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Histoire faune et flore : extraction du sucre

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Faune, Flore
Arbres célèbres, vertus des plantes, croyances liées aux animaux. Faune et flore vues par nos ancêtres. Balade au coeur des règnes animal et végétal
Sucre : extraction des différentes espèces
(D’après un article paru en 1835)
Publié / Mis à jour le vendredi 15 janvier 2010, par LA RÉDACTION
 
 
Temps de lecture estimé : 5 mn
 

Les chimistes français ne confondent pas sous le nom de sucre toutes les matières présentant au goût cette sensation particulière que l’on nomme saveur sucrée. Pour eux, le sucre est tout corps qui, mélangé avec de la levure de bière, ou autrement dit du ferment, donne de l’alcool (esprit-de-vin), et le gaz particulier connu sous le nom d’acide carbonique. A ce titre, ils reconnaissent différentes espèces de sucres, dont le plus précieux est, sans contredit, le sucre de cannes.

Ce mot ne doit pas seulement représenter à l’esprit le sucre extrait de la canne à sucre, mais encore le sucre extrait de la betterave, celui que l’on pourrait extraire de la châtaigne, de l’érable, du melon, des patates douces, de la carotte, etc. Il y a une si parfaite identité entre les sucres extraits de ces végétaux, que si on les faisait dissoudre chacun dans un verre différent, le goût du connaisseur le plus délicat ne saurait les distinguer.

Jusqu’à l’époque du fameux système continental de Napoléon, tout le sucre consommé en France nous arrivait par le commerce des deux Indes. Mais nos relations maritimes ayant été tout à coup interrompues, le gouvernement français appela l’attention des chimistes sur les moyens d’obtenir, par nos propres ressources, une substance devenue désormais indispensable. On fit de toutes parts de nombreuses tentatives. On clarifia le miel de manière à en concentrer le plus possible la saveur sucrée. Le chimiste Proust découvrit dans le raisin un sucre connu maintenant sous le nom de sucre de raisin, mais dont la saveur saccharine est bien moins forte que celle du sucre ordinaire. Napoléon, pour encourager de semblables découvertes, ordonna qu’il fût décerné à Proust une récompense de cent mille francs, à la condition toutefois de monter une fabrique de sucre de raisin. Proust, craignant de ne pas obtenir, en opérant sur de grandes quantités, le succès qu’il avait eu dans son laboratoire, se contenta de l’honneur de sa découverte, et refusa les cent mille francs. D’ailleurs le sucre de raisin est si loin de valoir le sucre ordinaire, que la découverte de Proust ne fit qu’exciter les esprits à de nouvelles recherches.

La science gagna beaucoup à cette époque ; les expériences sur toutes sortes de plantes se firent par milliers ; et si beaucoup furent infructueuses quant au but qu’elles se proposaient, du moins la chimie végétale s’enrichit de faits nombreux qui ont contribué, pour une bonne part, au degré d’élévation qu’elle a atteint de nos jours. On découvrit alors que, sous l’influence de l’acide sulfurique, le lin, la paille, des écorces, la sciure de bois, les vieux chiffons, pouvaient se convertir en un sucre véritable que l’on a su plus tard être identique avec le sucre de raisin.

Moulin pour exprimer le jus des cannes, à la Martinique.

Moulin pour exprimer le jus
des cannes, à la Martinique.

Enfin l’on songea à la betterave pour en extraire du sucre. Déjà, au commencement du XVIIe siècle, l’agronome français Olivier de Serre, avait indiqué la betterave comme propre à donner du sucre. En 1754, Margraff, chimiste de Berlin, parvint le premier à extraire du sucre de cette pulpe. En 1795, Achard, chimiste de la même ville, sut extraire du même végétal une notable proportion de sucre. Les essais d’Achard furent transmis en France à l’époque du système continental, et répétés avec succès.

On ne tarda pas à reconnaître l’identité complète du sucre de betterave bien raffiné avec le sucre de cannes. L’industrie française, puissamment excitée par le gouvernement, fit alors des efforts immenses pour préparer avec économie ce produit important.

Plus de deux cents fabriques s ’élevèrent et fournirent au commerce, dans l’espace de deux ans, des millions de Kilogrammes. Toutefois le sucre de betterave eut à lutter contre une défaveur dont la fraude l’avait frappé. Certains marchands avaient imaginé, pour faire fortune, de mêler aux cassonades le sucre de lait, substance qui n’a de ressemblance avec le sucre que le nom et l’apparence, et qui est beaucoup moins chère que le sucre ne l’était alors. Ces cassonades ainsi falsifiées sucraient beaucoup moins que celles dont on avait l’habitude de se servir avant la guerre. Il en résulta contre le sucre de betterave une forte dépréciation qui n’est pas encore effacée aujourd’hui dans l’esprit de beaucoup de personnes.

Pour vendre le sucre de betterave en pain, sorti des raffineries, on fut obligé d’en dissimuler l’origine, et on l’offrit à la consommation sous le nom et la forme de sucre raffiné des colonies. Comme il en a toutes les propriétés, cette ruse eut un plein succès ; on ne la découvrit pas.

