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16 juin 1637 : commission nommée par l'Académie française pour l'examen du Cid, tragédie de Pierre Corneille

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16 juin 1637 : commission nommée
par l’Académie française pour l’examen
du Cid, tragédie de Pierre Corneille
Publié / Mis à jour le samedi 15 juin 2013, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 3 mn
 

Le Cid fut le premier chef-d’œuvre, et annonça le premier grand poète, dont la scène française pût s’enorgueillir. Son apparition, dont on ignore le jour, date de l’année 1636 : tous les monuments de notre histoire littéraire en attestent l’immense succès. Représenté trois fois au Louvre, deux fois à l’hôtel Richelieu, la cour ne l’accueillit pas avec moins d’enthousiasme que la ville.

L’auteur reçut les félicitations du roi et de la reine : des lettres de noblesse furent accordées à son père, distinction justifiée par les services personnels de ce dernier, mais à laquelle la gloire du fils n’était pas étrangère. On traduisit la pièce en allemand, en anglais, en flamand, en italien, et même en espagnol. Enfin, Pélisson nous apprend que, dans plusieurs provinces, il était passé en proverbe de dire : Cela est beau comme le Cid !

Qu’on se représente l’étonnement, la colère de ce peuple d’auteurs, dont tous se croyaient les rivaux, quelques-uns les maîtres de Corneille ! Qu’on se représente surtout le dépit secret de ce cardinal, poète lui-même, et dont l’ambition tendait à dominer la littérature, comme il dominait la politique ! « Lorsque le Cid parut, dit Fontenelle, il en fut aussi alarmé que s’il avait vu les Espagnols devant Paris. Il souleva les auteurs contre cet ouvrage, ce qui ne dut pas être fort difficile, et se mit à leur tête. M. de Scudéry publia ses observations sur le Cid, adressées à l’Académie française, qu’il en fit juge, et que le cardinal, son fondateur, sollicitait puissamment contre la pièce accusée ; mais afin que l’Académie pût juger, ses statuts voulaient que l’autre partie, c’est-à-dire M. Corneille, y consentît. On tira de lui une espèce de consentement, qu’il ne donna qu’à la crainte de déplaire au cardinal, et qu’il donna pourtant avec assez de fierté. »

Ce consentement obtenu, l’Académie, qui n’avait montré aucun empressement à se porter arbitre dans la querelle, nomma trois commissaires, Bourzeys, Chapelain et Desmarets, pour examiner le corps de l’ouvrage ; quant au style, il fut convenu qu’il serait jugé par la compagnie réunie. Dans son Histoire de la vie et des ouvrage de Pierre Corneille, Jules Taschereau écrit : « Plusieurs projets de travail furent successivement soumis au cardinal, qui trouva tour à tour qu’il fallait y ajouter, puis en retrancher quelques poignées de fleurs. Cérisy s’était, après plusieurs changements dans la commission, trouvé chargé de la rédaction : elle n’eut pas encore le bonheur de plaire à Richelieu : ce ne fut qu’après deux nouveaux projets, et sur un travail entièrement refondu par Chapelain, que l’on obtint enfin l’approbation de Richelieu.

« Elle n’était point irréfléchie, car de nombreuses annotations marginales sur le premier manuscrit, qui lui fut soumis, témoignaient du scrupule avec lequel il l’avait lu. On remarquait surtout qu’en marge du passage qui est demeuré, où il est dit que les contestations littéraires, telles que celles dont le Pastor fido et la Jérusalem ont été l’occasion, n’ont pas peu servi à perfectionner la langue et le goût, il avait écrit : L’applaudissement et le blâme du Cid n’est qu’entre les doctes et les ignorants, au lieu que les contestations sur les autres deux pièces ont été entre les gens d’esprit. Cette apostille prouve quelles dispositions il apportait dans cet examen, et nous porte à croire que s’il exigea tant de révisions du jugement commandé, ce ne fut jamais parce qu’il crut devoir y reprendre trop de sévérité. Enfin, après cinq mois d’élaboration, pendant lesquels ce ministre, qui dirigeait la France et dominait l’Europe, sembla n’avoir aucune autre affaire qui l’occupât, les Sentiments de l’Académie française furent livrés à l’impression. »

Ces Sentiments, dont Scudéry témoigna plus de joie qu’il ne devait en ressentir, et dont Corneille ne parut pas plus satisfait qu’il ne devait l’être, portent l’empreinte du temps. Souvent l’Académie attaque et défend ce qu’il ne fallait ni attaquer, ni défendre. En condamnant le sujet du Cid comme n’étant pas bon, elle ne fit preuve ni de goût, ni de justesse ; mais elle fit preuve d’indépendance en consignant à la fin de son travail la déclaration suivante : « La véhémence des passions, la force et la délicatesse des pensées, et cet agrément inexplicable qui se mêle à tous les défauts du Cid, lui ont acquis un rang considérable entre les poèmes français de ce genre. Si son auteur ne doit pas toute sa réputation à son mérite, il ne la doit pas toute à son bonheur ; et la nature lui a été assez libérale pour excuser la fortune, si elle lui a été prodigue. »

Ce qu’il y eut de plus remarquable dans un débat né à propos d’une pièce qu’on peut considérer comme l’apologie du duel, débat qui blessa tant d’amours propres, souleva tant de haines, et où de part et d’autre on ne ménagea pas les injures, c’est qu’il n’y eut pas une épée tirée. Corneille s’était contenté de répondre aux bravades de Scudéry : Je ne suis point homme d’éclaircissement ; vous êtes en sûreté de ce côté-là. Et cette réponse, au moins étrange pour l’homme et pour l’époque, ne manqua pas d’être relevée comme un signe de lâcheté.

« Certes, dit Mairet dans une des nombreuses brochures qui parurent alors, il est bien difficile qu’il pût rendre ses acteurs plus vaillants, puisque lui-même n’a pas sitôt la permission de prendre une épée, qu’il se déclare, par lettre, indigne de la porter, et qu’à peine a-t-il reçu celles de noblesse, qu’il fait une action assez infâme pour l’en dégrader. » Claveret dit encore à Corneille que ses lettres de noblesse étaient assez fraîches pour qu’il prît garde de les effacer. Néanmoins le flegme du poète ne se démentit pas. Il y a plus : après la publication des Sentiments de l’Académie, il forma le projet d’y répondre : mais les libéralités de Richelieu lui en firent passer l’envie ; car, par une bizarrerie que Fontenelle a signalée, le cardinal récompensait, comme ministre, ce même mérite dont il était jaloux, comme poète.

 
 
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