LA FRANCE PITTORESQUE
Relicat non bene parmula
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Publié le lundi 11 juillet 2016, par Redaction
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En abandonnant peu glorieusement mon bouclier (HORACE, liv. II, ode V, v. 10)
 

Cette ode est adressée à Pompéius Varus, dont Horace salue le retour. L’épicurien fait bon marché de sa gloire militaire et il ne craint pas de dire à celui qu’il appelle son compagnon d’armes : « O le plus cher de mes amis, tu étais avec moi à Philippes, alors que je mis tant d’ardeur à fuir, abandonnant peu glorieusement mon bouclier ! »

L’enthousiasme si légitime qu’Horace a inspiré à tous ceux qui le connaissent a poussé quelques-uns de ses plus fervents admirateurs à le justifier contre lui-même. M. Vanderbourg a voulu prouver que le génie poétique n’excluait pas le courage militaire.

« Oui, sans doute, il fallait qu’un homme grand ou petit, eût montré quelque bravoure, pour obtenir de l’emploi sous Brutus ; et la manière même dont Horace parle de sa conduite, après la chute de son parti, prouve qu’il ne manquait pas de courage. Nulle part il ne le désavoue, nulle part il ne témoigne le regret de s’y être engagé. Et comment enfin s’exprime-t-il dans cet endroit même ? Dans quel moment dit-il qu’il a laissé son bouclier ? Quum fracta virtus, lorsque la valeur, la vertu même fut abattue, et minaces turpe solum tetigere mento, lorsque les guerriers, naguère menaçants, eurent mordu la poussière. On voit donc, ce que d’autres avaient déjà remarqué, qu’Horace honore ses compagnons d’armes jusque dans leur défaite ; on voit ce que les éditeurs n’avaient pas encore observé en France, qu’il ne quitta son bouclier et ne prit la fuite que lorsque le succès de la bataille fut désespéré. Il ne fit donc que ce que firent tant d’autres ; il ne fut ni plus ni moins brave qu’eux. Il raconte ici son malheur d’une manière aussi simple que naturelle, sans but particulier, sans affectation ; on peut en conclure beaucoup en faveur de sa franchise, mais rien qui le convainque de lâcheté. »

« Un instant après, on vit le tambour détacher sa caisse, qui le gênait pour courir, et l’abandonner au milieu de la cour, relicat non bene parmula, comme Horace à Philippes. » (Ch. DE BERNARD, Le Gentilhomme campagnard)

« En Sicile, la misère est plus hideuse que partout ailleurs ; les lois sont mortes ; la terre, ce grenier des vieux Romains, est d’un produit nul ; plus d’art, plus de poésie et plus d’honneur. On rit même de la lâcheté des hommes, on la consacre sans pudeur. par des ex-voto de famille. M. Palmieri a vu dans le salon d’un prince le portrait d’un fils de la famille ; cet aimable jeune homme était représenté fuyant devant l’ennemi et jetant ses armes : Relicat non bene parmula. » (Jules JANIN, Littérature dramatique)

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