Histoire de France, Patrimoine, Tourisme, Gastronomie, Librairie
LE 29 mars DANS L'HISTOIRE [VOIR]  /  NOTRE LIBRAIRIE [VOIR]  /  NOUS SOUTENIR [VOIR]
 
« Hâtons-nous de raconter les délicieuses histoires du
peuple avant qu'il ne les ait oubliées » (C. Nodier, 1840)
 

 
NOUS REJOINDRE SUR...
Nous rejoindre sur FacebookNous rejoindre sur XNous rejoindre sur LinkedInNous rejoindre sur VKNous rejoindre sur InstragramNous rejoindre sur YouTubeNous rejoindre sur Second Life

9 mars 1762 : condamnation de Jean Calas

Vous êtes ici : Accueil > Éphéméride, événements > Mars > 9 mars > 9 mars 1762 : condamnation de Jean (...)
Éphéméride, événements
Les événements du 9 mars. Pour un jour donné, découvrez un événement ayant marqué notre Histoire. Calendrier historique
9 mars 1762 : condamnation de Jean Calas
Publié / Mis à jour le vendredi 8 mars 2013, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 4 mn
 

Le procès de Calas est un des plus fameux qui aient été jugés au XVIIIe siècle ; il sert à faire voir combien a été funeste dans tous les temps l’influence d’une populace crédule et fanatique.

Jean Calas, marchand à Toulouse, était établi depuis quarante ans dans cette ville ; sa probité, la douceur de son caractère et la simplicité de ses mœurs, lui avaient concilié l’estime générale. Marc-Antoine Calas, l’aîné de tous ses fils, avait reçu de la nature une imagination forte, un génie ardent et extrême, dont le feu sombre était entretenu et nourri par les assemblées nocturnes du désert — il professait, comme son père, la religion protestante.

Jean Calas

Jean Calas

Le 12 octobre au soir, 1761, arrive à Toulouse, après un an d’absence, le jeune la Vaysse, âgé de vingt ans ; il visita en passant Marc-Antoine ; celui-ci voulut le retenir à souper ; Jean Calas le père joignit ses instances à celles de son fils. Lorsque le souper fut servi, Calas père, la dame Calas, les deux frères Marc-Antoine et Pierre, et le jeune la Vaysse se mirent à table ; Marc-Antoine mangea peu, se leva de table avant les autres, passa dans la cuisine. « Avez-vous froid, monsieur l’aîné ? lui dit la domestique. —Au contraire, répondit-il, je brûle » ; et aussitôt il disparaît.

Le souper fini, l’on rentra dans la chambre de la dame Calas ; elle, son mari, leur fils Pierre et la Vaysse. Peu inquiets sur l’absence de Marc-Antoine, qu’on croyait, selon sa coutume, au billard, ils se remirent à converser dans la plus grande sécurité, et ne se quittèrent qu’au moment où la Vaysse se retira. Pierre Calas prit alors un flambeau, et le suivit pour l’éclairer : descendus dans l’allée qui conduit à la rue, ils trouvèrent la porte de la boutique ouverte ; ils entrent pour en chercher la cause ; ils voient, suspendu entre les deux battants de la porte qui communique de la boutique au magasin le corps de Marc-Antoine.

A ce spectacle, tous deux jettent un cri perçant ; le père Calas se hâte de descendre, sa femme veut le suivre ; la Vaysse s’élance au devant d’elle, l’arrête et la fait remonter. Pendant qu’il la retient, Calas et son fils Pierre dépendent le cadavre, lui ôtent la corde et l’étendent sur le plancher ; la Vaysse vole aussitôt chez le chirurgien Gosse, qui étant arrivé, trouve le corps assez froid pour juger qu’il est sans vie depuis deux heures.

Cependant les sanglots et les cris de Calas avaient retenti jusque dans les maisons voisines ; la populace s’attroupe ; elle apprend que Marc-Antoine est mort, mais elle ignorait comment il avait péri : car les Calas étaient convenus entre eux que, pour soustraire la mémoire et le corps de Marc-Antoine à une condamnation infamante, ils garderaient un secret inviolable sur la manière dont il était mort. Imprudence funeste, qui fut une des causes de leur malheur.

