Quelques événements du 20 JANVIER

20 janvier 1560
Ce jour, dans la rude vallée enneigée de Roncevaux, une petite fille de quatorze ans pleurait à chaudes larmes. Pour que la paix soit scellée entre la France et l'Espagne, pour que la France puisse enfin mettre un terme à la guerre, Isabelle de la Paix - la paix de Cateau-Cambrésis - fille de henri II et de Catherine de Médicis, soeur du nouveau roi François II, a été donnée en mariage au peu réjouissant roi Philippe II d'Espagne, veuf pour la seconde fois. L'historien Jean-Lucas Dubreton nous peint l'arrivée de la petite Isabelle à Guadalajara où, pour faire oublier l'hiver, on a apporté du Midi des arbres en fleurs aux branches desquels des oiseaux ont été attachés. Philippe l'attend, assis, hiératique, sur un haut fauteuil doré et se montre aussitôt conquis. Isabelle, qui sur les instances de l'archevêque de Burgos a séché ses larmes, est mince, gracieuse, le teint clair, les yeux noirs comme les cheveux. Brantôme dira que les seigneurs n'osaient la regarder de peut d'en tomber amoureux et que les gens d'Eglise « en faisaient tout de même de peur de tentation », ce qui est sans doute excessif. Assurément, cette petite fille, qui a près de vingt ans de moins que lui, le change de sa seconde femme, la reine d'Angleterre Marie Tudor, qui avait, elle, vingt ans de plus que lui et, s'il faut en croire un témoin du temps, paraissait à trente-sept ans « vieille et délabrée ». Isabelle regardait avec intensité le lugubre visage flamand du roi, ce visage « agrémenté de la ganache propre aux Habsbourg ». Elle le regarde de ses yeux de braise et avec une telle insistance que le roi lui demande : « Voulez-vous voir si j'ai des cheveux gris ? »
Il trouve charmante cette « fleur de jeunesse » et bientôt la petite Française pourra écrire à sa mère qu'elle est la « plus heureuse femme du monde ». Isabelle s'est fort bien adaptée aux sévères coutumes castillanes, parle l'espagnol et servira la politique de son mari en se rendant en 1565 à bayonne pour voir sa mère Catherine, régente de France pendant la minorité de Charles IX.
Malheureusement, la santé d'Isabelle est chancelante. On craint un jour la petite vérole et on l'enrobe « avec des blancs d'oeufs battus, ce qui préservera sa beauté de toute cicatrice... » Au mois d'août 1566, elle met au monde la petite Isabelle - celle-là même qui, un jour, jurera de ne pas changer de chemise avant la prise d'Ostende par son mari, l'archiduc Albert. On le sait, la résistance de la ville se prolongea durant trois années et la chemise de l'archiduchesse donna son nom à la couleur isabelle.
La reine avait seulement vingt-trois ans lorsqu'elle se coucha pour mourir. La faute en était aux médecins de Valence dont on disait qu'ils avaient « longues jupes et courtes sciences ». Comme l'expliquait un diplomate vénitien : « En tirant le sang à leurs malades comme ils le feraient à des boeufs et en leur faisant prendre des médecines que chez nous on penserait plutôt à introduire par voie de clystère, ils ont vite fait de les expédier. »
Pour la première et la dernière fois, on vit Philippe II laisser couler ses larmes lorsque sa chère petite Isabelle de la Paix rendit l'âme en parlant de la France « qu'elle avait toujours regrettée ».

20 janvier 1666
Mort d'Anne d'Autriche, mère de Louis XIV. Fille aînée de Philippe III, roi d'Espagne, femme de Louis XIII, roi de France, et mère de Louis XIV, princesse aimable, elle ne put jamais être aimée de son mari. On prétend que beaucoup d'hommages et de voeux, ou éclatants ou secrets, l'en dédommagèrent. Tout l'aime, jusqu'au terrible Richelieu lui-même, fait pour glacer l'amour par sa sévérité, et pour l'effrayer par sa violence ; il psa, dit-on, porter ses voeux jusqu'à la reine, dont le faible crédit sur l'esprit de son faible mari, avait besoin de s'étayer de celui du cardinal. On attribue au mépris avec lequel il en fut reçu, tous les indignes traitements qu'il lui fit essuyer dans le cours de son ministère.
Quand Louis XIII pensa mourir à Lyon, en 1630, Richelieu lui fit croire que la reine s'était consolée par l'espérance d'épouser Monsieur ; la reine justement indignée de cette accusation, ne s'en était défendue qu'en disant : « J'aurais trop peu gagné au change. » Lorsqu'en 1643, elle vit le roi mourant, elle fit un dernier effort pour lui ôter une erreur si injurieuse pour elle. On connaît la réponse dure de Louis XIII : « Dans l'état où je suis, la religion m'ordonne de vous pardonner, mais non pas de vous croire. »
Le roi ne pouvant lui ôter la régence, voulut du moins borner son autorité par l'établissement d'un conseil de régence ; mais le parlement la lui déféra dans aucune restriction. Son administration fut celle du cardinal Mazarin, à qui elle donna toute sa confiance, et qui gouverna l'état même dans son absence, lorsque, cédant aux violences de la fronde et au cri public, point de Mazarin, ce ministre fut obligé de s'éloigner jusqu'à deux fois de la cour. Anne lui conserva une amitié fidèle, à laquelle on donna un autre nom dans les chansons, dans les libelles et dans les mémoires du temps.

