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15 mai 1698 : mort de l’actrice Marie Desmares, dite la Champmeslé

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15 mai 1698 : mort de l’actrice
Marie Desmares, dite la Champmeslé
(D’après « Éphémérides universelles, ou Tableau religieux, politique,
littéraire, scientifique et anecdotique, présentant, pour chaque jour
de l’année, un extrait des annales de toutes les nations
et de tous les règnes, depuis les temps historiques
jusqu’à nos jours » (Tome 5) édition de 1834)
Publié / Mis à jour le lundi 15 mai 2023, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 3 mn
 

Petite-fille d’un président au parlement de Normandie, qui déshérita son fils pour le punir de s’être marié sans son consentement, elle naquit à Rouen le 18 février 1642, et fut forcée par la misère de son père, marchand dans cette ville, de chercher une ressource au théâtre. Fort jeune encore, elle épousa le 9 janvier 1666 l’acteur Charles Chevillet, sieur de Champmeslé, débutant l’année précédente dans la troupe à laquelle elle appartenait. Tous deux, après avoir couru la province, vinrent à Paris, et le talent du mari fit recevoir au Théâtre du Marais la femme, qui devait bientôt prendre sa revanche.

Formée par les conseils d’un vieux comédien, qui devina ses heureuses dispositions, la Champmeslé, en moins de six mois, se mit en état de débuter à l’Hôtel de Bourgogne en 1670 ; elle y parut dans le rôle d’Hermione de la pièce Andromaque de Racine ; et l’actrice Mme Des Œillets (Alix Faviot dite Des Œillets) qui tenait alors ce rôle mais était alors malade, après avoir assisté à ce début couronné d’un plein succès, s’écria elle-même : « Il n’y a plus de Des Œillets. » Racine avait d’abord refusé d’être témoin de ce coup d’essai, tant sa susceptibilité poétique lui faisait craindre une mutilation de ses vers. Entraîné par les instances de ses amis, il éprouva une surprise bien vive pour un auteur, et courut à la loge de la débutante lui faire, à genoux, dit la chronique, des compliments pour elle et des remerciements pour lui.

Marie Champmeslé

Marie Champmeslé

Ce n’est pas sans motif que nous avons mentionné l’attitude du poète. Elle était une sorte de présage ou d’anticipation. Racine fut pendant plusieurs années l’amant en titre de la Champmeslé, dont ses chefs-d’œuvre faisaient valoir le talent. Il ne régnait pas néanmoins sans partage dans le cœur de l’actrice comme sur la scène ; il n’ignorait même pas les nombreuses infidélités de son idole, et s’en vengea par une épigramme que Boileau a rimée ; c’est celle qui, dans les œuvres du satirique, commence par ces vers :

De six amants contents et non jaloux
Qui tour à tour servaient madame Claude, etc.

En même temps qu’il lançait des sarcasmes contre une maîtresse infidèle, il composait d’admirables rôles pour la fidèle interprète de son génie. Bérénice, Atalide, Monime, Iphigénie et Phèdre furent comme autant de tributs d’une passion mal récompensée. Mais si l’amant était trahi, l’auteur ne le fut jamais. La tradition a conservé le souvenir de l’effet extraordinaire produit par la Champmeslé dans ce vers si simple du rôle de Monime : « ...Seigneur, vous changez de visage. »

Le succès de larmes qu’elle obtenait dans Iphigénie est consacré par ces vers de Boileau qui commencent l’Epître à Racine :

Jamais Iphigénie, en Aulide immolée,
N’a coûté tant de pleurs à la Grèce assemblée,
Que, dans l’heureux spectacle à nos yeux étalé,
N’en a fait, sous son nom, verser la Champmeslé.

Peut-être ne devons-nous la sublime création de Phèdre qu’à l’influence de l’actrice sur Racine ; elle le pressait depuis longtemps de lui donner un rôle où toutes les passions fussent exprimées. Il chercha longtemps, et s’arrêta enfin à l’héroïne qui avait inspiré déjà Euripide et Sénèque. Ce rôle porta au plus haut point la réputation de la Champmeslé. Ce fut pourtant à cette époque qu’elle sacrifia ouvertement Racine au comte de Clermont-Tonnerre, infidélité dont le scandale donna lieu à un méchant bon mot, indigne de trouver place ici. On compte le dépit de Racine parmi les motifs qui l’éloignèrent du théâtre. Si cette conjecture était prouvée, la mémoire de la Champmeslé serait dévouée aux anathèmes de la postérité.

En 1679, le mari et la femme passèrent au théâtre de la rue Guénégaud, où, par un contrat particulier, indépendamment de leur part, la troupe leur accorda une pension de mille livres par an. Telle est l’origine de ces subventions, devenues aujourd’hui si funestes à l’art. La Champmeslé resta la première actrice de ce théâtre jusqu’au commencement de 1698, époque où sa santé commença à s’altérer. Pour la rétablir, elle se retira dans une maison qu’elle avait à Auteuil ; mais sa maladie s’aggrava et devint mortelle. Quoiqu’elle craignît beaucoup la mort, le curé de Saint-Sulpice et celui d’Auteuil assiégèrent ses derniers moments, et lui arrachèrent, en l’effrayant, une renonciation à l’état qui avait fait sa gloire.

Elle n’était pas, disent les contemporains, douée d’un esprit supérieur ; mais un grand usage du monde, beaucoup de douceur dans la conversation, et une aimable naïveté de langage lui tenaient lieu d’une plus haute portée dans les idées. Sa maison était le rendez-vous de tous les hommes célèbres de la cour et de la ville, dans toutes les carrières et dans tous les rangs. La Fontaine lui a dédié le conte de Belphégor, par des vers qui complètent son éloge. Elle était d’une taille avantageuse, bien prise et fort noble.

Quoique sa peau ne fût pas blanche, qu’elle eût les yeux extrêmement petits et ronds, l’ensemble de ses traits plaisait généralement, car ses défauts étaient effacés par les grâces naturelles répandues sur toute sa personne ; le son gracieux et touchant de sa voix trouvait le chemin de tous les cœurs. On peut juger et de l’étendue de cette voix, et du caractère qu’avait alors la déclamation tragique, espèce de chant pompeux et monotone, par un mot qui semblait alors un éloge, et qui serait aujourd’hui une critique : on disait que si, pendant qu’elle débitait une tirade, on avait ouvert la loge du fond de la salle, elle aurait été entendue dans le café Procope.

On sait que le fils de madame de Sévigné fut un des amants de cette actrice célèbre. « Ma belle-fille, dit madame de Sévigné, (...) est laide de près, et je ne m’étonne pas que mon fils ait été suffoqué par sa présence ; mais quand elle dit des vers, elle est adorable. »

 
 
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