Histoire de France, Patrimoine, Tourisme, Gastronomie, Librairie
LE 19 avril DANS L'HISTOIRE [VOIR]  /  NOTRE LIBRAIRIE [VOIR]  /  NOUS SOUTENIR [VOIR]
 
« Hâtons-nous de raconter les délicieuses histoires du
peuple avant qu'il ne les ait oubliées » (C. Nodier, 1840)
 

 
NOUS REJOINDRE SUR...
Nous rejoindre sur FacebookNous rejoindre sur XNous rejoindre sur LinkedInNous rejoindre sur VKNous rejoindre sur InstragramNous rejoindre sur YouTubeNous rejoindre sur Second Life

Nicolas Fouquet, surintendant des Finances sous Louis XIV. Portrait, biographie, vie et oeuvre. Procès, emprisonnement, rivalités

Vous êtes ici : Accueil > Personnages : biographies > Fouquet (Nicolas), surintendant des (...)
Personnages : biographies
Vie, oeuvre, biographies de personnages ayant marqué l’Histoire de France (écrivains, hommes politiques, inventeurs, scientifiques...)
Fouquet (Nicolas),
surintendant des Finances faisant
de l’ombre au Roi-Soleil ?
(D’après « Biographie universelle ancienne et moderne » (Tome 14))
Publié / Mis à jour le mardi 23 août 2011, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 5 mn
 
 
 
Maître des requêtes à 20 ans, procureur général au parlement de Paris à 35, Nicolas Fouquet est investi en 1653 de la fonction de surintendant des Finances, à un moment où le désordre de celles-ci, occasionné notamment par de longues guerres, exige des mains habiles. Empruntant sur sa signature et pour l’Etat des sommes considérables, faisant l’acquisition de somptueuses propriétés et donnant une fête mémorable au point que le Roi-Soleil en prend ombrage, il attire bientôt tous les soupçons, avant d’être arrêté par d’Artagnan et de faire l’objet d’un procès qui lui vaudra une complète disgrâce.

Né à Paris en janvier 1615. il était destiné à suivre la carrière de la magistrature dans les emplois les plus brillants, il reçut une éducation conforme aux vues de sa famille, et se fit bientôt connaître d’une manière favorable. Il fut fait maître des requêtes à vingt ans et il n’en avait que trente-cinq lorsqu’il fut pourvu de la charge, alors si importante, de procureur général au parlement de Paris.

Nicolas Fouquet

Nicolas Fouquet

Pendant les troubles du royaume, il se dévoua entièrement aux intérêts de la reine mère et mérita ainsi la protection dont cette princesse l’honora constamment. Le désordre des finances, occasionné par des guerres longues et ruineuses et par les dilapidations des courtisans, faisait désirer d’en voir confier l’administration à des mains habiles. La reine mère indiqua Fouquet, et il fut nommé surintendant en 1653. Il fit face quelque temps à toutes les dépenses par son seul crédit. Il engagea ses biens et ceux de son épouse, emprunta sur sa signature des sommes considérables du cardinal Mazarin lui-même et parvint de cette manière à déguiser la pénurie du trésor royal. Le roi, dit Voltaire, demandait quelquefois de l’argent à Fouquet, qui lui répondait : « Sire, il n’y a rien dans les coffres de Votre Majesté ; mais M. le cardinal vous en prêtera. »

Mais enfin le roi, étonné de voir les revenus de l’État se consommer à payer des intérêts, et les dettes s’accroître chaque année dans une progression effrayante, voulut connaître par lui-même la cause de ce désordre. Il s’adressa pour obtenir les renseignements qu’il souhaitait à Colbert, dont Mazarin lui avait vanté le zèle et la capacité. Colbert joignait à des talents supérieurs une grande ambition : il jugea l’occasion favorable pour perdre le surintendant, qu’il aspirait en secret à remplacer ; et en éclairant le roi sur les fautes de l’administration de Fouquet, s’il ne les exagéra pas, il s’abstint du moins de donner les raisons qui pouvaient les rendre excusables.

Dès qu’on put soupçonner la faveur de Colbert, tous les courtisans se rangèrent de son coté : on ne parla plus au roi que des prodigalités du surintendant, et on lui insinua que l’embarras des finances n’était causé que par ses dilapidations. Fouquet avait acquis la propriété de Belle-lsle, et il en avait augmenté les fortifications ; on chercha à lui en faire un crime et à persuader au roi que son projet était de s’emparer de la Bretagne et de s’en déclarer le souverain. Fouquet, par une conduite peu réfléchie, avait donné lieu aux propos de ses ennemis : il avait eu aurai le tort de faire construire dans la terre de Vaux, un palais qui surpassait en beauté St-Germain et Fontainebleau, les deux seules maisons de plaisance habitées par le roi. Le palais, dit Voltaire, et les jardins lui avaient coûté dix-huit millions, qui en valent aujourd’hui plus de trente-cinq.

