LA FRANCE PITTORESQUE
Caveant consules
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Publié le samedi 16 avril 2016, par Redaction
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Que les consuls prennent garde
 

Formule par laquelle le sénat romain, dans les moments de crise sociale, investissait les consuls d’un pouvoir dictatorial. La formule était : Caveant consules ne quid detrimenti respublica capiat. « Que les consuls prennent garde que la république n’éprouve aucun dommage. »

Les deux plus solennelles conjonctures où le caveant consules ait été prononcé, c’est sous le tribunat des Gracques, au commencement des discordes civiles, et sous le consulat de Cicéron, après la conjuration de Catalina. En vertu de la doucereuse formule du sénatus-consulte, Catalina et les Gracques furent mis purement et simplement hors la loi, sans que la responsabilité des consuls courût aucun risque.

L’origine du caveant consules n’a point de date dans l’histoire romaine ; il est né de la force des choses, du principe supérieur aux lois positives sur lequel repose tout État : Salus populi suprema lex esto. (Que le salut public soit la loi suprême)

La formule du sénat-consulte romain a son analogue dans cette lugubre exclamation qui se faisait entendre quelquefois à la tribune de la Convention : Citoyens, la patrie est en danger !

Maintenant, le terrible caveant consules ! appliqué plaisamment à des riens est devenu une location proverbiale. Caveant consules ! c’est-à-dire prenez garde, veillez au grain, il y a péril en la demeure, à propos d’une bagatelle. C’est le contraste d’un mot de formidable mémoire appliqué à une chose frivole, qui en fait le piquant.

« Nous avions dénoncé les Rebelles (roman du vicomte d’Arlincourt) à M. le procureur du roi ; mais si ce magistrat veut les saisir, il sera forcé d’instrumenter contre la troisième édition, car les deux premières sont déjà épuisées. On voit qu’il y a urgence : Caveant consules ! » (Revue de Paris)

« Quoi ! des associations de charité, des prières, le patronage d’un saint ! Caveant consules ! Cela rappelle l’Église et les moines. » (L. VEUILLOT)

« Caveant consules ! Que l’Europe avise, non l’Europe catholique, anglicane, protestante ou grecque, mais l’Europe laïque, le pouvoir civil, seul dépositaire désormais des grandes vérités éternelles. Que ce pouvoir agisse au nom de Dieu, père de tous les hommes, sans aucune intervention des sectes religieuses. » (L. JOURDAN)

« Adieu, mon cher maître, priez Dieu ne quid respublica detrimenti capiat, et ne négligez pas au moins d’écrire sur cet objet à tous les académiciens que vous en croirez dignes. » (D’ALEMBERT à VOLTAIRE)

« Au capitole de Toulouse, les archives de la ville étaient gardées dans une armoire de fer, comme celles des flamines romains ; et le sénat gascon avait écrit sur les murs de sa curie : Caveant consules ne quid respublica detrimenti capiat. » (MICHELET)

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