Histoire de France, Patrimoine, Tourisme, Gastronomie, Librairie
LE 29 mars DANS L'HISTOIRE [VOIR]  /  NOTRE LIBRAIRIE [VOIR]  /  NOUS SOUTENIR [VOIR]
 
« Hâtons-nous de raconter les délicieuses histoires du
peuple avant qu'il ne les ait oubliées » (C. Nodier, 1840)
 

 
NOUS REJOINDRE SUR...
Nous rejoindre sur FacebookNous rejoindre sur XNous rejoindre sur LinkedInNous rejoindre sur VKNous rejoindre sur InstragramNous rejoindre sur YouTubeNous rejoindre sur Second Life

Joseph-Marie Jacquard, inventeur du métier à tisser semi-automatique. Portrait, biographie, vie et oeuvre.

Vous êtes ici : Accueil > Personnages : biographies > Jacquard (Joseph-Marie) (1752-1834) (...)
Personnages : biographies
Vie, oeuvre, biographies de personnages ayant marqué l’Histoire de France (écrivains, hommes politiques, inventeurs, scientifiques...)
Jacquard (Joseph-Marie) (1752-1834)
révolutionne le métier à tisser
et s’attire des inimitiés
(D’après « Le Petit Journal illustré », paru en 1931)
Publié / Mis à jour le samedi 14 mars 2015, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 5 mn
 
 
 
Il est une foule d’inventions pratiques, d’améliorations industrielles qui sont l’œuvre de simples travailleurs. Jacquard, qui mit au point le métier de tissage semi-automatique, est le type de ces ouvriers de génie, modeste et désintéressé, de l’inventeur méconnu, persécuté par ceux-là même dont il voulait adoucir la tâche et améliorer le salaire.

Joseph-Marie Jacquard naquit à Lyon le 7 juillet 1752. Son père, Jean-Charles Jacquard, était maître ouvrier en étoffes d’or, d’argent et de soie. L’enfant fut d’abord employé à « tirer les lacs » du métier paternel, c’est-à-dire à tirer les cordes dont on se servait alors pour faire mouvoir la machine destinée à former le dessin de l’étoffe qu’on tissait. C’était un métier très dur, surtout pour un enfant assez chétif. La santé de l’apprenti ne tarda pas à s’altérer à ce rude travail. Ce que voyant, son père le mit d’abord dans un atelier de reliure, puis dans une fonderie de caractères.

Le jeune garçon avait appris, à peu près seul, à lire, à écrire et à compter. Déjà, une impérieuse vocation le poussait vers la mécanique. Il était constamment occupé à rechercher des améliorations de détail au machines servant aux industries dans lesquelles il travaillait. Une idée, surtout, le hantait : trouver le moyen de rendre plus maniable le métier à tisser et de supprimer ce tirage des cordes dont il avait tant souffert quand il aidait son père dans sa besogne.

Celui-ci mourut en 1772. Il laissait un patrimoine grâce auquel le jeune Jacquard, qui n’avait alors que vingt ans, put établir une petite fabrique de tissus façonnés. Malheureusement, le garçon était meilleur inventeur qu’industriel ; il passait plus de temps à chercher le progrès dans la fabrication qu’à recruter la clientèle, si bien qu’il ne tarda pas à se ruiner.

Joseph-Marie Jacquard

Joseph-Marie Jacquard

Il fallut tout vendre : les métiers, les meubles, jusqu’au lit du ménage, car Jacquard s’était marié quelque temps auparavant. Il lui fallut même quitter momentanément sa femme qu’il adorait, pour aller s’engager dans le Bugey comme chauffeur de fours à chaux. Pendant ce temps, Mme Jacquard entrait comme ouvrière dans une fabrique de chapeaux de paille.

La première invention
Bientôt, cependant, les époux purent être réunis. La fabrication des chapeaux de paille les occupa tous les deux. Et c’est à cette époque que Jacquard, ayant vu, dans un journal, l’annonce d’un prix proposé, en Angleterre, pour l’invention d’une machine à fabriquer la dentelle, construisit un métier qui répondait aux conditions fixées. Mais, chose curieuse, quand le métier fut fabriqué, il négligea d’en tirer parti et de l’envoyer au concours. Peut-être ne le jugeait-il pas assez parfait. Il se contenta de fabriquer une jolie pièce de dentelle qu’il offrit à un de ses amis, après quoi il remisa le métier au grenier.

