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Cent-Jours de Napoléon et fortune de la famille Rothschild avant la défaite de Waterloo

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Anecdotes insolites
Petite Histoire de France et anecdotes, brèves et faits divers insolites, événements remarquables et curieux, événements anecdotiques
Fortune (La) des Rothschild déjà confortée
par une fructueuse opération lors
du retour de Napoléon de l’île d’Elbe ?
(D’après « Le Conteur du dimanche. Littérature, Histoire,
Voyages, Musique », n° du 11 décembre 1904)
Publié / Mis à jour le mercredi 24 octobre 2012, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 4 mn
 
 
 
Si la maison Rothschild parvint à asseoir sa fortune en exploitant la nouvelle de la défaite de Napoléon à Waterloo en juin 1815, il semble que plusieurs mois auparavant et s’il faut ajouter foi aux dires d’un banquier anglais, le seul retour de l’île d’Elbe aurait déjà valu des gains énormes aux célèbres financiers qui, informés avant autrui, dépêchèrent à Londres depuis Paris un joueur d’échecs chargé d’une périlleuse mission

On considère en effet que la fortune des Rothschild fut assise lors de la bataille de Waterloo : averti avant que la nouvelle de la défaite de Napoléon à Waterloo le 18 juin 1815 ne se répande, Nathan Rothschild vend ses titres à la Bourse de Londres, donnant ainsi à penser que l’Empereur est sorti victorieux du combat.

Nathan de Rothschild

Nathan de Rothschild

La rumeur s’ébruitant, la plupart des actionnaires, pris de panique, vendent à leur tour leurs actions, provoquant un effondrement des cours, Nathan Rothschild en profitant alors pour les racheter à un prix dérisoire. Bientôt, la véritable nouvelle de l’issue de la bataille, la défaite de Napoléon, parvient à Londres, entraînant une remontée des cours et conférant à la famille Rothschild le contrôle de l’économie anglaise.

Mais il se pourrait qu’un précédent similaire, en mars 1815, au début des Cent-Jours, eût permis à la famille Rothschild de réaliser de substantiels gains du moins à en croire un banquier anglais auteur de mémoires dont le Berliner Lohal Anziger publia des extraits. A part une allusion assez obscure que Napoléon fit à ce sujet, en présence de ses familiers, à Sainte-Hélène, il n’existe aucune trace de l’épisode suivant, mentionné par la banquier en question. Celui-ci, très jeune en 1815, travaillait comme petit employé des bureaux de James de Rothschild, à Paris. Le 5 mars, entre neuf et dix heures du soir, le personnel de maison se préparait à s’en aller, quand la porte s’ouvrit brusquement, livrant passage au baron James qui, tout effaré, annonça le débarquement de Napoléon à Fréjus, et sa marche sur Paris.

« Louis XVIII, continua-t-il, va se sauver aussi vite que sa corpulence le lui permettra. Les ministres rédigent une proclamation emphatique qu’ils feront afficher demain matin. Ça n’est pas cela qui les sauvera. Une fois de plus, la stupidité des Bourbons va troubler la paix et entraîner la France à de nouvelles guerres. Vous n’ignorez pas, messieurs, que nous avons dans nos caves cent millions en napoléons d’or. Il est évident que Talleyrand et Fouché ne reculeront devant rien pour se faire bien voir de l’Empereur. Comme ils savent le montant de notre encaisse en or, il est non moins évident qu’ils l’engageront à s’emparer de cette somme, à titre d’emprunt forcé. Comment nous tirer de là ? La confiscation des cent millions entraînera la perte de notre maison. Mon frère Nathan seul [qui était à Londres] pourrait nous sauver ; mais comment le prévenir ? »

La chose n’était pas facile, car les portes étaient fermées et gardées par la troupe. Cependant, l’auteur de ce récit ayant appris qu’un Allemand nommé Schmidt, courrier de l’ambassade d’Angleterre, était autorisé à sortir de Paris pour porter des dépêches à Londres, offrit à Rothschild de remplir auprès du baron Nathan la mission qu’il lui plairait de lui confier. Quoique très interloqué par la proposition que lui faisait cet employé à 1500 francs par an, le baron James condescendit à lui exposer que ce Schmidt avait refusé les dix mille francs qu’on lui avait offerts s’il voulait se charger d’emporter une lettre à l’adresse de son frère Nathan, et que, par conséquent, il était superflu de renouveler une tentative auprès de lui. Mais l’auteur ne se laissa pas convaincre et insista auprès de son patron, déclarant nettement qu’avec de l’argent et une lettre d’introduction, il se faisait fort de remplir la mission.

Gagné par sa chaleur et se disant, en somme, qu’il ne fallait dédaigner aucune chance de salut, le baron James lui fit donner de l’argent et lui remit un chiffon de papier avec ces mots griffonnés en hébreu : « Tu peux te fier entièrement au porteur. » Avant de suivre l’auteur dans sa course vertigineuse, il importe de remarquer que cet homme était un passionné joueur d’échecs. Dès qu’il avait une minute de loisir, il se précipitait au café de la Régence, où il engageait, sans tarder une partie avec le courrier Schmidt, lequel avait au même degré que lui le culte du jet, noble entre tous.