Au moment où sa disgrâce était près d’éclater, il y donna à Louis XIV une fête qui surpassa par sa magnificence tout ce qu’on avait vu jusqu’alors. On y représenta pour la première fois (17 août 1661) les Fâcheux de Molière, avec un prologue composé par Pelisson à la louange du roi. Mais rien ne pouvait apaiser le monarque irrité ; et sans les prières de la reine mère, il aurait fait arrêter le surintendant le jour même de la fête. Ce qui avait achevé, dit-on, d’allumer la colère de Louis XIV c’est qu’il apprit que Fouquet avait eu des vues sur mademoiselle de la Vallière, pour qui il commençait à sentir une vraie passion. Le roi dissimula son ressentiment et affecta de parler à Fouquet avec plus de confiance que jamais. Fouquet crut avoir triomphé de ses ennemis et se flatta même d’obtenir la place de premier ministre, vacante par la mort de Mazarin.

Sa qualité de procureur général le rendant justiciable des seules chambres assemblées, on l’engagea à se défaire de cette charge, sous le prétexte que tant qu’il la conserverait le roi ne pourrait pas lui donner le cordon de ses ordres, comme Sa Majesté en avait l’intention. Il se laissa persuader et vendit cette charge pour 1400000 francs, qu’il fit porter à l’épargne. Quelques jours après le roi partit pour Nantes, afin de s’assurer de Belle-lsle s’il était nécessaire, et Fouquet l’y suivit, quoique malade de la fièvre. Il reçut dans la route plusieurs avertissements des trames qu’on ourdissait contre lui, mais il n’en voulut rien croire. Le lendemain de son arrivée il se rendit au conseil à son ordinaire, eut avec le roi un entretien de deux heures, et en retournant chez lui, le 5 septembre 1661, il fut arrêté par d’Artagnan, capitaine des mousquetaires, qui le conduisit au château d’Angers, d’où il fut transféré à Amboise, à Vincennes, à Moret, et enfin à la Bastille.

Fouquet soutint sa disgrâce avec beaucoup de fermeté ; il ne laissa échapper aucune plainte et ne montra nulle répugnance à obéir aux ordres du roi. Sa mère, en apprenant cette nouvelle, se jeta à genoux en s’écriant : « C’est à présent, mon Dieu, que j’espère du salut de mon fils ! » Cependant les scellés furent mis sur les papiers de Fouquet et des commissaires nommés pour les examiner et en dresser l’inventaire. Un chiffon écrit il y avait plus de quinze ans, et trouvé avec d’autres papiers destinés à être brûlés comme inutiles, servit de base au procès que l’on commença à instruire contre lui. C’était une espèce de mémoire rédigé par Fouquet dans le temps de la plus haute faveur de Mazarin et dans lequel il indiquait la conduite à tenir par sa femme pour déjouer quelques projets contre se liberté ou sa fortune. On voulut voir, ou on vit effectivement, dans ce mémoire un plan de conspiration.

Une commission composée d’hommes choisis dans les parlements du royaume fut établie pour juger Fouquet, et le chancelier Seguier, le plus implacable de ses ennemis, voulut lui-même la présider. Fouquet se plaignit de l’incompétence de ses juges et déclara qu’il ne reconnaîtrait jamais leur autorité. Obligé, malgré ses protestations, de paraître devant eux, le chancelier l’invita à prêter le serment accoutumé. « Je ne le puis, dit Fouquet, et j’en ai déjà donné les raison. » Pendant toute la durée des interrogatoires, il parla presque constamment avec calme et modération. Il examinait les chefs d’accusation et les discutait avec une éloquence douce et persuasive, dont ses juges finirent par craindre l’effet. Les plus acharnés à sa perte demandèrent qu’on lui enjoignît de se borner à répondre aux questions qui lui seraient adressées, mais heureusement leur demande n’eut pas de suite.

