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15 avril 1719 : mort de madame de Maintenon

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Éphéméride, événements
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15 avril 1719 : mort de madame de Maintenon
(D’après « Éphémérides politiques, littéraires et religieuses présentant,
pour chacun des jours de l’année un tableau
des événements, etc. » (Volume 4), édition de 1812)
Publié / Mis à jour le samedi 15 avril 2023, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 6 mn
 
 
 
Fondatrice de la Maison royale de Saint-Louis, nommée gouvernante des enfants naturels de Louis XIV, elle devint secrètement l’épouse du Roi-Soleil après la mort de la reine Marie-Thérèse en 1683, et exerça alors sur le monarque une notable influence

Françoise d’Aubigné, marquise de Maintenon, était petite-fille du célèbre Théodore-Agrippa d’Aubigné, gentilhomme ordinaire de la chambre de Henri IV. Son père, Constant d’Aubigné, fut mis en prison à Bordeaux, pour quelques intelligences avec les Anglais. Délivré de sa prison par la fille du gouverneur, il épousa sa bienfaitrice, et la mena à la Caroline. De retour en France avec elle, au bout de quelques années, tous deux furent enfermés à Niort en Poitou, par ordre de la cour : ce fut dans cette prison de Niort que naquit, en 1635, Françoise d’Aubigné, destinée à éprouver toutes les rigueurs et toutes les faveurs de la fortune.

Menée à l’âge de trois ans en Amérique, abandonnée par un domestique sur le rivage, elle pensa y être dévorée par un serpent. Dans son retour d’Amérique en France, on la crut morte d’une maladie qui régnait dans le vaisseau, et on allait la jeter à la mer, lorsqu’elle donna un signe de vie. Ramenée orpheline en France, à l’âge de douze ans, élevée comme par charité, chez madame de Neuillant, sa parente, elle fut trop heureuse d’épouser, en 1651, Paul Scarron, qui logeait auprès d’elle, rue d’Enfer.

Françoise d'Aubigné. Peinture de Pierre Mignard (1670)
Françoise d’Aubigné. Peinture de Pierre Mignard (1670)

Scarron était à la vérité d’une ancienne famille du parlement, illustrée par de grandes alliances ; mais le burlesque dont il faisait profession, l’avilissait en le faisant aimer. Ce fut pourtant une fortune pour mademoiselle d’Aubigné, d‘épouser cet homme disgracié de la nature, impotent, et qui n’avait qu’un bien très médiocre. L’enjouement et les saillies de Scarron, attiraient chez lui une compagnie nombreuse et très distinguée. Sa nouvelle épouse se fit universellement aimer et estimer par sa beauté, par son esprit, par sa modestie et sa vertu ; et cette vertu n’était pas affectée, quoi qu’en aient dit dans la suite ses ennemis, et cette espèce de gens .qui est intéressée à ne pas croire à la vertu. « Je ne suis pas étonnée, écrivait madame de Maintenon en 1709, qu’on soupçonne ma jeunesse : ceux qui parlent ainsi, en ont eu une très déréglée, ou ne m’ont pas connue. Il est fâcheux d’avoir à vivre avec d’autres gens que ceux de son siècle ; et voilà le malheur de vivre longtemps. »

Après la mort de son mari, arrivée en 1660, elle fit solliciter longtemps et inutilement auprès de Louis XlV, une petite pension dont Scarron avait joui. Ce refus l’obligea d’accepter l’éducation des enfants d’une princesse de Portugal ; elle allait partir pour ce royaume, lorsqu’ayant été saluer la marquise de Montespan, dont elle était avantageusement connue, la marquise la détourna de ce voyage, se chargea de son placet, obtint la pension, et présenta elle-même au roi madame Scarron, qui devait un jour la supplanter.

Le duc du Maine, que Louis XIV avait eu de madame de Montespan, était né avec un pied difforme ; le premier médecin, d’Aquin, qui était dans la confidence, jugea qu’il fallait envoyer l’enfant aux eaux de Barège ; on chercha une personne de confiance qui pût se charger de ce dépôt ; le roi se souvint de madame Scarron ; le ministre Louvois alla secrètement à Paris lui proposer ce voyage ; elle eut soin depuis ce temps-là de l’éducation du duc du Maine ; nommée à cet emploi par le roi, et non par madame de Montespan, comme on l’a, elle écrivit directement au roi ; ses lettres plurent beaucoup : voilà l’origine de sa fortune ; son mérite fit tout le reste.

