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Réforme postale, premier timbre-poste en France en 1849. Précurseurs du timbre. Port payé, affranchissement, enveloppes pré-affranchies. Entiers-postaux

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Événements marquants
Evénements ayant marqué le passé et la petite ou la grande Histoire de France. Faits marquants d’autrefois.
Réforme postale en 1849 et
billet de port payé, ancêtre
du timbre-poste en 1653
(D’après « La Poste anecdotique et pittoresque », paru en 1867)
Publié / Mis à jour le mercredi 4 octobre 2023, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 7 mn
 
 
 
Si une tentative de mise en œuvre de la lettre à port payé eut lieu en France en 1653, elle resta cependant sans lendemain, et il faut attendre l’avènement de la Réforme postale en 1849, dans le sillage de celle menée en Angleterre, pour que l’acheminement de correspondances dont le prix est auparavant réglé à l’arrivée et dépend de la distance parcourue, devienne uniforme et acquitté sous forme de timbres-poste lors de l’expédition du pli

Une instruction, datée du mois d’août de l’année 1653, porte les curieuses indications qui suivent. Cette instruction est adressée au public : « On fait sçavoir, y est-il dit, à tous ceux qui voudront escrire d’un quartier de Paris en un autre, que leurs lettres, billets ou mémoires seront fidellement portés et diligemment rendus à leur adresse, et qu’ils en auront promptement réponse, pourvu que, lorsqu’ils écriront, ils mettent avec leurs lettres, un billet qui portera port payé, parce que l’on ne prendra point d’argent, lequel billet sera attaché à ladite lettre ou mis autour de la lettre ou passé dans la lettre, ou en telle autre manière qu’ils trouveront à propos, de telle sorte néanmoins que le commis le puisse voir et oster aysément.

Instruction de 1653 relative au billet de port payé

Instruction de l’année 1653
relative aux billets de port payé

« Chacun estant averti que nulle lettre ni réponse ne sera portée, qu’il n’y aye avec icelle un billet de port payé, dont la date sera remplie du jour et du mois qu’il sera envoyé, à quoy il ne faudra manquer, si l’on veut que la lettre soit portée. Le commis général qui sera au palais, vendra de ces billets de port payé à ceux qui en voudront avoir, pour le prix d’un sol marqué, et non plus, à peine de concussion ; et chacun est adverty d’en acheter pour sa nécessité, le nombre qu’il lui plaira, afin que lorsqu’on voudra escrire, l’on ne manque pas pour si peu de chose à faire ses affaires. »

Il ne faut pas chercher davantage. L’assimilation est facile à établir entre ce moyen d’affranchissement et celui qui est aujourd’hui en usage dans toute l’Europe. Certes la forme en est encore incommode, l’usage en est restreint et limité, l’essai, en un mot, est timide et peu libéral ; mais dans ce billet qui porte port payé, que l’on appose sur les lettres et qui les affranchit, il faut bien saluer l’embryon du timbre-poste moderne, dont il présente d’ailleurs les principaux caractères d’utilité publique.

Une lettre, dont la suscription a dû être revêtue de l’un de ces billets de port payé, est parvenue jusqu’à nous, et se trouve actuellement entre les mains de M. Feuillet de Conches. Cette lettre est adressée par Pellisson, à Mlle de Scudéri, et nous ferons remarquer, en passant, à titre de curiosité littéraire, les étranges jeux d’esprit auxquels se livrait la précieuse société qui se réunissait le samedi de chaque semaine chez la célèbre bas-bleu du dix-septième siècle. L’adresse d’abord : « Pour mademoiselle Sapho, demeurant en la rue au Pays des nouveaux Sansomales, à Paris. »

Puis, le contenu : « Mademoiselle, Mandez-moy si vous ne sçavez point quelque bon remède contre l’amour ou contre l’absence, et si vous n’en connoissez point, faites-moy le plaisir de vous en enquérir, et au cas que vous en trouverez, de l’envoyer à Votre très-humble et très-obéissant serviteur, Pisandre. »

On sent dans ces quelques lignes comme un souffle du pays de Tendre, et l’on se croirait transporté dans la région des petits soins, ou sur le bord du ruisseau des tendres soupirs, si l’on ne se trouvait ramené à la réalité par la très prosaïque mention suivante : « Outre le billet de port payé, que l’on mettra sur cette lettre pour la faire partir, celuy qui escrira aura soing, s’il veut avoir réponse, d’envoyer un autre billet de port payé, enfermé dans sa lettre. » Voilà qui est explicite.

