LA FRANCE PITTORESQUE
24 février 1525 : François Ier
est fait prisonnier lors de
la bataille de Pavie
(D’après « Éphémérides politiques, littéraires et religieuses présentant,
pour chacun des jours de l’année un tableau
des événements, etc. » (Volume 2), édition de 1812)
Publié le mercredi 24 février 2016, par Redaction
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Dès l’année 1515, François Ier était entré dans le Milanais, ce fatal objet de l’ambition des rois de France, toujours conquis et toujours perdu. La célèbre bataille de Marignan le rendit d’abord l’arbitre de toute l’Italie ; mais ces premières prospérités furent suivies des plus tristes revers.
 

La mauvaise conduite du général Lautrec, les intrigues du pape Léon X, les secours de l’empereur Charles-Quint, le funeste combat de la Bicoque, et la retraite plus funeste encore de Rebec, où périt le chevalier Bayard, firent perdre tout le fruit de la victoire de Marignan.

François Ier, qu’une si cruelle expérience aurait dû rebuter de ses projets sur le Milanais, rentre pour son malheur en Italie (1525), et commence par assiéger Pavie. Les impériaux commandés par le connétable de Bourbon, par le marquis de Pescaire, et, par le comte de Launoy, veulent faire lever le siège, en s’ouvrant un passage par le parc de Mirabel, où François Ier était posté. La seule artillerie française met les ennemis en déroute ; le roi n’avait qu’à ne rien faire, et ils étaient vaincus ; il veut les poursuivre, et il est battu entièrement. Le roi commit la même imprudence qui, deux siècles après, fit perdre aux Français la bataille de Dettingue ; en se mettant à la poursuite des ennemis, il rendit inutile toute son artillerie, qui ne pouvait tirer sur les Impériaux sans tirer en même temps sur les Français. On lui reproche encore, outre le siège de Pavie, d’avoir affaibli son armée par deux détachements qu’il envoya vers Naples et vers Savone. « Le malheur des Français, à cette bataille, dit le duc de Parme, est une leçon pour tous les généraux, de ne jamais diviser leurs forces en présence de l’ennemi. »

François Ier est fait prisonnier lors de la bataille de Pavie

François Ier est fait prisonnier lors de la bataille de Pavie. Gravure colorisée
d’après le dessin de Wilhelm Camphausen (1818–1885)

L’amiral Bonnivet, dont les mauvais conseils avaient entraîné la perte de la bataille, s’y fit tuer de désespoir. Le célèbre Louis II de la Trémouille y perdit son fils et la vie. Le maréchal de Foix mourut de ses blessures. Le roi de Navarre, Henri d’Albret, aïeul d’Henri IV, fut fait prisonnier. Le roi après avoir fait des prodiges de valeur, blessé au visage, blessé à la main et au bras droit, ayant reçu plusieurs arquebusades dans sa cuirasse, continuait à se battre en désespéré. Pompérant, le seul officier français qui eût suivi le connétable de Bourbon, voit le roi couvert de blessures, perdant tout son sang, renversé de cheval, et résistant encore à une armée entière.

Plein de respect pour ce héros, se souvenant qu’il était né son sujet, qu’il aurait dû combattre pour lui et non contre lui, il se jette à ses genoux, le conjure de ne point s’obstiner davantage à sa perte, de céder au sort qui trahissait sa valeur, et lui propose de se rendre au connétable de Bourbon. A ce nom, François Ier frémissant de colère, proteste qu’il mourra plutôt que de se rendre à un traître. Il demande le vice-roi : Pompérant l’envoie chercher ; il accourt, et le roi lui remet son épée. Launoy la reçoit à genoux, baise la main du prince, et lui donne une autre épée.

En passant à travers le champ de bataille, les Impériaux firent observer au roi que tous ses gardes suisses s’étaient fait tuer dans leurs rangs, et qu’ils étaient couchés morts les uns près des autres. « Si toutes mes troupes, dit-il, avaient fait leur devoir comme ces braves gens, je ne serais pas votre prisonnier, mais vous seriez les miens. » Comme François avait été pris près des murs de la Chartreuse de Pavie, on le mena d’abord dans l’église de ce monastère ; les religieux étaient au chœur ; et quand ils furent à ce verset du psaume 118 : Bonum mihi quia humiliasti me, Domine, ut discam justificationes tuas, le roi les prévint, et entonna le verset à haute voix. Le soir même de cette fatale journée, il écrivit à la duchesse d’Angoulême sa mère, ces belles paroles : « Tout est perdu, fors l’honneur. »

Peu de jours après, on le conduisit à Madrid. L’illustre prisonnier se montra plus grand dans sa captivité que son vainqueur, qui le laissa traîner et languir de prison en prison, demanda une rançon exorbitante, et proposa des conditions qu’il savait que la grandeur d’âme de François Ier ne lui permettrait pas d’accepter. Enfin, Charles, que la fortune avait secondé jusqu’au point de le rendre maître d’un grand roi, d’un héros, événement qui semblait annoncer une grande révolution, ne sut en profiter, ni pour sa gloire ni pour son ambition : l’intérêt de sa gloire aurait dû le rendre plus généreux ; celui de son ambition exigeait qu’aussitôt après la bataille de Pavie, il attaquât la France avec une armée triomphante, qui aurait trouvé peu de résistance dans la consternation générale où était le royaume. Il est vrai que le roi d’Angleterre, Henri VIII, jaloux des grands succès de Charles-Quint, traita avec la duchesse d’Angoulême, mère du roi et régente de France ; il tint alors la balance entre les deux princes, et fut le gardien de la liberté de l’Europe.

Marguerite d’Alençon, sœur de François Ier, se transporta à Madrid, pour y travailler à la délivrance de son frère ; elle fut obligée de repartir sans avoir rien obtenu. Enfin, après bien des difficultés, le traité fut signé à Madrid, le 14 janvier 1526. Le roi revint en France, en donnant pour otages ses deux enfants ; mais quand le vice-roi de Naples vint demander à François Ier, de la part de Charles-Quint, la ratification du traité de Madrid, pour toute réponse on le fit assister à l’audience des députés de Bourgogne, qui déclarèrent à sa majesté qu’ils ne consentiraient jamais à la cession qu’elle avait faite de ce duché par le dernier traité.

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