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Reine Galswinthe (Neustrie), mérovingienne. Naissance, mort, mariage, règne. Mérovingiennes

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Reines, Impératrices
Biographie des reines et impératrices françaises. Vie des souveraines, faits essentiels, dates-clés. Histoire des règnes
Galswinthe
(née en 540, morte en 568)
(Épouse Chilpéric Ier (roi de Neustrie) en 566)
Publié / Mis à jour le mercredi 13 octobre 2010, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 7 mn
 

Vers 566, les pompes du mariage de Sigebert avec Brunehaut (fille d’Athanagild ou Athanagilde, roi des Visigoths), racontées à la cour de Chilpéric qui avait répudié sa femme Audovère en 565 et promis le mariage à Frédégonde, firent sur son esprit une impression assez vive pour lui inspirer le désir d’imiter son frère et de se faire honneur par une haute alliance. Sigebert l’encouragea dans son projet, et tandis qu’à la cour de Tolède on se félicitait encore des honneurs rendus à Brunehaut sur la terre d’Austrasie, Athanaghild vit arriver une ambassade solennelle composée des plus nobles comtes francs, chargés de demander pour Chilpéric Ier la main de Galswinthe, sœur aînée de Brunehaut.

Athanaghild hésita : la réputation de Chilpéric effrayait sa prévoyance de père. La tendresse de Goïswinthe, mère de la jeune fille, s’alarma davantage encore ; ses inquiétudes étaient accrues par la répugnance de Galswinthe : « Jamais, non jamais, disait la princesse, je ne pourrai supporter l’idée d’appartenir à un tel homme. » Athanaghild déclara aux ambassadeurs qu’il ne donnerait sa fille que si Chilpéric promettait par serment de n’avoir qu’elle pour épouse tant qu’elle vivrait, de la traiter comme reine, et de ne jamais la répudier. Chilpéric promit tout ; dès le jour même où les courriers lui portèrent la réponse d’Athanaghild, il renvoya toutes les femmes auxquelles il donnait légèrement le titre de reines.

Frédégonde subit cet outrage ; mais sa prudente habileté dissimula. Pour toute prière elle dit à Chilpéric : « Que le roi mon seigneur me permette de rester dans sa maison et de servir la nouvelle reine, comme je servais Audovère qu’il a répudiée. » Cependant la réponse de Chlpéric ne laissait aucun prétexte à un refus d’Athanaghild, et au retour des ambassadeurs, après avoir reçu leur serment, prononcé sur leurs épées, Athanaghild annonça à sa fille qu’il fallait partir.

Séparation de Galswinthe et de sa mère

Séparation de Galswinthe et de sa mère

Tout était réglé, les trésors portés à Chilpéric par la nouvelle épouse, la dot qu’en retour elle devait recevoir de lui comme présent du matin ; mais tant de conventions, de serments et d’honneurs, n’avaient point rassuré Galswinthe. Dans ses Récits des temps mérovingiens, Augustin Thierry affirme que sitôt Galswinthe avertie que son sort venait d’être fixé d’une manière irrévocable, elle fut saisie d’un mouvement de terreur, elle courut vers sa mère, comme un enfant qui cherche du secours, et, jetant ses bras autour d’elle, elle la tint embrassée plus d’une heure en pleurant et sans dire un mot. Les ambassadeurs francs se présentèrent pour saluer la fiancée de leur roi ; mais à la vue de ces deux femmes sanglotant sur le sein l’une de l’autre et se serrant si étroitement qu’elles paraissaient liées ensemble, tout rudes qu’ils étaient, ils furent émus et n’osèrent parler de voyage.

Ils laissèrent passer deux jours, et, le troisième, ils vinrent de nouveau se présenter devant la reine, en lui annonçant cette fois qu’ils avaient hâte de partir, lui parlant de l’impatience de leur roi et de la longueur du chemin. La reine pleura, et demanda pour sa fille encore un jour de délai ; mais le lendemain, quand on vint lui dire que tout était prêt pour le départ : « un seul jour encore, dit-elle, et je ne vous demanderai plus rien. Savez-vous que là où vous emmenez ma fille il n’y aura plus de mère pour elle ? » Mais tous les retards possibles étaient épuisés.