20 janvier 1709
Mort du père de la Chaise, confesseur de Louis XIV. Jésuite, il était le petit-neveu du célèbre père Cotton, et fut, comme lui, confesseur du roi. Il succéda au père Ferrier en 1675. Il eut, comme Auguste, un Tibère qui le fit regretter, et dont la violence le fit passer pour modéré. Néanmoins, il donnait quelquefois des conseils violents à Louis XIV. Le père de la Chaise aimait le luxe et les plaisirs plus qu'il ne convenait à un religieux et surtout à un confesseur du roi. Les jansénistes lui reprochèrent souvent ses maisons de campagne, ses équipages, ses repas, les richesses qu'il répandait sur sa famille. Madame de Maintenon, peu amie des jésuites, quoiqu'ennemie des jansénistes, lui attribua longtemps la tiédeur de Louis XIV. Cette dame le trouvait faux et beaucoup trop familier : « Il a, dit-elle dans une lettre au cardinal de Noailles, plus de talent pour le mal que pour le bien. Cela peut-il être autrement, quand les intentions ne sont pas droites ?... Il fait de grandes doléances au roi... il surprend sa bonté par de tels discours. » Et dans une autre lettre : « Le père de la Chaise, dit-elle, m'est venu voir ; il était gai, libre à sa manière : sa visite avait plus l'air d'une insulte que d'une honnnnêteté. »

20 janvier 1745
En Allemagne, mort de l'empereur Charles VII. Electeur de Bavière, il fut un des principaux prétendants à la succession autrichienne, après la mort de l'empereur Charles VI, et fit valoir ses prétentions par les armes, contre l'illustre Marie-Thérèse, fille et héritière de Charles VI. S'étant rendu maître de Prague, avec le secours de la France, il s'y fit couronner roi de Bohême ; il fut ensuite couronné empereur à Francfort, en 1742. Son règne ne dura que trois ans, pendant une guerre continuelle dont il ne vit pas la fin, et dans laquelle il ne joua pas un rôle fort brillant ; il n'y parut ni comme empereur, ni comme général, dans le temps où elle était la plus vive : il succomba sous le poids de ses infirmités, de ses chagrins et de ses revers ; presque dépouillé de ses états, l'argent seul de la France le déroba aux besoins d'un particulier malheureux.

20 janvier 1771
Dissolution de tous les parlements du royaume : le grand conseil est converti en parlement. Dans un lit de justice tenu le 7 septembre de l'année précédente, le roi avait défendu au parlement de Paris :
- de se servir jamais des termes d'unité, d'indivisibilité, et de classes
- d'envoyer aux autres parlements d'autres mémoires que ceux qui sont spécifiés par les ordonnances
- de cesser le service, sinon dans les cas que ces mêmes ordonnances ont prévus
- de donner leur démission en corps
- de rendre jamais d'arrêt qui retarde les enregistrements, le tout sous peine d'être cassé.
Le parlement, sur cet édit, solennel, ayant encore cessé le service, le roi leur fit porter des lettres de jussion ; ils désobéirent. Nouvelles lettres de jussion, nouvelle désobéissance. Enfin, le monarque poussé à bout, leur envoya, pour dernière tentative, le 20 janvier, à quatre heures du matin, des mousquetaires qui portèrent à chaque membre un papier à signer. Ce papier ne contenait qu'un ordre de déclarer s'ils obéiraient ou s'ils refuseraient. Plusieurs voulurent interpréter la volonté du roi. Les mousquetaires leur dirent qu'ils avaient ordre d'éviter les commentaires ; qu'il fallait un oui ou un non.
Quarante membres signèrent ce oui, les autres s'en dispensèrent. Les oui étant venus le lendemain au parlement avec leurs camarades, leur demandèrent pardon d'avoir accepté, et signèrent non : tous furent exilés. On institua six parlements nouveaux sous le titre de conseils supérieurs, avec injonction de rendre gratis la justice. Ces conseils furent établis dans les villes d'Arras, Blois, Châlons, Clermont, Lyon, Poitiers. On y en ajouta d'autres depuis pour remplacer quelques parlements supprimés dans les provinces. Le roi vint à paris le 13 avril suivant installer un nouveau parlement à la place de l'ancien. Louis XVI, à son avènement à la couronne, rétablit l'ancien parlement le 12 novembre 1774.

20 janvier 1775
Naissance à Lyon d'André-Marie Ampère, savant de renom. Très curieux intellectuellement, André-Marie lira à quatorze ans les vingt volumes de l'Encyclopédie. A dix-huit ans il connaît les principales oeuvres mathématiques de son temps. Sa jeunesse sera marquée par un frame : la mort de son père, juge de paix à Lyon, arrêté puis décapité parce qu'aristocrate. André-Marie surmontera sa douleur pour se remettre à des études scientifiques et philosophiques. Successivement professeur à Bourg, à Lyon, à Paris, professeur à l'École polytechnique, nommé inspecteur général de l'Université, membre de l'Institut, enfin professeur au Collège de France, il décèdera à Marseille le 10 juin 1836.

20 janvier 1793
On signifie à Louis XVI le décret qui le condamne à mort. Ce dimanche, les ministres se réunirent dans la matinée pour délibérer sur l'exécution de ce décret, qui leur avait été notifié entre trois et quatre heures après minuit. Ils appelèrent deux commissaires du département, le maire de Paris, le commandant général, l'accusateur public, et le président du tribunal criminel du département de Paris.

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