des sujets traités dans ses différents mémoires, « il savait, dit Bougainville, assez de géométrie pour devenir physicien ; il aurait pu comparer entre elles les mœurs et les lois des nations ; il était très versé dans l’histoire et dans la littérature moderne ; il connaissait tous les romans et les théâtres de presque tous les peuples, comme si ses lectures n’avaient jamais eu d’autre objet.

« Tous les ouvrages dramatiques, anciens, modernes, français, italiens, anglais, espagnols, étaient présents à sa mémoire. II faisait sur-le-champ l’analyse d’une pièce de Lopez de Vega, comme il aurait fait celle d’une tragédie de Corneille ; et l’on était surpris de s’entendre raconter les anecdotes littéraires et politiques du temps par un homme que les Grecs, les Romains, les Celtes, les Chinois, les Péruviens auraient pris pour leur compatriote et leur contemporain. »

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