LA FRANCE PITTORESQUE
XIVe siècle (Habitudes vestimentaires
et ameublement au)
(D’après « Le Bon répertoire », paru en 1930)
Publié le dimanche 27 septembre 2015, par Redaction
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Jetons un rapide coup d’oeil à l’intérieur d’une demeure aisée au XIVe siècle, à cette époque de transition où déjà l’on trouve en germe les splendeurs de la Renaissance. Depuis la fin du siècle précédent, les moeurs étant devenues plus raffinées, les seigneurs n’admettaient plus la vie en commun avec leurs serviteurs, différence notable qui, forcément, influa sur la manière de vivre. Quant aux vêtements, d’amples ils se firent étriqués, et le luxe des fourrures s’imposa en dépit des règlements les prohibant.
 

Au lieu de la salle servant, aux âges précédents, à tous usages, on fit des appartements de réception séparés des chambres à coucher et on y ajouta des cabinets ou retraits dans lesquels les femmes avaient leurs rouets et se livraient aux ouvrages des mains propres à leur sexe ; les hommes, eux, y avaient leurs entretiens particuliers avec leurs amis ou simplement s’y retiraient pour jouir de quelques instants de solitude.

Sur le pavage en carreaux vernissés, en briques émaillées, combinés en dessins répétés, on étendait de riches tapis, des fourrures, des nattes. Une grande quantité de sièges, les uns à endroits fixes, couverts de dais, les autres mobiles, de toutes dimensions et de toutes formes, sculptés, peints, incrustés, dorés, sortis des mains d’artisans dont le travail se perfectionnait chaque jour. Pour parer au froid des carrelages, on posait devant les bancs et les chaises des marchepieds et des coussins, ces derniers en très grand nombre, du reste, dans les intérieurs de cette époque.

Dans la salle principale, toujours une cheminée énorme, placée entre les deux fenêtres. Celles-ci étaient garnies de pièces de verre soutenues par des tiges de plomb. Souvent on y voyait des vitraux. S’il en était ainsi, on mettait le sujet principal à la partie inférieure de la fenêtre et on l’accompagnait d’écussons, d’emblèmes, d’anges, etc. Le solivage apparent est la caractéristique de tous les plafonds de cette période de notre histoire ; il était souvent décoré avec de l’étain doré.

Sur les murs, des ornements, des sujets peints, des tapisseries ou, plus simplement, des étoffes tendues. Ces tapisseries ou ces étoffes contribuaient à l’ornementation de la pièce, mais servaient aussi à un autre emploi. Elles masquaient les portes. Ces dernières, simples baies peu hautes et peu larges, étaient franchies en écartant ces tapisseries ou ces étoffes qui, en raison de cet usage, étaient assez fréquemment fendues.

Si l’habitation aux différentes époques du Moyen Age se transforma d’une manière notable, le vêtement évolua lui aussi et arriva même à subir un changement complet. Les longues tuniques, si seyantes et si nobles d’allure, furent remplacées au XIVee siècle par un costume étriqué qui transforma complètement la silhouette.

Ce costume se composait d’une étroite et courte camisole (très ajustée et fortement rembourrée en bosse à l’estomac) connue sous le nom de jaquet ou jaquette, du pourpoint servant d’habit de dessous, des chausses découvertes presque entièrement, avec des pieds doublés de chaussons et garnis de semelles, qui dispensaient de mettre des souliers, du moins par beau temps, et avaient un dard interminable fait en baleines. Un petit chapeau de forme conique complétait le costume. Les élégants l’ornaient de joyaux ou d’une plume d’autruche que l’on payait alors au poids de l’or. Avec l’habit court on portait souvent un manteau fendu sur le côté, tailladé en bas, appelé cloche.

Sous Charles V le goût s’épura, il y eut un peu moins de bizarrerie dans la façon de s’habiller, mais le luxe des fourrures prit des proportions inouïes malgré les lois qui interdisaient à la bourgeoisie l’usage du vair, du gris et de l’hermine. A la mort de ce roi, le port de la houppelande devint à peu près général. La houppelande était une robe qui s’endossait à la façon d’un pardessus moderne.

Il y en avait de longues, d’autres venant à mi-cuisses ou aux genoux, certaines très courtes, spéciales pour le cheval. Les longues houppelandes étaient réservées à la haute noblesse. Les pages et varlets ne devaient pas en porter dépassant le dessus du genou. Elles convenaient plus spécialement aux personnes d’un âge mûr. Les jeunes gens ne s’en revêtaient que dans les solennités.

Costume de juge au XIVe siècle

Costume de juge au XIVe siècle

Sous Charles VII des nouveautés : la housse, ample dalmatique qui couvrait le corps par devant et par derrière et se refermait au cou après le passage de la tête, avec des fentes latérales pour l’usage des bras ; les mahoîtres, ou fausses épaules, figurées à l’aide d’une carcasse et d’un rembourrement. Par-dessus les mahoîtres, on mettait une sorte de veste ajustée dont les manches épousaient, naturellement, leur forme. Ces vestes avaient aussi de longues manches déchiquetées, dites manches à la bombarde, qui flottaient jusqu’à terre ; elles coûtaient plus cher que les autres, d’où le proverbe venu jusqu’à nous : C’est une autre paire de manches.

Pour être un « dandy » en ce temps-là, il fallait avoir la taille excessivement fine, les hanches à peine visibles et les épaules démesurément larges. Mais le costume d’apparat, celui porté par les gens affichant la gravité, par exemple les hommes de loi et les hommes de plume, conserva l’ampleur des robes et des manteaux. Donc gens de robe courte et gens de robe longue, suivant la dénomination employée, se coudoyaient chaque jour à cette époque si extraordinaire de l’histoire du costume.

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