Que devint depuis cette invention ? C’est ce que nous ne saurions dire avec précision. Elle fut vraisemblablement abandonnée peu de temps après l’année qui l’avait vue naître, et quand elle reparut en 1840, elle était complètement oubliée, et l’on put croire qu’elle n’avait jamais existé. La réapparition du timbre-poste coïncida avec l’adoption de la réforme postale, en d’autres termes, avec l’application de la taxe uniforme. Depuis longtemps déjà, le commerce et l’industrie réclamaient ajuste titre un abaissement de tarif. Le port des lettres était très élevé, et l’on pouvait citer, à cette époque, une maison de Paris, dont la correspondance taxée atteignait quotidiennement le chiffre énorme de douze cents francs.

C’est l’Angleterre qui, la première, entra dans la voie de la réforme, en 1840, adoptant une taxe uniforme (two pence, dix centimes) pour les trois royaumes. En France, la réforme postale fut appliquée en 1849, et un avis au public diffusé par l’Administration des Postes expliquait les nouvelles dispositions relatives à l’envoi du courrier :

« Le public est averti qu’à dater du 1er janvier 1849, la taxe des lettres établie d’après la distance parcourue est supprimée et remplacée par une taxe fixe et uniforme de 20 centimes pour tout lettre circulant à l’intérieur, dont le poids n’excèdera pas 7 grammes et demi, et quelle que soit la distance à parcourue dans toute l’étendue de la France, de la Corse et de l’Algérie. Au-dessus du poids de 7 grammes et demi et jusqu’à 15 grammes, les lettres seront taxées 40 centimes. Au-dessus de 15 grammes et jusqu’à 100 grammes, la taxe est invariablement fixée à 1 franc. Les lettres ou paquets dont le poids dépassera 100 grammes supporteront un supplément de taxe de un franc pour chaque 100 grammes ou fractions de 100 grammes excédant.

« (...) Le public reste libre d’affranchir ou de ne pas affranchir ses lettres ordinaires ; cependant, pour faciliter l’usage de l’affranchissement et pour éviter aux citoyens des déplacements auxquels le mode actuel de l’affranchissement les oblige, l’Administration fera vendre, au prix de 20 centimes, de 40 centimes et d’un franc, des timbres ou cachets dont l’apposition sur une lettre suffira pour en opérer l’affranchissement dans toute l’étendue de la République. Chaque citoyen pourra ainsi, au moyen de ces timbres-cachets, affranchir ses lettres sans être obligé d’en acquitter le port en argent dans les bureaux de poste.

Premier timbre français

Premier timbre français le 1er janvier 1849 : Cérès Noir, 20 centimes

« Ces timbres consistent dans une petite estampe représentant une tête de la Liberté, imprimée en encre rouge, bleue ou noire, sur un papier dont le revers est enduit d’une légère couche de gomme. Le prix de chaque timbre se distingue par la couleur de l’encre. Pour affranchir une lettre, il suffira donc d’humecter le côté du timbre qui est enduit de gomme, et de l’appliquer sur l’adresse de la lettre, que l’on peut ensuite jeter à la boîte en toute confiance et sans autre formalité. Si l’envoyeur place sur sa lettre le timbre représentant une taxe moindre que celle que comporte le poids de la lettre, l’Administration appliquera à la lettre mal affranchie un supplément de taxe qui devra être acquitté en argent par le destinataire. »

Seulement la mesure en avait été prise un peu hâtivement (décret du 24 août 1848 de l’Assemblée nationale, et circulaire d’application publiée le 28 septembre), et, quand il s’agit de la mettre à exécution, on s’aperçut qu’il restait à peine un délai de trois mois pour la fabrication des timbres-poste dont il était indispensable d’approvisionner préalablement tous les établissements de poste français. Dans cette situation, dont on ne pouvait se dissimuler les difficultés, on s’adressa à un ingénieur anglais, sir Perkins, et on lui demanda à quel prix il s’engagerait à fournir la quantité de figurines reconnue rigoureusement nécessaire. Sir Perkins demanda six mois pour livrer des timbres-poste à raison de 1 franc la feuille de 240 timbres. C’était un prix fort onéreux, et le terme demandé dépassait d’ailleurs de beaucoup le délai fixé pour la mise à exécution de la loi. La négociation fut donc rompue, et l’on se décida à s’adresser à l’industrie française.