Vue du château de Vaux-le-Vicomte et de ses jardins au XVIIe siècle

Vue du château de Vaux-le-Vicomte et de ses jardins au XVIIe siècle

Un jour, après qu’il eut cessé de parler, Pussort, l’un de ses juges et oncle de Colbert, se leva en disant : « Dieu merci, on ne se plaindra pas qu’on ne l’ait pas laissé parler tout son soûl. » Quand on lui eut donné lecture du projet trouvé dans ses papiers : « Monsieur, dit-il au chancelier, je crois que vous ne pouvez tirer autre chose de ce papier que l’effet qu’il vient de faire, qui est de me donner beaucoup de confusion. – Vous ne pouvez pas nier, lui répondit le chancelier, que ce soit un crime d’État. – Je confesse reprit Fouquet, que c’est une folie et une extravagance, mais non pas un crime d’état. Un crime d’État, c’est quand on est dans une charge principale, qu’on a le secret du prince, et que tout d’un coup on se met du coté de ses ennemis, qu’on engage toute sa famille dans les mêmes intérêts, qu’on fait ouvrir les portes des villes dont on est gouverneur à l’armée des ennemis, et qu’on les ferme à son véritable maître ; qu’on porte dans le parti contraire tous les secrets de l’État : voilà, monsieur, ce qui s’appelle un crime d’État. »

Cette réponse était d’autant plus piquante qu’elle retraçait la conduite du chancelier durant les troubles de la Fronde. Fouquet avait conservé d’illustres amis dans sa disgrâce, et c’est la preuve qu’il les avait mérités. On doit citer le premier ce Pelisson qui partagea sa peine et qui eut le courage de publier pour sa défense trois mémoires qui approchent, dit Voltaire, de l’éloquence de Cicéron. Madame de Sévigné, Gourville, mademoiselle de Scudéry, Saint-Évremont parlèrent aussi et agirent en sa faveur ; Hénault versa tout le fiel de la satire contre le persécuteur de Fouquet ; Loret perdit sa pension pour avoir fait son éloge dans le Mercure burlesque ; La Fontaine plaignit ses malheurs dans une élégie touchante et chercha à adoucir la sévérité du roi par de beaux vers.

La chaleur que mirent ses amis à le défendre et la pitié qu’inspirent toujours de grandes infortunes lui sauvèrent la vie. Après trois années employées à l’instruction de ce procès à jamais célèbre, Fouquet, sur le rapport de MM. d’Ormesson et de Sainte-Hélène, fut condamné à la confiscation de ses biens et au bannissement. De vingt-deux juges qui opinèrent, neuf seulement osèrent conclure à la mort. Si l’on réfléchit que presque tous les juges de Fouquet étaient ses ennemis déclarés, que depuis le moment de sa disgrâce Colbert et Letellier n’avaient cessé de travailler à sa perte, il est bien difficile de croire qu’il fut coupable des crimes qu’on lui imputait. La destination de l’écrit dont ses adversaires se prévalurent tant leur ôtait tout prétexte de l’accuser d’avoir voulu troubler le royaume : car s’il avait ajouté aux fortifications de Belle-Isle, ce n’était que d’après l’autorisation expresse du roi, et il pensait si peu à s’en faire une retraite, que, lorsque d’Artagnan le conduisit en prison, ayant aperçu un de ses domestiques, il l’appela et lui dit : « Que le roi soit obéi à Belle-lsle comme moi-même. » Enfin, et cette raison parait sans réplique, s’il eût vraiment conspiré, il aurait eu des complices, et jamais on n’en a cité un seul.

Le roi commua l’arrêt de Fouquet en une prison perpétuelle. Il partit pour la citadelle de Pignerol sous une forte escorte et fut traité dans la route avec une grande sévérité. Dans les premiers moments il chercha à fléchir le roi par l’aveu de ses torts et l’expression de son repentir ; mais voyant que toutes ses prières seraient inutiles, il cessa d’écrire et se résigna à son sort avec une constance qui a été admirée même de ses ennemis ; il trouva des adoucissements dans les secours de la religion, et mourut dans de grands sentiments de piété en 1680, à l’âge de 65 ans, dont il avait passé dix-neuf en prison. Son corps fut transporté à Paris et inhumé dans le couvent des Filles-Sainte-Marie de la rue Saint-Antoine. Fouquet, dit son historien, avait du génie, de l’esprit, des talents, de la grandeur d’âme ; mais il portait cette dernière qualité à l’excès, et l’on peut dire que, s’il se fût montré moins libéral et moins ami de ceux qu’il aimait, il eût été bien plus heureux.

 
 
Même rubrique >

Suggérer la lecture de cette page
Abonnement à la lettre d'information La France pittoresque

Saisissez votre mail, et appuyez sur OK
pour vous abonner gratuitement
Éphéméride : l'Histoire au jour le jour. Insertion des événements historiques sur votre site

Vos réactions

Prolongez votre voyage dans le temps avec notre
encyclopédie consacrée à l'Histoire de France
 
Choisissez un numéro et découvrez les extraits en ligne !