LA FRANCE PITTORESQUE
Nécessité n’a pas de loi
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Publié le vendredi 16 décembre 2011, par Redaction
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Nécessité ne reconnaît pas de loi, nécessité fait loi
 

C’est un aphorisme qui vient du latin : Necessitas non habet legem. La nécessité sert d’excuse pour expliquer des fautes volontaires ; dans ce cas l’excuse est aussi coupable que la faute avouée. Le proverbe avertit les gens de bien de pourvoir aux nécessités des malheureux, pour que ceux-ci n’aillent pas du désespoir au crime.

Les Anciens avaient ce proverbe : Viro esurienti necesse est furari, ce qui veut dire : L’homme affamé est bien forcé de voler. On peut citer ainsi cette phrase de Plaute : Quidvis egestas imperat, ce qui signifie : Le besoin provoque tout crime. Saint Bernard, dans le chapitre V de son Traité sur le précepte et la dispense a dit ces paroles : Necessitas non habet legem et ob hoc excusat dispensationem, ce qui veut dire : La nécessité n’a pas de loi et c’est pour cela qu’elle excuse la dispense.

Sans se faire l’apologiste des mauvaises actions, on ne peut qu’excuser souvent des actions blâmables en elles-mêmes eu égard à l’extrême besoin ou à l’extrême péril qui a poussé à les commettre. Par exemple, on ne peut être blâmé de violer une promesse que l’on a faite sous le coup d’une pression ou d’une menace. En se plaçant de ce point de vue, on ne peut logiquement regarder comme coupable d’un vol, un malheureux qui, honnête jusque là, aurait dérobé un pain pour nourrir sa famille affamée. Quiconque manifesterait une autre opinion prouverait que sa conscience n’existe pas.

Voici pour terminer une anecdote qui vient à l’appui des idées que je viens d’émettre : « Un conseiller au parlement de Paris, M. de Sallo, se promenait à la tombée de la nuit, suivi d’un laquais. C’était en 1662. Tout à coup un homme se présente à lui et, d’une voix mal assurée, lui demande de l’argent en tenant un pistolet. Le conseiller lui donne trois pistoles et le fait suivre par son laquais. Celui-ci le voit entrer chez un boulanger et acheter un pain qu’il va porter à une femme et à doux enfants affamés logés dans une misérable mansarde. Cet homme fond en larmes en donnant le pain et fait comprendre par quelques paroles, que l’acquisition de ce pain lui a été pénible.

« M. de Sallo prend des renseignements : il apprend que cet homme est un cordonnier honorable que la misère des siens a seule poussée à celte extrémité. Il se présente inopinément dans le pauvre domicile où il est témoin d’un spectacle vraiment navrant. Le malheureux homme en le voyant est saisi de crainte et croit que celui qu’il a volé vient pour le perdre. Mais M. de Sallo le rassure et l’aide à sortir de la misère. »

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