Or, il avait complètement oublié cette invention, quand, un beau jour, il fut appelé chez le préfet de Lyon, et invité à apporter son appareil. Tandis que l’insouciant Jacquard oubliait sa dentelle, celle-ci avait fait son petit bonhomme de chemin : elle était allée jusqu’à Paris, où on l’avait examinée au Conservatoire des arts et métiers. Par la filière administrative, on demandait à voir la machine et à connaître l’inventeur.

Celui-ci tira celle-là du grenier, la remit en état et l’expédia dans la capitale. Quelque temps après, quelle ne fut pas surprise de voir pénétrer chez lui deux gendarmes qui lui intimèrent l’ordre de les suivre. La présence de Jacquard étant jugée nécessaire à Paris, on n’avait rien trouvé de mieux que de l’y faire conduire par la main gantée de la gendarmerie. On imagine aisément par quelles transes passa le malheureux inventeur tout le long de ce voyage. Ses angoisses ne cessèrent qu’à l’arrivée, quand on le mena aux Arts et Métiers, devant une commission de techniciens et de savants réunis pour examiner son invention.

Après cette épreuve, il fut présenté à Napoléon et à Carnot, qui le félicitèrent et l’encouragèrent à poursuivre ses travaux. C’est de cette étrange manière que les premiers essais de Jacquard furent connus et commencèrent sa réputation.

Les précurseurs
La plupart des grandes inventions ne sont pas, comme l’imaginent trop souvent les profanes, sorties d’un seul jet du cerveau humain. Il en est du métier de Jacquard comme de tant d’autres progrès industriels il a été conçu à la suite d’une série d’inventions successives qui lui ont préparé la voie.

Le métier Jacquard (1801)

Le métier Jacquard (1801)

En 1725, Basile Bouchon avait imaginé les aiguilles à crochet et la griffe, et se servait de cartons qu’un ouvrier manœuvrait à la main, à chaque duite, c’est-à-dire à chaque mouvement de marche qui fait lever et baisser la chaîne. Falcon, en 1728, avait su placer les cartons sur un prisme quadrangulaire percé d’autant de trous que l’armature comprenait d’aiguilles. Vaucanson, avant de se consacrer uniquement à la construction des automates qui firent sa célébrité, avait inventé le tambour percé de trous et muni d’un engrenage qui le faisait tourner automatiquement d’un cran à chaque coup de battant ; mais il n’employait pas les cartons, et ses combinaisons étaient par là même très bornées.

Jacquard reprit le système des cartons de Falcon, et c’est en le combinant avec le mécanisme de Vaucanson, oublié dans un coin du Conservatoire des arts et métiers, qu’il créa son fameux métier, dont il avait, d’ailleurs, appliqué déjà les principes, en 1800, dans la machine imaginée pour la fabrication de la dentelle.

Son métier, tout d’abord, passa moins pour une invention que pour un perfectionnement de celui de Vaucanson. Mais on se rendit compte bientôt du grand progrès accompli par le jeune Lyonnais, et on lui rendit pleine justice. Avant son invention, tous les fils qui doivent se lever ensemble pour former les dessins des étoffes brochées étaient levés par des cordes que tirait un apprenti auquel le tisseur était obligé de les indiquer. Pour peu que le dessin fût varié, cette disposition amenait dans le métier de singulières complications.

L’appareil inventé par Jacquard soumettait cette manœuvre à un procédé mécanique régulier, tirant son mouvement d’une simple pédale que l’ouvrier fait jouer lui-même. Ce premier métier Jacquard figura à l’Exposition des produits de l’industrie en 1801. L’auteur n’en obtint qu’une médaille de bronze. Cependant, il ne se découragea pas et apporta encore à son œuvre plusieurs perfectionnement pour le vidage et l’ourdissage. Mais, quand il s’agit de faire adopter le nouvel appareil par l’industrie, Jacquard se heurta aux plus graves difficultés.

