5 avril 1250 : le roi Saint-Louis est fait prisonnier en Egypte

En 1244, Saint-Louis étant attaqué d’une maladie violente, avait fait vœu de prendre la croix contre les infidèles. Dès qu’il eut recouvré la santé, il s’occupa des moyens de remplir son vœu ; les remontrances de la reine sa mère, de la reine sa femme, et même de l’évêque de Paris, furent inutiles. Il prépara pendant quatre ans cette illustre et malheureuse expédition ; enfin, laissant à sa mère le gouvernement du royaume, il part avec sa femme et ses trois frères, que suivent aussi leurs épouses ; presque toute la chevalerie de France l’accompagne. Une partie de la flotte immense qui portait tant de princes et de soldats, part de Marseille, et l’autre d’Aigues-Mortes, qui n’est plus un port aujourd’hui.

La plupart des gros vaisseaux ronds qui transportaient les troupes, furent construits dans les ports de France ; ils étaient au nombre de dix-huit cents. On aurait bien de la peine à faire aujourd’hui un pareil armement, parce que les bois sont infiniment plus rares, tous les frais plus grands à proportion, et que l’artillerie nécessaire rend la dépense plus forte et l’armement plus difficile.

Héroïque fermeté de saint Louis à Damiette. Peinture de Guillaume Guillon Lethière

Arrivés à la rade de Damiette, les Croisés s’emparent de cette ville ; ils délibérèrent ensuite de quel côté ils tourneraient leurs armes. Robert, comte d’Artois, frère de Saint-Louis, fait décider qu’on marcherait au Caire, la capitale de l’Egypte, « parce que, disait-il, qui voulait occire le serpent il lui devait écraser la tête. »

On passe le Nil à la vue des infidèles qui prennent la fuite ; mais la valeur impétueuse du jeune comte d’Artois fit perdre le fruit de ce premier avantage ; il s’engage témérairement dans la ville de Massoure ; il y est tué ; la moitié de l’armée est taillée en pièces ; l’autre moitié périt par la famine et par les maladies contagieuses, et pour comble de malheur, le roi est fait prisonnier avec ses deux frères et ses principaux seigneurs.

Saint-Louis fut aussi grand dans les fers qu’il l’avait été sur le trône ; les Musulmans étonnés de sa magnanime constance, lui disaient : « Nous te regardions comme notre captif et notre esclave, et tu nous traites dans les fers comme si nous étions tes prisonniers. ». On osa lui proposer de donner une somme excessive pour sa rançon ; mais il répondit aux envoyés du sultan : « Allez dire à votre maître, qu’un roi de France ne se rachète point avec de l’argent ; je donnerai cette somme pour mes gens, et Damiette pour ma personne. » Il paya en effet quatre cent mille livres pour leur rançon, rendit Damiette pour la sienne, et accorda au sultan une trêve de dix ans.

La régente pressait le roi de revenir en France ; mais, malgré ses instances, il passa en Palestine, où il demeura encore quatre années à faire réparer les fortifications de Césurée, de Philippe et des autres places dont les chrétiens étaient encore maîtres ; il fit rendre la liberté à plus de douze mille prisonniers faits par les Musulmans, et fut obligé de revenir enfin dans son royaume, après la mort de la reine Blanche sa mère.