C’était certainement ce que l’on pouvait faire de mieux. Il y avait alors, à la Monnaie de Paris, un graveur – un artiste – Hulot, qui venait tout récemment de donner la mesure de son talent et la preuve éclatante de son habileté. Après la révolution de Février, dans un moment où le numéraire était excessivement rare, le ministre des finances avait demandé à la Banque de France l’émission d’un grand nombre de petites coupures de billets de banque. Mais la Banque ne pouvait satisfaire à cette demande, n’ayant qu’un seul type pour l’impression des billets de 200 francs et n’en possédant aucun pour des coupures pi us petites. Or, il est bon de savoir, ajoute Louis Figuier, qu’une planche ou type de billet de Banque, qui revient à environ 25000 francs, demande ordinairement de dix-huit mois à deux ans de travail. Dans cette occurrence, on avait eu recours à Hulot, et en deux mois, à l’aide de ses procédés personnels de galvanoplastie, il avait pu graver et multiplier le billet de 100 francs.

Le souvenir encore récent de cette opération accomplie avec autant de célérité que de succès, engagea le gouvernement à charger Hulot de la fabrication des timbres-poste, et bien qu’on eût perdu déjà un temps précieux en négociations demeurées stériles, et que l’on pût craindre des retards imprévus, huit jours avant le 1er janvier 1849, époque à laquelle la loi était exécutoire, tous les bureaux de poste de France étaient pourvus de timbres-poste, et il en restait entre les mains du garde-magasin de l’administration centrale un approvisionnement considérable de 8 à 10 millions. Une lettre de Hulot renferme d’intéressants détails sur les procédés qui ont servi non seulement à établir les clichés des timbres-poste, mais encore à prévenir la contrefaçon. Elle est datée du 25 septembre 1851 :

« Les procédés dont je dispose, dit-il, se prêtaient également à la multiplication de tout genre de gravure en taille-douce comme en taille de relief. J’avais le choix entre l’impression en taille-douce et l’impression typographique. Je me décidai pour cette dernière. Le coin type fut gravé en cinq semaines. Dans un temps égal, les ateliers de fabrication furent créés, et les planches portant 300 timbres exécutées. Enfin quelques jours de tirage avec des presses à bras ordinaires, à raison de 1 200 000 timbres-poste par jour, me suffirent pour approvisionner tous les bureaux de poste de France.

« Les timbres-poste, aujourd’hui de cinq valeurs différentes [ceci était écrit en 1851], sont imprimés en couleurs distinctes, sur des papiers teintés en diminutif de la couleur de l’impression. L’impression noire est abandonnée dans un intérêt de service (le noir étant réservé pour l’annulation). Le gommage des feuilles, qui s’opère d’une manière très simple, n’a rien de malsain ni de repoussant comme celui des postage stamps anglais. Il ne rend pas la gravure indistincte en la noircissant, par la transparence du papier, comme cela arrive le plus souvent aux timbres-poste anglais, à ceux de l’Union américaine et d’ailleurs. Il adhère facilement aux lettres, en conservant toujours beaucoup de flexibilité. L’oblitération ou annulation, qui se pratique dans les bureaux de poste à l’aide d’une encre typographique noire très commune, est complète et entièrement à l’abri du lavage ; des expériences multipliées et très décisives l’ont prouvé. Un des caractères particuliers du timbre-poste typographique, qui le ferait distinguer au premier coup d’œil de toute imitation, c’est la fermeté des tailles et du trait, et la netteté de l’impression. Ce caractère manque tout à fait aux timbres dans le système Perkins. »

Centenaire du timbre français

Centenaire du timbre-poste français

Un auteur anglais explique que, « comme l’on pouvait s’y attendre », la mode des collections de timbres-poste est née en France, et l’on a pu voir longtemps au jardin des Tuileries ou autour du palais du Luxembourg une foule avide s’assembler le dimanche et y donner le spectacle d’un marché aussi animé que celui de la Bourse. Un tel mouvement devait donner l’éveil à la spéculation. Cela n’a pas manqué. Il est rare que les fripons s’abstiennent en pareil cas ; et, cette fois encore, nous les retrouvons ici exploitant la crédulité publique avec autant d’audace que d’adresse.