Louis XIV, dans les commencements, était prévenu contre elle ; il la trouvait pédante et bel-esprit : « Votre bel-esprit, disait-il à madame de Montespan, vous rendra pédante comme elle. » Mais en la connaissant mieux, ce qui lui avait paru de la pédanterie ne lui parut plus qu’une raison aimable ; il fut surtout frappé vivement d’un mot que lui dit un jour le petit duc du Maine : « Vous êtes bien raisonnable, lui disait un jour le roi. — Comment ne le sereais-je pas, reprit l’enfant, j’ai une gouvernante qui est la raison même. — Allez, reprit le roi, allez lui dire que vous lui donnez cent mille francs pour vos dragées. » Ce fut de cette libéralités du roi qu’elle acheta la terre de Maintenon, dont elle prit le nom, et qui, dans les premiers jours de sa faveur, la fit appeler par les envieux, madame de Maintenant.

Louis XIV, qui n’avait d’abord pu s‘accoutumer à elle, passa de l’aversion à la confiance, et de la confiance à un sentiment plus tendre. Il trouvait dans sa conversation une douceur qu’il ne goûtait plus auprès de son ancienne maîtresse. Lasse de madame de Montespan et de ses murmures, il commençait d’ailleurs à se reprocher son attachement pour une femme mariée, et sentait surtout ce scrupule depuis qu’il ne sentait plus d’amour.

Dans le moment où madame de Montespan touchait à sa chute, madame de Maintenon se vit écartée par une rivale plus dangereuse. La jeunesse, la beauté de mademoiselle de Fontanges, un fils qu’elle donna au roi en 1680, le titre de duchesse dont elle fut décorée, tout annonçait la favorite destinée à s’emparer des dernières années de Louis XIV ; mais la duchesse de Fontanges et son fils moururent en 1681, et rien ne s’opposa dès lors à l’élévation de madame de Maintenon ; mais elle voulut que sa grandeur fût établie sur un fondement respectable et solide, et elle sut inspirer tout à la fois à Louis XIV tant de tendresse et de scrupule, que le roi l’épousa secrètement, au mois de janvier 1686.

Louis XIV était alors dans sa quarante-huitième année, et la personne qu’il épousait, dans sa cinquante-deuxième. Ce prince, comblé de gloire, voulait mêler aux fatigues du gouvernement les douceurs innocentes d’une vie privée : ce mariage ne l’engageait à rien d’indigne de son rang ; il fut toujours problématique à la cour si madame de Maintenon était mariée : on respectait en elle le choix du roi sans la traiter en reine.

Son élévation ne fut pour elle qu’une retraite. Renfermée dans son appartement, qui était de plain-pied à celui du roi, elle se bornait à une société de deux ou trois dames retirées comme elle, encore les voyait-elle rarement. Le roi venait tous les jours chez elle après son dîner, avant et après le souper, et y demeurait jusqu’à minuit ; il y travaillait avec ses ministres, pendant que madame de Maintenon s‘occupait à la lecture ou à quelque ouvrage des mains ; ne s’empressant jamais de parler d’affaires d’Etat, paraissant souvent les ignorer, rejetant bien loin tout ce qui avait la plus légère apparence de cabale et d’intrigue, beaucoup plus occupée de complaire à celui qui gouvernait que de gouverner, et ménageant son crédit en ne l’employant qu’avec une circonspection extrême.

Madame de Maintenon oubliait tout quand elle craignait de choquer les sentiments de Louis XIV. Elle avait beaucoup d’amitié pour Racine ; mais cette amitié ne fut pas assez courageuse pour le soutenir contre un léger ressentiment du roi. Du même fonds de caractère dont elle était incapable de rendre service, elle l’était aussi de nuire. Elle n’ignorait pas que le ministre Louvois s’était jeté aux pieds de Louis XlV, pour l’empêcher d’épouser la veuve Scarron, et non seulement elle pardonna à ce ministre, mais elle apaisa le roi dans les mouvements de colère que l’humeur de Louvois inspirait quelquefois à son maître.

Louis, dans le cours de ses prospérités, et sous l’empire de Madame de Montespan, n’avait paru rempli que du sentiment de sa grandeur et de sa puissance. Dans les disgrâces de la guerre de 1701, le roi paraît enfin sensible aux malheurs de sa nation ; il faut faire honneur de ces nouveaux sentiments de Louis XIV, à cette femme qu’on a tant accusée de lui avoir fait sacrifier les devoirs de la royauté aux devoirs de la religion ; en l’arrachant au tumulte des camps, à la dissipation des fêtes, en l’éloignant des plaisirs, en l’accoutumant à la retraite et au recueillement, elle nourrit dans l’âme de ce prince, cette compassion pour les malheureux, cet amour pour le peuple, la première des vertus royales.