Les progrès accomplis dans la culture de la betterave et dans les procédés de fabrication du sucre, ont considérablement diminué le prix de cette substance, relativement à ce qu’elle coûtait sous l’empire, où la livre a été portée jusqu’à six francs. Bien qu’elle soit à un taux assez bas aujourd’hui, il est beaucoup plus élevé que celui auquel le consommateur français pourrait l’obtenir sans les droits qui frappent à l’entrée de nos ports les sucres bruts préparés dans l’Inde. C’est ce dont il est facile de se convaincre en réfléchissant qu’au Bengale le sucre brut ne revient qu’au quart de ce qu’il coûte dans nos colonies. Le sucre de nos colonies elles-mêmes est sujet à un droit d’entrée dont le taux est déterminé d’après la protection que l’on croit convenable d’accorder aux fabricants français.

Pour comprendre comment on extrait le sucre, soit des cannes, soit des betteraves, etc., on doit se le présenter comme existant primitivement dans le suc de ces végétaux ; il s’y trouve mélangé à d’autres substances qui voilent à divers degrés sa douce saveur. L’art consiste à isoler le sucre en combinant divers procédés chimiques, au moyen desquels ces substances étrangères se trouvent peu à peu enlevées complètement. Nous ne pouvons pas entrer à cet égard dans des détails techniques, qui d’ailleurs rentrent plus particulièrement dans le travail du raffineur ; nous nous bornerons à dire comment on obtient le jus sucré, soit des cannes, soit des betteraves, de manière à en perdre le moins possible. Le jus des cannes s’extrait au moyen d’un moulin ou pressoir, par lequel les cannes sont fortement comprimées.

Vue des chaudières et des rafraîchissoirs, à la Martinique.

Vue des chaudières et des rafraîchissoirs,
à la Martinique.

Les gravures que nous présentons, prises sur les lieux même donnent un détail suffisant de ce qui se pratique sur les habitations des planteurs. Les cannes passent deux fois au laminoir : les cannes déjà pressées sont ensuite séchées pour alimenter le feu des chaudières.

Le jus porte le nom de vesou ; il est mis dans une première chaudières toujours en ébullition (seconde gravure). Des nègres, armés d’espèces de cuillères, le transportent au fur et à mesure de sa concentration dans une seconde chaudière toute voisine de la première, et de là dans une troisième, où il arrive à l’état de sirop fort épais.

Puis on le met dans les rafraîchissoirs, réservoirs plats et à large surface, percés de trous par où s’écoule la mélasse tandis que le sirop se prend en masse dure, que l’on casse pour la renfermer dans les boucauts ou grosses barriques. Dans ces boucauts on pile fortement et on brise ce sucre brut déjà concassé pour le mieux tasser, et pour en faire égoutter le reste du sirop qui s’écoule par quelques trous disposés à cet effet dans le fond.

Les betteraves, après avoir été lavées, sont poussées par un ouvrier contre une râpe animée d’une très grande vitesse ; par là elles se trouvent divisées en parties très ténues ; on en amasse de grandes quantités dans des sacs de toile que l’on presse très fortement, et dont le jus s’écoule. La proportion de jus contenue dans une betterave est énorme ; on estime qu’une betterave contient les quatre-vingt dix-neuf centièmes de son poids de jus, c’est-à-dire que sur 100 livres de betteraves, par exemple, il y en a 99 de jus et 1 de parties fibreuses formant l’ensemble des petits sacs ou cellules dans lesquels le jus est renfermé lorsque la betterave est intacte. L’on parvient aujourd’hui à extraire la presque totalité de ce suc ; mais on conçois que, quelques parfaits que soient les procédés, jamais ils ne permettront d’extraire la totalité entière. On ne perd guère maintenant que quatre centièmes.

Si la betteraves contient 99 pour 100 de jus, il s’en faut de beaucoup qu’elle contienne la même proportion de sucre. On estime que les betteraves les plus riches contiennent 12 à 12 et demi pour 100 de sucre, les moins riches n’en contiennent que 9 environ ; et les procédés de fabrication employés aujourd’hui ne permettent tout au plus que d’extraire la moitié de cette quantité.

Nous terminerons cet article en indiquant ce que l’on doit entendre par sucre candi, sucre de pomme et sucre d’orge. Le sucre candi est préparé par les confiseurs. Ils font dissoudre du sucre dans l’eau chaude de manière à former un sirop épais ; ils tendent quatre ou cinq fils dans le vase qui contient le sirop, et par le refroidissement les cristaux se déposent plus ou moins volumineux autour de ces fils et contre les parois du vase.

On distingue trois pièces de sucre candi : le blanc, qui est le plus pur, se forme avec du sucre en pain ordinaire ; celui de couleur paille est formé avec un mélange de partie égales de sucres terrés, de la Havane et de l’Inde ; enfin celui qui est roux est formé avec le sucre brut de qualité moyenne. Les sirops qui surnagent au-dessus des cristaux sont les plus souvent livrés au commerce sous les noms de sirop de gomme, sirop de guimauve, sirop de capillaire, suivant que le sucre candi est blanc, paille ou roux. Le sucre de pomme se fait en chauffant du beau sucre clarifié avec le tiers de son poids de jus extrait de belles pommes rainettes bouillies. Le sucre d’orge s’obtient en faisant bouillir de l’orge dans de l’eau, et mêlant ensuite à cette eau orgée et passée au tamis trois fois autant de sucre que l’on avait mis d’orge.

Toutefois, il est bon d’ajouter que la plupart des sucres dits de pomme et d’orge, ne contiennent ni orge, ni pommes. Les premiers sont faits le plus souvent avec du sirop clarifié et cuit convenablement ; les seconds avec du sirop de moindre qualité. Il n’est pas inutile d’ajouter ici que ces sortes de sucre sont de véritables sucres de raisin, car l’effet de la cuisson opère cette transformation sur le sucre ordinaire.

 
 
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