Vers 1860, une annonce, insérée dans les grands journaux de Paris, s’exprimait ainsi : « Pour une affaire très lucrative, on demande des correspondants à l’étranger. Sur demande affranchie, on enverra franco des échantillons et de plus amples détails. S’adresser à M. A. B..., poste restante, à Paris. » L’affaire lucrative de M. A. B. consistait simplement à solliciter de tous les pays du monde connu des lettres revêtues de timbres-poste qui, détachés de l’enveloppe, devaient servir à enrichir sa collection.

Le moyen était d’une probité douteuse ; mais voici un autre fait où l’audace est poussée bien plus loin encore. Vers 1853, un industriel de Londres faisait insérer dans le Times les lignes suivantes : « Pour 20 centimes (two pence), magnifique portrait de Napoléon III, gravé par Barre, graveur de la Couronne. » L’annonce était alléchante : on se laissait aller facilement à envoyer ses 20 centimes, et l’on recevait en échange un timbre-poste de 10 centimes, représentant l’Empereur, et gravé en effet par Barre.

Il faut attendre les années 1870 pour voir apparaître en France les entiers-postaux, supports sur lesquels est pré-imprimé un timbre-poste, et avant l’avènement de l’enveloppe pré-timbrée, notre pays pouvait observer que la pratique était répandue en Chine depuis longtemps. Il y existait en effet :

1° Une enveloppe verte, portant des caractères rouges dont voici la traduction : « Dix sapèques étant données, cette lettre ira par delà toutes les mers et toutes les grandes montagnes. » Cette enveloppe était destinée aux correspondances qui sortaient de l’Empire.

2° Une enveloppe blanche, portant des caractères roses : « Moyennant trois sapèques cette lettre ira par delà toutes les provinces de la Chine, et s’arrêtera vers les bords de la mer. » Affranchissement pour l’intérieur.

3° Une enveloppe rose, portant des caractères rouge vif : « Que le ciel accorde noblesse et richesse à toutes les générations. » Celte formule, qui ressemblait beaucoup à notre « A tous ceux qui les présentes verront, etc. » était réservée exclusivement à la correspondance officielle des ministres avec les gouverneurs de province.

Les Chinois avaient, depuis des siècles, des enveloppes affranchies d’avance, de divers formats, de diverses nuances, suivant le prix de l’affranchissement, et le progrès qu’on s’apprêtait à mettre en œuvre en France et qui nous semblait une nouveauté, était là-bas, aux antipodes, une coutume usuelle.

Voici, enfin, les différentes dates de création des timbres français, les premières années après que la Réforme postale ait été mise en œuvre :

20 centimes Noir : 1er janvier 1849
1 franc Vermillon : 1er janvier 1849
1 franc Carmin pâle : août 1849
40 centimes Orange : décembre 1849
1 franc Carmin foncé : décembre 1849
25 centimes Bleu (1er juillet 1850
15 centimes Vert : 23 juillet 1850
10 centimes Bistre : 12 septembre 1850
25 centimes Bleu : août 1852
10 centimes Bistre : septembre 1852
10 centimes Bistre : août 1853
1 franc Carmin : 17 août 1853
40 centimes Orange : 8 septembre 1853
25 centimes Bleu : 3 novembre 1853
20 centimes Bleu : 1er juillet 1854
80 centimes Carmin : 1er décembre 1854
5 centimes Vert : 14 novembre 1854
80 centimes Rose : octobre 1860
1 centime Vert olive : 1er novembre 1860
5 centimes Vert lumière : mars 1861
2 centimes Brun Wan Dyck : 25 décembre 1862
4 centimes Lilas : 5 septembre 1863

 
 
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