Elle ne profita point de sa place pour faire tomber toutes les dignités et tous les grands emplois dans sa famille : son frère, le comte d’Aubigné, ancien lieutenant-général, ne fut pas même maréchal de France ; un cordon bleu, et quelques parts secrètes dans les fermes générales, furent sa seule fortune ; aussi disait-il au maréchal de Vivonne, frère de madame de Montespan : « Pour moi, j’ai reçu mon bâton de maréchal en argent comptant. » Le marquis de Villette son neveu, ne fut que chef d’escadre. Madame de Caylus, fille de ce marquis de Villette, n’eut en mariage qu’une pension modique donnée par Louis XIV.

Elle-même n’avait que la terre de Maintenon, qu’elle avait achetée des bienfaits du roi. « Mais, madame, vous n’avez rien, lui disait souvent le roi. — Sire, il ne vous est pas permis de me rien donner. » Telle était toujours sa réponse. Aussi disait-elle : « Ses maîtresses lui coûtaient plus en un mois, que je ne lui coûte en une année. »

L’éducation de Saint-Cyr a toujours été regardée comme un modèle pour toutes les éducations publiques. La fondatrice sut tenir un milieu entre l’orgueil des chapitres et les petitesses des couvents. Elle réunit une vie très régulière à une vie très commode ; les exercices étaient distribués avec intelligence. On apprenait aux jeunes demoiselles l’histoire ancienne et moderne, la géographie, la musique, le dessin ; on formait leur style par de petites compositions ; on cultivait leur mémoire, on les corrigeait des mauvaises prononciations, et on leur inspirait toutes les vertus de leur sexe.

Après la mort de Louis XIV, en 1715, madame de Maintenon se retira entièrement dans la maison de Saint-Cyr ; elle y reçut, en 1718, la visite du tsar Pierre le Grand, qui témoigna un grand empressement de voir la digne compagne de Louis XIV ; il la fixa avec beaucoup d’attention, et prononça quelques mots d’étonnement, avec une action assez énergique.

Françoise d'Aubigné, marquise de Maintenon
Françoise d’Aubigné, marquise de Maintenon. Portrait colorisé de Parfait Augrand (1675)
d’après une miniature de Jean Petitot l’ancien (1607-1691)

L’auguste veuve mourut l’année suivante, à l’âge de quatre-vingt-quatre ans, objet éternel de vénération, d’amour et de reconnaissance, au milieu des plus tendres soins et des gémissements d’une famille éplorée, qui perdait la plus tendre et la plus respectable de toutes les mères.

L’abbé de Vertot composa son épitaphe, sur laquelle on lit :

Simple dans sa grandeur,
Pauvre dans le centre de ses richesses,
Humble au comble des honneurs,
Révérée de Louis le Grand,
Environnée de sa gloire,
Une autre Esther dans la faveur,
Une seconde Judith dans l’oraison ;
etc.

Les lettres de madame de Maintenon ont été imprimées après sa mort, comme celles de madame de Sévigné : les unes et les autres sont écrites avec beaucoup d’esprit, mais avec un esprit différent. Le cœur et l’imagination dictaient celles de madame de Sévigné : elles ont plus de gaieté, plus de liberté. Celles de madame de Maintenon sont plus contraintes : il semble qu’elle ait toujours prévu qu’elles seraient un jour publiques. Madame de Sévigné, en écrivant à sa fille, n’écrivait que pour elle.

On trouve des anecdotes dans les unes et dans les autres ; on voit par celles de madame de Maintenon, qu’elle influait dans les affaires d’Etat, mais qu’elle ne les gouvernait pas ; qu’elle ne pressa point la révocation de l’édit de Nantes et ses suites, mais qu’elle ne s’y opposa point ; que Louis XIV, sur la fin de sa vie, portait des reliques que lui avait données le P. Letellier.

Ces lettres sont principalement précieuses, en ce qu’elles découvrent ce mélange de religion et de galanterie, de dignité et de faiblesse qui se trouve si souvent dans le cœur humain, et qui était dans celui de Louis XIV ; celui de madame de Maintenon paraît à la fois plein d’une ambition et d’une dévotion qui ne se combattent jamais, car elle n’était pas exempte d’ambition ; elle en laisse échapper l’aveu dans ce mot si connu : « Je le renvoie toujours affligé, jamais désespéré. » C’était de Louis XIV qu’elle parlait ainsi, et c’était avant le mariage.

On connaît, d’ailleurs, la réponse que lui fit d’Aubigné, son frère, un jour qu’elle se plaignait fortement de sa grandeur : « Je n’y puis plus tenir, disait-elle, je voudrais être morte. — Vous avez donc parole, reprit d’Aubigné, d‘épouser Dieu le père ? »

 
 
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