Napoléon quittant l'île d'Elbe le 26 février 1815

Napoléon quittant l’île d’Elbe le 26 février 1815. Peinture de Joseph Baume (1836)

A force de s’escrimer l’un contre l’autre, ces deux jeunes gens étaient devenus une paire d’amis, plus que cela, de vrais inséparables. L’auteur, qui évidemment n’était pas le premier venu, avait entrevu dès le nom de Schmidt prononcé, le parti qu’il pourrait tirer de la communauté de leurs goûts. Au sortir des bureaux du baron Rothschild, il se rendit au café de la Régence et demanda qu’on voulût bien lui prêter un jeu d’échecs. De là, il s’en alla trouver son partenaire qui, tout naturellement, s’empressa de lui conter ses peines, c’est-à-dire l’obligation où il était de faire le voyage de Londres. Non moins naturellement, l’autre lui proposa de l’accompagner, histoire de faire d’interminables parties en vue de rompre la monotonie de la route, et finalement l’entortilla de la façon la plus merveilleuse. Schmidt ne demandait qu’à se laisser convaincre, et bientôt l’émissaire de Rothschild fut installé en face de lui, dans une confortable chaise de poste.

Au dernier relais avant Boulogne, l’auteur s’arrangea pour provoquer un accident de voiture (il avait enlevé l’écrou d’une roue). Tandis que ce pauvre innocent de Schmidt s’échinait à faire les réparations nécessaires, son ami, qui, véritablement, n’était pas digne de ce titre, enfourchait le premier cheval venu, partait au galop et, d’une seule traite, gagnait la ville après avoir parcourut les dix milles qui la séparaient du théâtre de l’accident. C’était, on l’avouera, une chevauchée peu ordinaire pour un homme qui, peut-être, montait à cheval, ce jour-là, pour la première fois de sa vie, oui qui, du moins, ne devait pas être entraîné à cet exercice violent.

Le voici donc à Boulogne, où de nombreux obstacles se dressent devant lui, sous forme de sentinelles postées de distance en distance. Des pièces d’or, semées adroitement, lui frayent un chemin. Il se jette dans une barque de contrebandiers qui semble préparée à son intention – comme dans les Trois Mousquetaires – et, poussé par un vent favorable, s’éloigne de la rive. Quelques heures plus tard, il débarque à Douvres, se fait donner une voiture attelée de quatre vigoureux postiers et repart à une allure folle. Enfin, à cinq heures du matin, trente heures après avoir quitté Paris, il sonne à la porte de Nathan de Rothschild, lequel, sur le premier moment, n’est pas autrement enchanté d’être réveillé à une heure si matinale.

James de Rothschild

James de Rothschild

« Tiré brusquement d’un profond sommeil et informé de la catastrophe à laquelle sa maison était exposée, il garda tout son sang-froid et, après une minute de réflexion, me donna les instructions suivantes :

« Vous allez retourner en toute hâte auprès de mon frère. Ne vous laissez pas surmonter par la fatigue et arrivez à Paris avant Napoléon. Soyez bien persuadé que vous n’obligez pas des ingrats. Je ne vous en dis pas davantage, car le moment n’est pas aux remerciements. Et maintenant, retenez mes paroles. Le règne de Napoléon sera éphémère. L’armée se déclarera évidemment pour lui, mais la nation, lasse de si nombreuses guerres, ne le suivra pas.

« Le problème consiste pour nous à faire disparaître notre or, sans nous brouiller avec l’Empereur. Nous n’avons rien à payer d’ici quelque temps, mais les billets et valeurs vont subir une dépréciation ; par conséquent, l’or fera prime. Notre ligne de conduite est donc tracée ; nous n’avons qu’à changer notre métal contre des billets et des valeurs et à garder le tout dans notre caisse jusqu’au jour où le calme aura succédé à la tempête. Il est bien entendu que mon frère devra assister à toutes les réceptions des Tuileries, quitte, si on lui demande de l’argent, à répondre qu’il n’en a plus. Et maintenant, partez, mon garçon, et rentrez à Paris aussi vite que possible. »

Lorsque le jeune homme allait sortir, le baron Nathan le rappela et lui demanda combien de temps il faudrait à Schmidt pour arriver à Londres. Sur la réponse qu’il ne pourrait pas y être avant neuf ou dix heures du matin, Rothschild envoya son agent prévenir lord Castlereagh (alors ministre des affaires étrangères) des événements qui se passaient en France. « Comme vous n’avez pas de passeport, ajouta-t-il, et que j’en ai plusieurs signés en blanc, je vais vous en donner un. Passez par Calais ; ce sera le plus prudent, car, à Boulogne, on vous arrêterait probablement. »

Tout ceci fut exécuté à la lettre, et le 8 mars, à une heure de l’après-midi, notre homme remit au baron James les instructions de son frère. Elles furent si exactement suivies que la jour où l’Empereur rentrait à Paris il n’y avait plus un centime dans les caisses de la maison Rothschild. Les plans de Talleyrand et de Fouché étaient déjoués, mais pendant la courte durée de son deuxième règne, Napoléon Ier ne témoigna ni mécontentement ni ressentiment au baron Rothschild.

 
 
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