Augustin Thierry poursuit le récit des événements tels qu’ils se seraient selon lui déroulés. Une longue file de cavaliers, de voitures et de chariots de bagage, traversa les rues de Tolède et se dirigea vers la porte du nord. Le roi suivit sa fille jusqu’à un pont jeté sur le Tage, à quelque distance de la ville ; mais la reine ne put se résoudre à retourner si vite, et voulut aller au-delà. Quittant son propre char, elle s’assit auprès de Galswinthe, et d’étape en étape, de journée en journée, elle se laissa entraîner à plus de cent milles de distance. Chaque jour elle disait : « C’est jusque là que je veux aller », et, parvenue à ce terme, elle passait outre. A l’approche des montagnes, les chemins devinrent difficiles ; elle ne s’en aperçut pas, et voulut aller encore plus loin ; mais comme les gens qui la suivaient grossissaient beaucoup le cortège et augmentaient les embarras et les dangers du voyage, les seigneurs goths résolurent de ne pas permettre que leur reine fît un mille de plus.

Il fallut se résigner à une séparation inévitable, et de nouvelles scènes de tendresse, mais plus calmes, eurent lieu entre la mère et la fille. « Sois heureuse, dit la mère, mais j’ai peur pour toi ; prends garde, ma fille, prends bien garde ». Galswinthe pleura et répondit : « Dieu le veut, il faut que je me soumette. » Et la triste séparation s’accomplit. Avant de monter sur le char qui devait la ramener en arrière, la reine des Goths s’arrêta au bord de la route, et, fixant ses yeux vers le chariot de sa fille, elle ne cessa de le regarder, debout et immobile, jusqu’à ce qu’il disparût dans l’éloignement et les détours du chemin.

Galswinthe, triste, mais résignée, continua sa route vers le nord ; son escorte, composée de seigneurs et de guerriers des deux nations, Goths et Francs, traversa les Pyrénées, puis les villes de Narbonne et de Carcassonne sans sortir du royaume des Goths qui s’étendait jusque-là ; ensuite elle se dirigea par la route de Poitiers et de Tours, vers la cité de Rouen où devait avoir lieu la célébration du mariage. Aux portes de chaque grande ville, le cortège faisait halte, et tout se disposait pour une entrée solennelle ; les cavaliers jetaient bas leurs manteaux de route, découvraient les harnais de leurs chevaux, et s’armaient de leurs boucliers suspendus à l’arçon de leur selle. La fiancée du roi de Neustrie quittait son lourd chariot de voyage pour un char de parade, élevé en forme de tour, et tout couvert de plaques d’argent. Augustin Thierry écrit que le poète contemporain Fortunat (ami de la reine sainte Radegonde) à qui sont empruntés ces détails, la vit entrer ainsi à Poitiers, où elle se reposa quelques jours ; il dit qu’on admirait la pompe de son équipage, mais il ne parle point de sa beauté.

Frédégonde

Noces de Galswinthe et Chilpéric à Rouen

Au terme de ce long voyage, Galswinthe fut reçue par son fiancé tant redouté, avec une distinction qui aurait pu donner de grandes espérances à un cœur plus ambitieux et moins timide ; mais Galswinthe ne s’y livra pas : le pressentiment d’un sinistre avenir ne quittait pas sa pensée ; cependant elle accueillit les témoignages d’amour de Chilpéric, qui parut flatté d’avoir une épouse de race royale, non moins noble que celle de son frère Sigebert. Si Galswinthe n’était pas jolie, la dignité de son maintien, et la bonté qu’elle témoignait, plurent aux conviés des noces ; tous ceux qui vinrent la saluer se retirèrent satisfaits ou d’une parole gracieuse ou d’un présent flatteur.