L’ouvrier contre la machine
Le progrès industriel a été de tout temps entravé par l’idée selon laquelle l’augmentation de la production par les machines entraîne, par contrecoup, une diminution de personnel. Les tisseurs de Lyon, à cette époque, y croyaient fermement. Le rapporteur du jury de 1801 avait dit du métier Jacquard qu’ « il supprimait un ouvrier dans la fabrication des tissus brochés » ; il n’en fallut pas plus pour dresser les travailleurs contre la machine.

Les ouvriers lyonnais mécontents s'en prennent à Jacquard

Les ouvriers lyonnais mécontents s’en prennent à Jacquard

L’effet de ce préventions fut plus tragique encore qu’on ne l’eût pu croire. A trois reprises, la vie de Jacquard fut menacée par des fanatiques. Les ouvriers, ameutés contre lui, exigèrent des « prud’hommes » lyonnais la destruction de la machine dans laquelle l’inventeur n’avait eu pourtant pour but que l’économie de la main-d’œuvre et l’allègement des fatigues des pauvres « canuts » que l’ancien métier mettait positivement à la torture.

L’autorité céda. Sur la place des Terreaux, le métier nouveau fut mis en pièces aux applaudissements de la foule ; et, de même qu’autrefois les restes des grands criminels étaient jetés à la voirie, de même le fer de la machine de Jacquard fut vendu comme vieille ferraille, et le bois comme bois à brûler. Les préjugés à l’égard du métier de Jacquard ne se dissipèrent que lorsque la France commença à éprouver les effets de la concurrence étrangère.

Ces métiers perfectionnés, que les ouvriers lyonnais n’avaient pas voulu utiliser, qu’ils avaient même fait détruire en place publique, l’étranger s’empressa de les adopter. Alors, qu’arriva-t-il ? Tandis qu’à Lyon on continuait à se servir de vieilles machines, les concurrents étrangers de l’industrie lyonnais, grâce aux nouveaux métiers, produisirent les mêmes articles, mieux conditionnés, à meilleur marché, et plus rapidement. Résultat final : la clientèle se fournit à l’étranger.

Le triomphe
On se ressaisit à temps, et le métier Jacquard fut adopté enfin dans tous les ateliers lyonnais : l’industrie si française de la soie en reçut une impulsion nouvelle. Mais des années se passèrent encore avant que l’usage de ce métier se répandît dans les autres régions françaises. Ses succès furent lents et d’abord assez obscurs.

Ce n’est qu’à l’exposition de 1819 que pleine justice lui fut rendue. Le rapporteur écrivait alors : « Après toutes les difficultés, les refus, les critiques des fabricants, ce métier l’emporte à la fin sur les procédés coûteux, pénibles, insalubres même, qu’il remplace avec tant d’avantages. Le jury, en proclamant ce résultat, décerne à Jacquard la médaille d’or ; la croix d’honneur complète la récompense. »

Dès lors, le mécanisme merveilleux inventé par Jacquard fut adopté non seulement pour la fabrication des étoffes de soie façonnées, mais encore pour celle de toutes espèces d’étoffes, de toutes sortes de tissus. La dentelle à la mécanique est née elle aussi de cette invention. Jacquard a sa statu à Calais, où sa mémoire est pieusement honorée.

Le mérite de Jacquard ne fut égalé que par sa modestie et son désintéressements. Il négligea même d’exploiter les divers brevets d’invention qui lui avaient été accordés, et, notamment, ne retira aucun avantage de la découverte qu’il avait faite d’une procédé pour la confection des filets destinés à la pêche maritime.

 
 
Même rubrique >

Suggérer la lecture de cette page
Abonnement à la lettre d'information La France pittoresque

Saisissez votre mail, et appuyez sur OK
pour vous abonner gratuitement
Éphéméride : l'Histoire au jour le jour. Insertion des événements historiques sur votre site

Vos réactions

Prolongez votre voyage dans le temps avec notre
encyclopédie consacrée à l'Histoire de France
 
Choisissez un numéro et découvrez les extraits en ligne !