Les capitouls David et Brive se transportèrent sur les lieux. Tandis qu’ils attendaient les chirurgiens mandés pour constater l’état du cadavre, le peuple qui assiégeait la porte, ce peuple toujours amoureux de grands forfaits, formait déjà les plus sinistres conjectures, quand tout-à-coup une voix s’élève du milieu de la foule : « Marc-Antoine a été tué par son père, parce qu’il allait se faire catholique. » Cette atroce calomnie ne manqua pas de produire son effet sur le peuple ; le bruit du parricide vole de bouche en bouche ; le sieur David en est frappé : dès ce moment, il ordonne que l’on se saisisse des Calas, du jeune la Vaysse et de la domestique. Les Calas, arrachés de leur maison, suivaient en pleurant le corps de leur fils. Quand on les interrogea comment il était mort, ils répondirent ce qu’ils étaient convenus entre eux de répondre. Ils furent aussitôt décrétés ; on les fit descendre dans les prisons, et c’est alors qu’ils commencèrent à sentir toute l’horreur de leur destinée.

La fermentation qui régnait déjà dans toute la ville fut considérablement augmentée par un spectacle des plus extraordinaires. Un convoi funèbre sort de l’Hôtel de ville avec le plus grand appareil, il s’avance à pas lents vers la cathédrale de Saint-Etienne ; cinquante prêtres l’accompagnent ; les pénitens blancs, revêtus des attributs de leur confrérie, font cortège ; vingt mille hommes suivent le corps, et ce corps est celui du protestant Marc-Antoine , auquel on décerne avec éclat, comme à un martyr de la religion catholique, les honneurs de la sépulture ecclésiastique. Cette étrange cérémonie était un arrêt de mort pour les Calas. Treize juges s’assemblent à la Tournelle ; on propose de juger d’abord Calas le père ; quelques-uns observèrent qu’il fallait d’abord prononcer sur le sort de la servante et de la Vaysse, afin de les remettre dans leur véritable classe de témoins. Le premier avis passe, et l’on tire de son cachot ce malheureux vieillard.

Comme il traversait la cour du palais pour subir son dernier interrogatoire, un bûcher enflammé frappe ses yeux ; on y brûlait un écrit calviniste ; à l’aspect du bourreau, des archers, de la populace et des flammes, il croit voir les apprêts de son supplice ; les gardes qui l’accompagnaient le confirment dans cette idée : alors tout son courage, toute sa raison l’abandonnent ; à peine lui reste t-il, dans son interrogatoire, la force d’élever une voix mourante, pour protester qu’il n’a point tué son fils. Les juges qui ignorent la cause de son trouble, le prennent pour l’embarras du crime, et croient lire, dans la pâleur de son front, l’aveu involontaire de son parricide.

De treize juges, sept opinèrent à la mort. La constance que ce malheureux vieillard fit paraître en marchant au supplice, et surtout l’ascendant impérieux de l’innocence, commençaient à élever dans tous les cœurs des sentiments confus de compassion, de regret et de repentir. Lorsqu’il est sur l’échafaud, le père Bourge s’approche et le conjure de rendre hommage à la vérité : Je l’ai dite, répond Calas, en levant les yeux vers le ciel ; puis jetant sur le religieux un regard d’étonnement : Eh quoi ! lui dit-il, vous aussi, vous pouvez croire qu’un père ait tué son fils !

Après sa mort, on procéda au jugement des autres accusés. Ceux-ci persévérèrent à soutenir unanimement qu’ils étaient tous innocents ; que Calas père l’était comme eux ; que ce vieillard était toujours resté avec eux, sans qu’ils se fussent un seul instant quittés les uns les autres. Par un second arrêt, les juges mirent hors de cour la veuve Calas, le jeune la Vaysse et la servante, et bannirent Pierre Calas sur un propos irreligieux, qu’un témoin, nommé Gazèves, lui avait imputé.

Des protecteurs généreux, frappés de l’irrégularité de la procédure qui avait préparé la condamnation de l’infortuné Calas, se réunirent pour faire réhabiliter sa mémoire. Ils portèrent les plaintes de sa famille au pied du trône. Par arrêt du conseil, du 4 juin 1764, rendu sur le rapport de M. de Crosne, la sentence des capitouls fut cassée, et la connaissance du procès attribuée aux requêtes de l’hôtel. Le 9 mars 1765, jour de l’anniversaire de la mort de l’infortuné Calas, ce tribunal rendit un jugement solennel, par lequel la mémoire de Calas a été réhabilitée, et sa veuve et ses enfants déchargés de toute accusation.

 
 
Même section >

Suggérer la lecture de cette page
Abonnement à la lettre d'information La France pittoresque

Saisissez votre mail, et appuyez sur OK
pour vous abonner gratuitement
Éphéméride : l'Histoire au jour le jour. Insertion des événements historiques sur votre site

Vos réactions

Prolongez votre voyage dans le temps avec notre
encyclopédie consacrée à l'Histoire de France
 
Choisissez un numéro et découvrez les extraits en ligne !