Le roi décerna à sa nouvelle épouse des honneurs extraordinaires ; tous les Francs, chefs et simples guerriers, jurèrent fidélité à l’épouse de Chilpéric, avec la même solennité qu’à un roi. Debout et rangés en demi-cercle, leurs épées nues et hautes, ils dévouèrent au tranchant du glaive quiconque violerait son serment. Le roi promit derechef, devant Dieu et devant les hommes, de ne jamais répudier la reine Galswinthe, et tant qu’elle vivrait de ne pas prendre d’autre femme.

Le lendemain des noces, Chilpéric, en présence de tous ses leudes, fit la cérémonie qui accompagnait le présent du matin. Tenant dans sa main droite la main de l’épouse, il jeta sur elle de la main gauche un brin de paille, en nommant à haute voix les objets qui formaient la dot ou ghibe-morgen. C’étaient, pour la nouvelle reine, les cités de Bigorre, de Bordeaux, de Cahors, de Limoges, de Béarn. Le don était confirmé sous le nom de charte présente et jurée, le brin de paille jeté sur l’épouse était regardé comme symbole, et le serrement de main, comme garant de la foi donnée.

Dans les jours qui suivirent, Chilpéric eut pour Galswinthe des complaisances qu’on n’aurait pas attendues de son humeur brusque et capricieuse. Un singulier mélange de barbarie sauvage et de prétention à la civilisation, formait le caractère de ce roi, que la suite de son règne a fait surnommer le Néron du Nord. Mais il ne fallait attendre de lui aucune délicatesse de sentiment. Toujours il fit le mal selon l’intérêt et même la fantaisie du moment, sans scrupule et sans remords. Galswinthe supporta pendant plusieurs mois tout ce qu’elle put avoir à souffrir de cette nature orgueilleuse et sauvage, toujours regrettant le ciel de sa patrie et la douce intimité de sa mère. Bientôt Frédégonde reprit son empire et arriva par degrés à rendre sa présence nécessaire. Alors de l’humilité hypocrite dans laquelle elle s’était quelque temps renfermée, elle passa à un orgueil bien calculé pour la perte de sa rivale, fit gloire de son triomphe et blessa la reine en toute occasion.

Après bien des pleurs versés en silence, Galswinthe osa se plaindre. « Ce n’est pas ce que vous aviez promis, dit-elle à Chilpéric. Il n’y a plus d’honneur pour moi à vivre dans votre maison, où je me vois outragée ». Chilpéric méprisa ces plaintes, et Galswinthe finit par un éclat auquel le roi s’attendait peu. Un jour elle lui demanda pour toute grâce la permission de retourner à Tolède. « Vous serez libre alors, lui dit-elle, accordez-moi cette faveur, et je vous rendrai tous vos dons, votre présent du matin ; je vous laisserai ce que j’ai apporté avec moi, vous jouirez de tout. Pour moi, il ne me faut que le repos et l’affection de mes proches, que je ne peux trouver ici, où celui qui devait me protéger m’abandonne, et où je suis traitée comme étrangère ».

Chilpéric ne pouvait croire à ce qu’il entendait. Comment aurait-il pensé, lui, plein d’avidité et d’ambition, que Galswinthe pût abandonner tant de richesses et le titre de reine ? Frédégonde sut flatter en secret l’incrédulité du roi, qui en était venu à ne pouvoir souffrir Galswinthe, mais il redoutait de se faire un ennemi d’Athanagild, et un autre de Sigebert qui suivrait sans aucun doute les inspirations de Brunehaut. Il ne voulut donc ni répudier son épouse, ni la laisser libre de le quitter ; il usa d’une profonde dissimulation, se montra plein de repentir et d’affection.

Chilpéric Ier étranglant Galswinthe, d'après les Grandes Chroniques de France (c'est en fait un serviteur du roi qui la tua)

Chilpéric Ier étranglant Galswinthe, d’après
les Grandes Chroniques de France
(c’est en fait un serviteur du roi qui la tua)

Galswinthe ne parla plus de séparation ; elle était sans défiance, lorsqu’une nuit, vraisemblablement sur l’ordre de Frédégonde, un serviteur de Chilpéric entra dans la chambre de la fille du roi goth et l’étrangla pendant qu’elle dormait. Ainsi furent accomplis ces sinistres pressentiments de Galswinthe qui lui faisaient regarder la Neustrie comme son tombeau. Le roi joua la surprise en apprenant la mort subite de sa femme : il versa même des larmes ; mais à peine quelques semaines étaient écoulées, qu’il épousait solennellement Frédégonde.

La mort de Galswinthe, aimée à cause de sa bonté et plainte pour ses malheurs, laissa une profonde impression dans l’esprit des témoins de cette vie sacrifiée. A ses funérailles, qui furent solennelles, un incident singulier vint ajouter à cette impression douloureuse quelque chose de mystérieux : une lampe de cristal suspendue près du tombeau, se détacha subitement et étant tombée sur le pavé sans se briser, elle continua de brûler. On se sentit saisi d’une émotion religieuse, et on se racontait que plusieurs avaient vu le marbre fléchir sous la lampe et la recevoir comme aurait pu le faire une cire molle... Cette mélancolique figure de Galswinthe laisse un souvenir triste et doux qui fait aimer son nom.

Sa mort subite, arrivée après les chagrins que lui avait causés le roi, ne pouvait être regardée par les amis de cette jeune reine que comme le résultat d’un crime. Sa sœur Brunehaut, épouse de Sigebert Ier, demi-frère de Chilpéric, le dit hautement, et excita son époux à la venger. Sigebert demanda l’alliance de Gontran ; les deux rois étaient mus par des sentiments différents. Sigebert, sous l’influence de Brunehaut, voulait punir le coupable ; il ne reculait pas devant la pensée d’un fratricide.

Gontran, ou plus calme, ou plus fidèle aux inspirations du christianisme, abandonna bientôt les projets de vengeance. Le rôle de médiateur lui parut plus beau. « Ne prenons pas les armes contre notre frère, dit-il à Sigebert ; si ta cause est juste, prends garde que la haine ne la rende inique. Au lieu de poursuivre Chilpéric sans lui laisser aucun relâche, accepte sa soumission. Nous convoquerons l’assemblée du peuple, et selon la loi nous demanderons pacifiquement la justice ; Chilpéric se soumettra, et nous n’aurons point répandu le sang de notre frère. » Sigebert céda à la sagesse de ces conseils ; mais il exigea que toutes les formalités des coutumes germaniques fussent rigoureusement suivies.

En présence des rois Chilpéric et Sigebert, le mâl (Mâl-Berg, montagne du conseil : assemblées dont l’usage a été apporté de Germanie par les rois francs), présidé par Gontran, donna satisfaction entière à Brunehaut. Il prononça que les cités de Bordeaux, Limoges, Cahors, Béarn et Bigorre, que Galswinthe, sœur de la très-excellente dame Brunehaut, avait reçues à titre de domaine et de présent du matin, deviendraient immédiatement la propriété de la reine Brunehaut et de ses héritiers. Moyennant cette composition, la paix devait être rétablie entre Chilpéric et Sigebert, car le meurtre se rachetait à prix d’argent par les lois franques ; les personnes royales étaient exceptées, mais la composition ou don en satisfaction, entraînait la complète réparation de l’injure.

Aussi les deux rois s’avancèrent l’un vers l’autre tenant à la main des branches d’arbre qu’ils échangèrent mutuellement et après avoir prêté serment. « Mon frère, dit Sigebert en présence des Francs, des hommes d’armes et d’honneur, convoqués selon la loi, sur les montagnes du conseil, je te donne à l’avenir paix et sécurité sur la mort de Galswinthe, sœur de Brunehaut. Tu n’auras plus à craindre de moi ni plaintes, ni poursuites, et s’il arrivait (ce qu’à Dieu ne plaise), que tu fusses inquiété par quelqu’un des miens, pour la composition que j’ai reçue de toi, cette composition te sera rendue au double ».

C’est avec cette solennité que le meurtre de Galswinthe fut, sinon vengé, du moins reconnu et expié. Mais les pressentiments de la reine, en s’accomplissant, avaient préparé de longs malheurs ; son nom devait être un brandon de discorde qui devint fatal à ceux qui désiraient la venger.

Galswinthe ne donna aucun enfant à Chilpéric.

 
 
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